Un colloque sur sainte Geneviève
Paris Notre-Dame du 1er octobre 2020
« Sainte Geneviève – Histoire et mémoire (420-2020) ». C’est ainsi que s’intitule le colloque scientifique organisé par le Collège des Bernardins du 18 au 20 novembre, en partenariat avec l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, avec la participation de la Sorbonne. Les explications de l’historienne Marie-Hélène Grintchenko, enseignante à la Faculté Notre-Dame et co-organisatrice.
Paris Notre-Dame – Quelle est la genèse de ce colloque ?
Marie-Hélène Grintchenko – L’idée est venue de Mgr Michel Aupetit, archevêque de Paris, qui envisageait déjà une Année sainte Geneviève lorsqu’il était évêque de Nanterre (Hauts-de- Seine) pour mieux connaître cette figure exceptionnelle. J’ai été contactée par Mgr Alexis Leproux, vicaire général, pour organiser un colloque scientifique dans une collaboration entre le Collège des Bernardins, où j’enseigne l’histoire de l’Église, et l’Académie des Inscriptions et des Belles-Lettres, représentée par l’historienne Nicole Bériou. Nous avons dressé un état de la recherche sur sainte Geneviève et, signe que la patronne de Paris est une figure qui rassemble, diverses institutions se sont rapidement agrégées à nous : Sorbonne Université, avec l’historien Martin Dumont, le comité d’histoire de la Ville de Paris et la bibliothèque Sainte-Geneviève (5e). Toute une pléiade d’historiens va pouvoir donner au public une synthèse passionnante de leurs travaux. Il faut ici rendre hommage au travail de fédération des chercheurs de la médiéviste Marie-Céline Isaïa.
P. N.-D. – Comment avez-vous construit le programme, quel en est l’enjeu ?
M.-H. G. – L’histoire de sainte Geneviève ne se limite pas aux faits et gestes de son existence, même si nous les honorerons à juste titre. Le programme se place dans la perspective du temps long. Pour mieux comprendre sa vie et son action, il importe de les resituer dans le contexte de l’Antiquité tardive avec un empire romain impacté par les grandes migrations, de mieux connaître les réseaux d’échanges commerciaux, de saisir les enjeux d’un christianisme en train de devenir un phénomène de masse. Il faut ensuite étudier comment, à travers les siècles, sa mémoire a été entretenue, comment elle a impacté la vie des croyants, les pratiques de dévotions et la création artistique, la vie intellectuelle et politique de notre pays, jusqu’au paysage urbain de Paris. Sainte Geneviève n’est pas seulement vivante dans la mémoire croyante : sa postérité est réelle et intéresse nos contemporains.
P. N.-D. – Que peut apporter cette recherche scientifique au diocèse, aux Parisiens ?
M.-H. G. – Contrairement à ce que certains craignent parfois, une approche historique, rigoureusement scientifique, ne s’oppose pas à l’approche croyante. Les saints ne sont pas des anges mais des personnes humaines, historiques. Mieux nous les connaissons, mieux nous pouvons mesurer ce que leur vie concrète laisse percevoir de l’amour de Dieu. Sainte Geneviève est une formidable figure de femme qui s’est impliquée au service de la cité comme dans la vie de l’Église. Son père était un Franc romanisé. De lui, elle avait hérité de riches domaines et d’une charge municipale qu’elle a occupée de manière courageuse. Elle ne fait pas que galvaniser le courage des Parisiens face aux Huns. Elle favorise l’intégration des peuples germaniques au milieu des gallo-romains, elle arme des bateaux pour aller chercher du blé sur ses propres terres, destiné aux populations affamées. Elle est un modèle pour tous. Ce colloque, en favorisant le travail collectif des chercheurs, peut faire avancer la connaissance historique actuelle. Comme croyante, j’espère également que sainte Geneviève suscite de nombreuses émules parmi les femmes, au service de la cité et de l’Église.
Propos recueillis par Laurence Faure @LauFaur
Sommaire
Consulter ce numéro
Acheter ce numéro 1 € en ligne sur les applications iOs et Android