Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe pour les prêtres défunts en l’église Notre-Dame des Champs

Samedi 2 novembre 2024 - Notre-Dame des Champs (6e)

- Is 25 ; Ps 26 ; Jn 11, 1-27

Dans la première lecture, tirée du Livre d’Isaïe, nous avons entendu cette phrase : « Voici notre Dieu, nous comptions sur lui, il nous a sauvés. » Combien de fois des prêtres, au cours de leur ministère, de leur existence, ont-ils prononcé des paroles semblables à celles-ci ? Présenter aux frères et sœurs fidèles du Christ cette parole à des moments difficiles de leur existence, leur permettre de passer au-delà d’un deuil ou à travers un deuil pour rejoindre la promesse de Dieu : « Voici notre Dieu, nous comptions sur lui, il nous a sauvés ». Il nous a sauvés des larmes, sauvés de la tristesse, sauvés de la douleur de perdre un proche, sauvés de bien des situations terribles dans lesquelles les hommes et les femmes, nos frères et nos sœurs, nous-mêmes, nous sommes capables de passer, parce qu’à des moments la vie est difficile. Combien de fois des prêtres ont dit de telles paroles pour encourager, pour faire revivre, pour donner foi et espérance, pour permettre à la charité de vaincre vraiment ? C’est une joie de pouvoir se souvenir des prêtres que vous avez connus, que nous avons connus et qui sont passés de l’autre-côté, qui sont maintenant – nous l’espérons pour eux – dans la vision. Quelle joie de pouvoir évoquer cette part du ministère de prêtre qui sait apporter consolation, compassion, qui sait ouvrir vraiment le cœur des fidèles, des croyants, à cet immense don de Dieu : « Il nous a sauvés, nous comptions sur lui. »

Nous comptions sur les prêtres pour nous dire cela, nous attendions qu’ils le disent au moment où nous en avions besoin. Et ils l’ont fait. Nous rendons grâce à Dieu, en ce jour et alors que leur existence terrestre est terminée, pour ce qu’ils ont pu faire ainsi dans leur vie.

Dans le psaume, nous avons entendu cette autre parole : « J’ai un désir, j’ai une attente, c’est habiter ta maison Seigneur. » Cela aussi des prêtres l’ont vécu. Chaque jour, le profond désir d’un fidèle du Christ, et évidemment d’un prêtre dans l’Église, dans le service du Christ, dans le service de son Évangile, c’est d’être toujours habitant de la maison du Seigneur. Les prêtres sont des hommes comme tout le monde, et donc capables eux-mêmes de voir leur désir faiblir, et notamment ce désir d’habiter avec le Seigneur. Capables aussi de ne plus trouver les mots pour le dire à certains moments de leur existence, de passer eux-mêmes à travers des crises. Cela est normal, cela ne peut pas ne pas exister : on ne peut pas imaginer que les prêtres ne soient pas des humains comme les autres capables de douter, capables d’être en difficulté. Mais cette promesse ils l’ont vécue, ils l’ont accueillie, ils savent que, jour après jour, habiter la maison du Seigneur c’est aller à la rencontre des frères et des sœurs que le Seigneur met sur leur chemin. Ils savent qu’habiter la maison du Seigneur c’est écouter la parole de Dieu pour être soi-même remis dans le chemin d’une foi et d’une confiance absolues dans le Seigneur. Ils savent qu’habiter la maison du Seigneur c’est donner les sacrements à leurs frères, de ne jamais oublier de transmettre les dons de la grâce de Dieu, car là est leur ministère. Et en célébrant l’eucharistie ils se trouvent habiter la maison du Seigneur : la célébration de l’eucharistie, des sacrements, la proclamation de la Parole de Dieu, est ce qui remet vraiment dans le chemin, quand on a l’impression d’y avoir été moins fidèle. C’est une belle chose qui leur est donnée de pouvoir ainsi s’accrocher à cette présence du Seigneur, pour pouvoir la donner et y être associés quand ils la donnent. Ce n’est plus une promesse, c’est quelque chose qu’ils vivent, que nous vivons, au jour le jour, quand nous essayons, le mieux possible, d’être fidèles à l’écoute de la Parole, à la prière pour tous, au don des sacrements, à la consolation apportée.

C’est justement de la consolation dont il s’agit dans l’évangile que nous venons d’entendre. Beaucoup de juifs, est-il dit dans ce passage de saint Jean, étaient venus pour consoler Marthe et Marie, les sœurs de Lazare. Nous sommes nombreux, nous l’espérons, je l’espère, à aller consoler ceux qui sont dans la peine. Les prêtres le font, je le crois, de tout leur cœur : apporter cette compassion, ce réconfort, de la part du Christ. Parce que, vous l’avez compris dans ce que nous venons d’entendre, si de nombreux Juifs sont venus consoler, réconforter Marthe et Marie, il se trouve que c’est Jésus lui-même qui se présente comme la source du réconfort, la source la plus vivante, la source la plus sûre du réconfort à apporter à ceux qui sont dans la peine. Le Seigneur Jésus ne nie pas que des hommes et des femmes comme nous soient capables d’apporter du réconfort, et un passage d’une lettre saint Paul explique que nous réconfortons les autres parce que nous sommes réconfortés nous-mêmes par le Seigneur. C’est lui qui nous apporte cette compassion et ce réconfort, c’est lui qui est la source du réconfort que des prêtres peuvent apporter à ceux qui sont dans la peine, dans la douleur, dans la crise peut-être, la crise de leur foi, la crise de leur espérance.

Nous rendons grâce à Dieu parce qu’il nous donne les moyens de nous réconforter les uns les autres. Il les donne notamment à ceux qui le servent dans la proclamation de l’Évangile, dans le don des sacrements, dans la charité pastorale. Nous rendons grâce à Dieu pour ce qu’il fait, pour ce qu’il nous permet de faire, pour ce qu’il donne aux prêtres de faire dans leur ministère. C’est le moment de notre prière pour eux, que Dieu leur soit fidèle puisqu’ils ont cherché à l’être envers lui : que Dieu nous permette de chanter l’action de grâces de tout notre cœur pour le ministère des prêtres.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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