À écouter : Dieu peut-il appeler des hommes pécheurs ?
« En passant devant le bureau d’un publicain, un collecteur d’impôts donc pécheur public, Jésus le voit, regarde Matthieu dans les yeux et lui dit : « Suis-moi. » Saint Bède le vénérable commente : " Jésus vit un publicain et, comme il le regardait avec miséricorde, il le choisit. " ». Une chronique de Mgr Denis Jachiet, vicaire général.
« Adressez-vous à quelqu’un d’autre que moi, mon père, je ne peux pas prendre la responsabilité que vous me demandez dans la paroisse. » Le curé qui a l’habitude de ce genre de refus affute ses arguments : « Cela ne prendra pas trop de temps, vous allez recevoir la formation nécessaire, vous ne porterez pas cela tout seul, etc… » Poussée dans ses retranchements, la personne avoue son objection, à la surprise de son curé : « Un pécheur comme moi ne peut faire partie de l’équipe pastorale de la paroisse ! »
Sans être impliqués dans des activités criminelles, ni dans un style de vie scandaleuse, bien des chrétiens pratiquants ne se sentent pas dignes d’être appelés à prendre une responsabilité simplement parce qu’ils ont une conscience vive d’être des pécheurs, trop éloignés du Seigneur.
Il faut alors relire avec eux des pages de l’évangile. Jésus rencontre un possédé à Gerasa, il le libère de la légion qui le tenait captif et lui déclare : « Annonce tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde. » (Mc 5,19) En passant devant le bureau d’un publicain, un collecteur d’impôts donc pécheur public, Jésus le voit, regarde Matthieu dans les yeux et lui dit : « Suis-moi. » Saint Bède le vénérable commente : « Jésus vit un publicain et, comme il le regardait avec miséricorde, il le choisit. » Le pape François a fait sa devise des mots latins de ce commentaire : Miserando et eligendo.
D’un même regard Jésus offre sa miséricorde au pécheur et choisit celui dont il veut faire son Apôtre. Avant d’écarter tout appel de Dieu, toute demande qui nous est faite parce que nous nous sentons trop pécheurs, il nous faut accueillir longuement ce regard aimant de Jésus. C’est dans un même mouvement qu’il choisit et qu’il pardonne. C’est dans un même regard qu’il fait miséricorde et qu’il appelle à être son disciple et son envoyé.
Si nous sommes désireux d’aimer et de servir le Christ, pas seulement par des mots mais des actes en vérité, n’attendons pas d’être parvenus au degré de conversion que nous espérons. Le Seigneur peut venir et nous saisir au milieu de notre misère et de nos efforts inaboutis. Il peut poser sur nous, comme sur le jeune homme riche un regard d’amour plein de miséricorde qui nous dit : « N’attend donc pas d’être un saint pour me répondre, c’est en me servant que je ferai de toi un saint. »