La Passion de Ménilmontant : entre héritage et modernité
Paris Notre-Dame du 14 mars 2024
Durant le temps du Carême, l’association La Passion de Ménilmontant propose chaque week-end une pièce de théâtre sur les derniers instants de la vie du Christ. Une représentation qui parle à tous les publics, adultes, enfants, croyants et non croyants.

« Eloï ! Eloï ! Lamma sabachtani ?! » (« Mon Dieu ! Mon Dieu ! Pourquoi m’as-tu abandonné ?! » NDLR). Le cri d’angoisse de Jésus transperce l’obscurité. Derrière un rideau diaphane, la souffrance de son agonie se devine. Pudique, la scène est aussi saisissante que celle de Gethsémani et embarque les spectateurs dans une sourde attention pour les derniers tableaux de la pièce de théâtre La Passion de Ménilmontant. Cette pièce retrace les dernières heures de la vie du Christ, de l’entrée en triomphe dans Jérusalem jusqu’à sa crucifixion et la descente de la Croix.
L’humanité du Christ sublimée
Voilà plus de quatre-vingt-dix ans que les dernières heures de la vie du Christ sont jouées sur les planches d’une scène lovée au sein de la crypte de l’église St-François-d’Assise (19e), dans le quartier de Ménilmontant. « La pièce a été écrite en 1932 par le patronage de la paroisse, explique Jean-Baptiste Martin, vice-président de l’association La Passion de Ménilmontant, ce sont les petits gars du quartier qui l’ont fait vivre en famille. Cette histoire se perpétue avec des comédiens amateurs ou semi-professionnels, issus du 20e ou d’autres arrondissements. Dimanche dernier, nous avons joué notre 760e représentation ! À titre personnel, je pense que le secret de cette longévité est l’esprit de troupe. J’y ai trouvé une seconde famille. Il y a dans la troupe des personnes très croyantes et d’autres qui sont athées mais une alchimie se créée entre nous. » La pièce mélange des passages extraits de la Bible et des scènes imaginées, comme le dialogue entre les disciples de Jésus et Judas, peu avant la Cène. Judas tente de les convaincre d’abandonner le Christ et les interpelle : « Où est le royaume promis ? » Saint Thomas commence à douter avec lui, prémices de son incrédulité future lorsque Jésus, ressuscité, viendra à sa rencontre. « Le texte a beaucoup évolué depuis 1932. Le choix qui prédomine dans la mise en scène aujourd’hui est de poser des faits, sans apporter de réponse », souligne Jean-Baptiste Martin. Pour la première représentation de l’année, la salle ne fait pas comble mais le public est conquis. « Je suis athée et je ressens une profonde ferveur. Ce n’est pas que du théâtre », souffle Hélène à voix-basse, accompagnée de Marie-Christine, bouddhiste. Michael, étudiant en théologie, ajoute : « Je trouve qu’il y a une bonne interprétation des textes. Ils ont, par exemple, repris le texte des Béatitudes qui est le cœur du message de Jésus. La mise en scène donne du sens à ce discours. » Il faut reconnaître que le personnage de Jésus, joué par Raphaël Godis, est très convaincant. On comprend la part d’humanité du Christ. De lui émane une grande douceur qui a su toucher le public. Dans ce temps du Carême, cette pièce peut être vécue comme un cheminement vers Pâques ou une belle façon de mieux connaître la vie du Christ. Sa part divine et humaine font écho en chacun de nous quelle que soit notre spiritualité. D’ailleurs, la fin de La Passion sonne comme une invitation. Jésus, tend les bras et, s’adressant au public, pose une ultime question dans un cri : « Et vous ? Qui dites-vous que je suis ? »
Marie-Charlotte Noulens
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