Pierre Tis, un Bahnar à Paris
Paris Notre-Dame du 17 mai 2018
C’est l’histoire d’un jumelage entre N.-D. de la Salette (15e) et la paroisse catholique d’un petit village perdu du Vietnam, Mang La. À l’origine ? Le parcours du P. Pierre Tis, Français d’origine vietnamienne, prêtre du diocèse de Paris.
II est « montagnard » et il insiste sur ce mot. Pierre Tis. Son prénom et son nom témoignent de son histoire, depuis sa naissance dans un village catholique des hauts plateaux du centre du Vietnam, au sein d’une famille de l’ethnie Bahnar, jusqu’à son installation définitive en France, en 1970. Pierre, ou « Petro », est le prénom de baptême qu’il a reçu à sa naissance, en avril 1955. Et Tis, son nom bahnar, choisi par une grandtante maternelle. Son village ? Mang La. Nom donné à l’association que ce prêtre du diocèse de Paris, ordonné en 1982 à la chapelle des Missions étrangères de Paris (MEP), a montée avec plusieurs fidèles de N.D. de la Salette (15e), lorsqu’il en était curé. Une association d’entraide fraternelle et spirituelle avec la paroisse de Mang La, N.D. de la Présentation au Temple. C’était en 1992.
De Mang La à Paris
« Ma famille, des paysans des forêts de la province de Kontum, est catholique depuis plusieurs générations », raconte sobrement l’homme à la peau mate et à la carrure trapue, propres à son ethnie, évangélisée par les missionnaires MEP dès 1848. La culture bahnar, ethnie minoritaire aux traditions animistes ancestrales, diffère de la culture traditionnelle vietnamienne, à majorité bouddhiste et confucianiste. « Les Pères missionnaires ont voulu préserver et valoriser notre patrimoine culturel, explique le P. Tis, en y faisant passer la lumière du Christ. C’est un père MEP, Pierre Dourisboure [décédé en 1890, NDLR], qui écrivit le premier dictionnaire bahnarfrançais. » De cet héritage qui imprègne les murs des maisons traditionnelles de son village aux immenses toits de chaume, Pierre Tis en retire une soif : « Il était déjà clair, dès le lycée, que je voulais consacrer ma vie au Christ et prolonger la transmission de la foi chrétienne, dans le respect de notre peuple. » En 1970, en pleine guerre indochinoise, Mgr Paul Seitz, évêque MEP de Kontum, envoie le jeune Pierre, 15 ans, en France dans la Somme, puis à Rome (Italie), pour qu’il puisse terminer ses études et entrer au séminaire. Il ne sait pas alors qu’il ne retournera que vingt ans plus tard dans son village, en 1991, à peine naturalisé français après avoir bénéficié du statut d’apatride en France. « Je me considère Parisien, avec une sensibilité bahnar », sourit celui qui est aujourd’hui chapelain à la basilique du Sacré-Cœur (18e), à la disposition du diocèse de Kontum, où il se rend deux fois par an. Depuis plus de vingt-cinq ans, à N.D. de la Salette (15e) comme à N.D. de la Présentation au Temple, une messe mensuelle est dite aux intentions des deux paroisses. L’association, en récoltant des dons en France, contribue à soutenir la vie pastorale de la paroisse de Mang La, mais aussi la scolarisation et le suivi sanitaire des enfants et des étudiants du village. Ainsi que leurs cultures familiales de riz et de manioc. « Leur foi confiante est un véritable stimulant pour moi, conclut le P. Tis. Le territoire paroissial de Mang La comprend 6000 habitants, parmi lesquels 95% de pratiquants. Cela fait du monde dans notre église (voir photo), qui est trop petite pour tous les contenir ! »
Propos recueillis par Laurence Faure
Pour soutenir Mang La
Envoyez vos dons à Association
d’entraide fraternelle du Haut-Vaugirard - Mang La, 27 rue de Dantzig, 15e.
Contact : asso.mangla@gmail.com