Synode : laisser la parole circuler

Paris Notre-Dame du 20 janvier 2022

À Paris, les fidèles se sont lancés dans la phase diocésaine du synode des évêques sur la vie de l’Église et la synodalité, dont la phase finale aura lieu à Rome en octobre 2023. Échos de l’atelier synodal « Écoute et Parole » proposé par le diocèse et mis en place par diverses paroisses, du 16e au 19e arrondissements de la capital.

À Paris, les fidèles se sont lancés dans la phase diocésaine du synode des évêques sur la vie de l’Église et la synodalité, dont la phase finale aura lieu à Rome en octobre 2023. Échos de l’atelier synodal « Écoute et Parole » proposé par le diocèse et mis en place par diverses paroisses, du 16e au 19e arrondissements de la capital. Les chaises sont disposées en rond dans une grande salle de N.-D.-de-Grâce de Passy (16e ). Une quarantaine de participants a répondu présent à l’invitation du conseil pastoral et du curé, le P. William-Jean de Vandière. Objectif : lancer les échanges proposés dans le cadre du synode des évêques sur la vie de l’Église et la synodalité, dont la première phase, diocésaine, a été lancée par le Vatican le 17 octobre 2021. Odile, la soixantaine, paroissienne de longue date, « l’attendait, ce rendez-vous. » Quels sujets souhaite t-elle aborder ? « Les questions de gouvernance, ce n’est pas mon truc, répond-elle. En revanche, ce que je perçois de cette proposition, c’est une nouvelle pratique de la parole échangée entre baptisés, y compris avec les plus pauvres, ceux que l’on entend le moins. »
À ses côtés, Caroline [1] ajoute : « Sur la place des femmes, il me semble que l’on peut progresser. Au-delà de leur engagement, reconnu, peut-on s’interroger sur leur parole, notamment lors des célébrations eucharistiques ? Nous savons bien que le fait de prêcher lors d’une messe relève de la fonction du prêtre de par notre ecclésiologie. Mais la question mérite d’être posée. C’est dommage de se priver de cette voix-là. » « De manière plus générale, comment mieux intégrer les laïcs aux instances de décision ?, s’interroge encore Caroline. Il ne s’agit pas tant de pouvoir ou de hiérarchie que de chercher des orientations communes. »

La réunion commence. « Comment se mettre en chemin ensemble ? », c’est la question clé, explique Laurent, membre du conseil pastoral. Il propose un objectif, à l’aide du guide Atelier synodal : écoute et parole du diocèse de Paris : créer des petits groupes de six à huit personnes qui plancheront, en se réunissant une ou deux fois, sur un point de la vie de l’Église et de son avenir. Les conclusions seront remontées ensuite sur le site dédié du diocèse de Paris, d’ici le dimanche des Rameaux (voir encadré). Sans oublier d’inviter, dans les échanges, des gens « plus éloignés », ou ces « voisins de messe » que l’on ne connaît pas toujours. « Comment célèbre-t-on notre foi dans l’Église, comment est-on coresponsables, quelle est notre rapport à l’autorité… ? », énumère, entre autres, le P. de Vandière, avant de proposer une prière commune à l’Esprit Saint pour confier leurs discussions. Puis, chacun se présente et donne son sentiment sur cet appel synodal.

Beaucoup le disent, cette démarche est aussi l’occasion de « mieux se connaître quand on ne fait que se croiser à la messe ». Jeune retraitée, bénévole en prison, Sylvia veut « participer à la vie de l’Église », touchée, en particulier, par la crise des abus sexuels. Sujet qui revient plusieurs fois dans les bouches ce soir-là. « Il faudrait rendre l’Église plus vivante dans ce monde moderne en crise, appelle de ses vœux une paroissienne. Nous avons un rôle à jouer pour des approches nouvelles. » « Vu de l’extérieur, est-ce que nos rites donnent envie ? » renchérit Béatrice*. « C’est bien que la parole se libère comme cela, c’est très agréable !, lâche sa voisine. « Mon job, est-ce de me satisfaire d’un certain confort spirituel ou de m’occuper des périphéries ? », s’interroge un autre. Très vite, des groupes se forment. Pour Marie, ce sera un groupe autour de la « place des pauvres », qui se réunira chez un paroissien âgé qui n’a pas pu être là ce soir-là. « On réfléchit à y intégrer un réfugié accueilli avec la paroisse, ajoute-t-elle.

Car l’enjeu, c’est justement de “faire ensemble” ». « Place des laïcs et coresponsabilité ! », appelle une femme en levant la main. « Place des femmes », propose Béatrice. Un homme évoque la transmission de la foi aux jeunes. D’autres préparent un groupe sur la question des divorcés remariés ou encore, sur le « lien avec les autres religions »… Le P. de Vandière note en aparté : « L’enjeu, c’est aussi la transmission de la foi aux nombreuses personnes dans notre société qui disent être catholiques mais qui ont abandonné la messe. Tout cela passe aussi par un changement de regards et de mentalités sur nos modes de fonctionnement ; par exemple, sur la responsabilité décisionnelle de laïcs, certes engagés, mais souvent trop dépendants de “monsieur le curé”, même involontairement ! »

Au diapason d’autres paroisses, les choses ont également été lancées à St-François-d’Assise (19e ). Au programme : proposer une « urne à questions » aux paroissiens, explique François-Régis, corespon sable de l’organisation des échanges synodaux à la paroisse. Après avoir récolté les demandes, des petits groupes se constitueront autour des thématiques relevées. « Le plus important n’est pas tellement la copie que nous allons rendre, observe ce dernier. Mais bien le processus, ce mouvement de tout le monde, l’écoute mutuelle, le fait de laisser circuler la parole. En espérant que cette expérience débouche sur quelque chose de plus permanent, une nouvelle façon d’être en rapport les uns et les autres. » « La démarche sera également vécue durant le Carême, renchérit le curé, le P. Édouard Ducamps, ce qui permettra aux groupes d’insister sur la prière. Mais aussi d’accueillir, dans le temps, de nouvelles personnes intéressées par la démarche. » Ce qu’il en espère ? « Un éveil de chacun à la mission, un encouragement à la créativité. »

Laurence Faure

« Étendre la synodalité à tous les baptisés »

Depuis le 17 octobre 2021, la démarche synodale sur la vie de l’Église et la synodalité a été lancée dans les diocèses. À Paris, l’atelier « Écoute et Parole » (téléchargeable sur synodeparis.fr) se déploie de plusieurs manières : assemblées paroissiales, petits groupes... Au terme de ces rencontres, une récolte des propositions se fait directement sur ce même site. Toutes les remontées sont attendues avant le dimanche des Rameaux, le 10 avril 2022. Avec toutes ces contributions, l’équipe en charge de la démarche synodale à Paris établira une synthèse qui sera publiée et envoyée avec celles des autres diocèses de France pour la suite du synode romain, et « constituera un outil de travail précieux pour la vie du diocèse », indique le P. Christophe Alizard, membre de l’équipe diocésaine pour ce synode. « Dans cette étape, il importe que la synodalité s’étende à tous les baptisés ainsi qu’à tous les hommes et femmes désireux de contribuer à cet élan, observe-t-il encore. L’objectif est de retrouver la joie de la fraternité baptismale intégrant nos différences ou désaccords. Parler, relire les choses ensemble, partager : c’est aussi l’encouragement reçu par notre administrateur apostolique, Mgr Georges Pontier, qui nous permettra d’ajuster notre fonctionnement ecclésial et d’être ainsi de meilleurs témoins du Christ. »

[1Le prénom a été modifié.

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Synode sur la vie de l’Église 2021-2022