Jean-Paul II, Message pour la Paix

1er janvier 1990

« L’éducation à la responsabilité écologique est donc nécessaire et urgente ».

L’éducation à la responsabilité écologique n’est pas un refus du monde moderne. Elle suppose une conversion authentique dans la manière de penser et d’agir

L’éducation à la responsabilité écologique est donc nécessaire et urgente : responsabilité envers soi-même, responsabilité à l’égard des autres, responsabilité à l’égard de l’environnement. C’est une éducation qui ne peut être fondée simplement sur l’affectivité ou sur des velléités mal définies. Son objectif ne peut être ni idéologique ni politique, et sa conception ne peut s’appuyer sur le refus du monde moderne ou le désir vague d’un retour au “paradis perdu”. La véritable éducation à la responsabilité suppose une conversion authentique dans la façon de penser et dans le comportement. Dans ce domaine, les Églises et les autres institutions religieuses, les Organisations gouvernementales et non gouvernementales, et aussi toutes les composantes de la société ont un rôle précis à remplir. Toutefois, la première éducatrice demeure la famille, dans laquelle l’enfant apprend à respecter son prochain et à aimer la nature.

Si l’homme n’est pas en paix avec Dieu, la terre n’est pas en paix et elle souffre

Lorsqu’il s’écarte du dessein de Dieu créateur, l’homme provoque un désordre qui se répercute inévitablement sur le reste de la création. Si l’homme n’est pas en paix avec Dieu, la terre elle-même n’est pas en paix : « Voilà pourquoi le pays est en deuil et tous ses habitants dépérissent, jusqu’aux bêtes des champs et aux oiseaux du ciel, et même les poissons de la mer disparaîtront » (Os 4,3). L’expérience de cette “souffrance” de la terre nous est commune avec ceux qui ne partagent pas notre foi en Dieu. En effet, tous ont sous les yeux les dévastations croissantes causées dans le monde de la nature par le comportement d’hommes indifférents aux exigences secrètes, mais clairement perceptibles, de l’ordre et de l’harmonie qui le régissent.

La crise écologique est un problème moral. Elle révèle la profondeur de la crise morale de l’humanité

Le signe le plus profond et le plus grave des implications morales du problème écologique se trouve dans les manquements au respect de la vie qui se manifestent dans de nombreux comportements entraînant la pollution. Les conditions de la production prévalent souvent sur la dignité du travailleur, et les intérêts économiques l’emportent sur le bien des personnes, sinon même sur celui de populations entières. Dans ces cas, la pollution ou la destruction de l’environnement sont le résultat d’une vision réductrice et antinaturelle qui dénote parfois un véritable mépris de l’homme.
De même, des équilibres écologiques délicats sont bouleversés par une destruction incontrôlée des espèces animales et végétales ou par une exploitation imprudente des ressources ; et tout cela, il faut le rappeler, ne tourne pas à l’avantage de l’humanité, même si on le fait au nom du progrès et du bien-être.
Enfin, on ne peut pas ne pas considérer avec une profonde inquiétude les possibilités considérables de la recherche biologique. On n’est peut-être pas encore en mesure d’évaluer les troubles provoqués dans la nature par des manipulations génétiques menées sans discernement et par le développement inconsidéré d’ espèces nouvelles de plantes et de nouvelles formes de vie animale, pour ne rien dire des interventions inacceptables à l’origine même de la vie humaine. Dans un domaine aussi délicat, il n’échappe à personne que l’indifférence ou le refus des normes éthiques fondamentales portent l’homme au seuil même de son auto-destruction.

Pas de solution au problème écologique si l’humanité ne révise pas sérieusement son mode de vie

La société actuelle ne trouvera pas de solution au problème écologique si elle ne révise sérieusement son style de vie. En beaucoup d’endroits du monde, elle est portée à l’hédonisme et à la consommation, et elle reste indifférente aux dommages qui en découlent. Comme je l’ai déjà fait observer, la gravité de la situation écologique révèle la profondeur de la crise morale de l’homme. Si le sens de la valeur de la personne et de la vie humaine fait défaut, on se désintéresse aussi d’autrui et de la terre. L’austérité, la tempérance, la discipline et l’esprit de sacrifice doivent marquer la vie de chaque jour, afin que tous ne soient pas contraints de subir les conséquences négatives de l’incurie d’un petit nombre.

La solution du problème écologique nécessite l’implication de chaque État et une action internationale concertée

Dans de nombreux cas, les dimensions des problèmes de l’environnement dépassent les limites des États : leur solution ne peut donc être trouvée uniquement au niveau national. On a récemment enregistré quelques mesures de bon augure en vue d’une action internationale souhaitable, mais les instruments et les organismes existants sont encore insuffisants pour la mise en œuvre d’un plan d’intervention coordonné. Des obstacles politiques, des formes exagérées de nationalisme et des intérêts économiques – pour ne rappeler que quelques facteurs – ralentissent ou même bloquent la coopération internationale et l’adoption de programmes efficaces à long terme.

Urgence d’une solidarité nouvelle entre les pays riches et les pays en voie de développement

Aucun plan, aucune organisation ne pourra réaliser les changements envisagés, si les responsables des nations du monde entier ne sont pas vraiment convaincus de la nécessité absolue de cette solidarité nouvelle appelée par la crise écologique et essentielle à la paix.

L’équilibre écologique n’est atteignable que si l’on s’attaque directement aux formes structurelles de la pauvreté

Par exemple, la pauvreté rurale et la répartition des terres ont conduit dans de nombreux pays à une agriculture de simple subsistance et à l’appauvrissement des sols. Quand la terre ne produit plus, de nombreux agriculteurs s’établissent dans d’autres zones, aggravant souvent le processus de déforestation incontrôlée, ou bien ils s’installent dans des centres urbains déjà dépourvus d’infrastructures et de services. En outre, certains pays fortement endettés sont en train de détruire leur patrimoine naturel, entraînant d’irrémédiables déséquilibres écologiques, afin d’obtenir de nouveaux produits d’exportation. Toutefois, face à ces situations, lorsqu’on évalue les responsabilités, il serait inacceptable de ne mettre en accusation que les pauvres pour les effets négatifs qu’ils produisent sur l’environnement. Il convient plutôt d’aider les pauvres, à qui la terre est confiée comme à tous les autres, à surmonter leur pauvreté ; et cela requiert une réforme courageuse des structures et de nouveaux modèles de rapports entre les États et les peuples.

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Écologie : notre responsabilité commune envers l’humanité

Le Vatican et l’écologie