Texte des Conférences de Carême 2011 : « Le rôle de la famille dans la vie de la cité : confiance ou contradiction ? » le 10 avril
Les sources de contradictions et d’insatisfactions entre personne, famille et société sont nombreuses, car leurs liens et leurs attentes réciproques, toujours aussi forts, restent à dépassionner. Cette situation est-elle irrémédiable ? Non ! Lieu premier de la relation interpersonnelle, la famille dispose de tous les atouts pour être à la hauteur de sa vocation sociale. Ainsi, après avoir éclairci les aspirations légitimes qui se font jour, nous proposerons des pistes concrètes pour que, dans toutes les familles, "batte le cœur de la société".
Dimanche 10 avril - Le rôle de la famille dans la vie de la cité : confiance ou contradiction ?
M. Jacques Arènes, psychanalyste – M. Antoine Renard, président des Associations Familiales Catholiques
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Arrêt de la retransmission en direct des conférences de Carême par France Culture, une tradition datant de 1946.
– Dimanche 13 mars dans l’après-midi, les auditeurs de France Culture n’ont pu entendre en direct la première des Conférences de Carême, depuis Notre-Dame de Paris. La station publique a fait savoir vendredi que les Conférences étaient désormais accessibles sur son site Internet et en différé sur les ondes à minuit.
– Lire le communiqué du diocèse de Paris à ce sujet le vendredi 11 mars..
– Lire la réaction du cardinal André Vingt-Trois (interview pour le journal La Croix)..
Lire ci-dessous le texte des conférences.
Reproduction papier ou numérique interdite.
Le texte des conférences sera publié chez Parole et Silence : sortie du livre le 17 avril 2011.
M. Jacques Arènes, psychanalyste
La famille, refuge narcissique ou espace de création du lien ?
La famille point obscur et valeur d’attente
La famille apparaît comme une valeur d’attente, mais aussi un point obscur du monde contemporain. Valeur d’attente, elle l’est, les enquêtes d’opinion l’indiquent [1], en raison de la promotion de l’intimité conjugale et familiale comme vecteur essentiel de l’épanouissement de l’individu, et même de sa protection contre les aléas de l’existence. Mais elle constitue aussi un point obscur de notre société, dans la mesure où elle intéresse trop souvent le monde commun seulement dans ses déficiences. Notre société se méfie des familles dites « pathogènes ». Elle songe à sanctionner les parents démissionnaires. Elle semble moins qu’avant donner droit au versant positif de l’espace familial qui est celui où le sujet naît à la relation en même temps qu’il naît à lui-même.
Une raison, parmi d’autres, de cette méfiance vis-à-vis de la famille tient au fait que celle-ci est l’enjeu de bien des conflits idéologiques. Nous n’osons pas mettre en valeur ce qui se passe dans la famille, ce qui émerge dans cette créativité familiale et engendre l’appétit d’être avec l’autre, avec les autres, parce que nous avons peur d’être obligés de choisir et de nous positionner vis-à-vis de conceptions différentes de la famille. D’un côté on verserait dans une forme de familialisme, consistant à encenser un type de famille que l’on défendrait ; d’un autre côté on considérerait la famille comme un laboratoire de changement social où toutes les nouveautés seraient bonnes à prendre. Cette tension liée à des enjeux politiques très réels, politiques puisqu’ils concernent la cité et ses lois, mais aussi à des enjeux anthropologiques et spirituels posés par la question familiale, empêchent de se pencher sereinement sur les ressources et la créativité familiale. Cette créativité pourrait pourtant être le dénominateur commun de bien des conceptions de la famille, dans notre culture hétérogène. Elle serait ainsi un point de départ, reconnu par beaucoup d’entre nous, pour tenter de fonder ou refonder le lien social.
La famille se situe ainsi au cœur de l’articulation subtile de l’intime et du social. Les psychologues, les psychanalystes analysent depuis longtemps comment l’histoire de chacun avec sa famille imprègne la personnalité, plus profondément que les habitudes éducatives, et la forme durablement. Mais elle n’est pas seulement le lieu où s’édifie le psychisme de chacun. Beaucoup s’accordent pour penser que ce qui se joue dans la famille introduit aussi à ce que Freud appelait « la culture » c’est- à-dire au dispositif complexe, et fragile, qui fait tenir les hommes entre eux [2]. L’autorité parentale par exemple, dont la nécessité et la portée est inscrite dans le code civil [3], n’est pas seulement une prérogative éducative, mais fait partie de ce qui articule le vécu familial avec les nécessités sociales. Elle représente en quelque sorte, au niveau familial, les attentes, les contraintes, mais aussi la richesse de la communauté humaine.
Avant d’imaginer plus avant ce qu’est, et ce que pourrait être la créativité familiale, et ses capacités d’ouverture au social, explorons la « tentation » inverse de la famille contemporaine, qui tient à sa « privatisation », voire à son repli sur soi.
La tentation du repli sur soi
Si la famille est en effet une valeur refuge, il convient de s’interroger sur la manière dont chacun perçoit ce refuge. Il semblerait que, ce que les psychanalystes appellent « l’investissement narcissique » de l’enfant par les parents devienne de plus en plus important. Selon Freud, la relation de type narcissique est bien paradoxale puisque, dans ce cas, on « aime dans l’autre ce que l’on est, ce que l’on a été soi-même ; ce que l’on voudrait être soi-même, la personne qui a été son propre soi. » Quand il veut donner un exemple d’une relation « d’objet » narcissique, Freud se décentre exceptionnellement du point de vue de l’enfant pour évoquer la relation sous l’angle des parents. Il existerait chez ces derniers « une compulsion à attribuer à l’enfant toutes les perfections […] et à cacher et à oublier tous ses défauts. » His Majesty the Baby, l’enfant merveilleux, celui qui accomplira nos rêves inaccomplis, nous permet de renouveler « à son sujet la revendication de privilèges depuis longtemps abandonnés [4] ». L’amour des parents pour leurs enfants ne serait autre que leur narcissisme renaissant. Ce moteur nécessaire de la parentalité, les parents ont toujours cherché, en quelque manière, à se prolonger à travers leurs enfants, semble devenir envahissant en notre époque de l’enfant désiré et programmé. En notre société, dans laquelle la pensée collective du futur est défaillante, et où nous redoutons que notre monde commun ne s’effondre en quelque catastrophe, la naissance d’un enfant devient souvent la seule possibilité pour les parents, possibilité hautement privée, d’imaginer et d’aimer le futur. Citons ce qu’écrivait déjà le philosophe Jean Lacroix à la fin des années 1940 : « il n’y a plus lieu de s’enorgueillir de ses ascendants mais de ses descendants, non pas de ce que l’on a reçu, mais de ce que l’on a créé ou plutôt de ce que l’on est à chaque instant capable de créer et de maintenir dans l’être [5] ». Ce désir d’avenir, indispensable à la vie humaine, se concentre aujourd’hui entièrement sur l’enfant. Cet énorme espoir porté par l’enfant se déploie souvent en opposition avec le monde extérieur perçu comme menaçant.
Cette « privatisation » de la famille se prolonge dans deux directions. Le lien avec ce qu’on appelle « la famille élargie » n’est pas rompu, mais il devient plus élastique, et disparate. Certaines familles, dites « nucléaires », vivent dans une réelle autarcie, les relations étant coupés, ou peu vivaces, avec les ascendants ou les collatéraux. Le terme de « parenté » est défini par la relation de consanguinité ou d’alliance qui unit des personnes entre elles. Dans les sociétés traditionnelles, les systèmes de parenté sont des ensembles de relations existantes entre parents et classes de parents d’une même famille, et qui décrivent les droits et obligations des membres de la famille. La parenté traditionnelle constituait une enveloppe invisible autour des personnes. Cette enveloppe était prescriptrice, voire parfois emprisonnante, mais elle s’avérait contenante. D’une certaine manière, on n’était jamais seul(e). « L’enveloppe » du groupe familial élargi se fait aujourd’hui beaucoup plus lâche. En bref, nous sommes plus libres et plus isolés. Moins enserré dans les contraintes, mais aussi dans la contenance de la parenté traditionnelle, le sujet postmoderne [6] peine à se reconnaître et à se maintenir dans les coordonnées familiales. Dans notre culture le lien est devenu « liquide », selon la formule du sociologue Zygmunt Bauman [7]. Il n’est jamais gagné, toujours fragile, et souvent remis en cause. La sociabilité amicale remplace, pour partie, le tissu serré de la famille d’autrefois, tout en présentant la caractéristique d’une grande inégalité entre nous tous. Certains sont doués pour « se faire » des amis. D’autres restent sur le bord de la route. Les parents, jaloux de leurs prérogatives, se veulent créateurs exclusifs de l’éducation de leurs enfants, et se méfient d’une transmission trop explicite venue des générations précédentes. Ce qui n’empêche pas qu’ils s’en plaignent parfois. Ils souhaitent des grands-parents, mais il faut que ceux-ci demeurent à leur place. Les parents tiennent, dans tous les cas, à contrôler la situation. Les grands-mères et les grands-pères reçoivent des listes précises de ce qu’ils doivent faire quand il reçoivent leurs petits enfants, devant se placer ainsi dans la position de prestataires de service, non appointés, sans avoir leur mot à dire s’ils souhaitent garder la relation avec l’enfant. L’étayage que la famille étendue apporte à l’éducation de l’enfant est désiré, mais fortement encadré. Le respect des idéaux et l’organisation des identifications portés par le groupe familial élargi fait plus souvent défaut, et ces aspects de l’éducation sont laissés au seul soin des parents. Notre culture n’a donc pas entraîné le déclin de la famille, mais celle-ci s’est rétrécie à une dimension minimale. Ces relations de parenté rétrécies sont alors moins « porteuses de liens serrés d’organisation sociale » soutenues par les communautés traditionnelles [8].
La deuxième direction de cette privatisation contemporaine de la famille concerne le rapport aux institutions. La famille fut longtemps considérée elle-même comme une institution, articulant les niveaux intime et social. L’utilisation de slogans familialistes – on songe à la devise « travail, famille, patrie » d’un régime honni – a rendu hautement suspecte la conception de la famille comme institution. Mais, si ce terme « d’institution » est peu employé pour la famille, il n’est pas, pour autant, inopérant. La famille est toujours une institution, même si elle est aujourd’hui une institution implicite. Elle demeure essentielle à la construction du sujet, autant dans l’ordre « vertical » – l’ordre des générations, la généalogie, étant souvent le seul vecteur du passé concrètement proposé aux jeunes - que dans le registre « horizontal » de l’intersubjectivité. Cette institution qui n’en est pas une, parce qu’elle n’en souhaite plus l’appellation, détient une position ambivalente envers d’autres institutions. D’une certaine manière, l’attente des parents vis-à-vis des institutions est forte, et remplace la contenance de la famille élargie. Mais, en même temps, ils se méfient de l’empiétement de ces mêmes institutions sur la liberté familiale.
Les parents attendent beaucoup de l’école comme lieu d’apprentissage des savoirs, mais aussi pour aider à l’éducation. Ils souhaitent des services de l’Etat, la justice par exemple, l’arbitrage des conflits conjugaux et parentaux. Mais, d’autre part, les institutions font l’objet d’une grande méfiance, et sont suspectées par les géniteurs de ne pas reconnaître l’originalité de leur rejeton. Notre culture de la « valeur » individu a du mal à reconnaître que le « tout » est plus que la sommation de ses parties [9]. Nous répugnons à nous effacer un tant soit peu devant l’intérêt collectif, et les contraintes institutionnelles nous paraissent exorbitantes. Combien de fois ai-je entendu la plainte concernant un bambin, forcément surdoué, que les enseignants n’auraient jamais compris. « Sa majesté le bébé », « sa majesté » l’enfant ou l’adolescent, représentants du narcissisme des parents, doivent être constamment reçus dans leur singularité exceptionnelle. L’éducation classique se devait d’introduire, parfois de force, le jeune dans son rôle futur de citoyen abstrait, souvent au détriment de ses désirs profonds. Aujourd’hui, le vœu de beaucoup de parents serait que leur enfant soit avant tout reconnu et trouve sa place, celle qui soit vraiment la sienne et pas une autre, au cœur d’une société qui l’aurait pensée pour lui.
Cette revendication de reconnaissance, si elle détient un fond tout à fait estimable, et trop négligé autrefois, dérive parfois vers une sorte d’isolement narcissique où la famille se perçoit comme assiégée. D’où malheureusement, dans notre paysage où le maillage traditionnel de la parenté est plus lâche, et où la solidarité éducative entre adultes d’une même génération n’est plus sans faille, un grand isolement des parents en cas de difficultés. Un aspect essentiel des interventions d’un médiateur externe – un psychologue ou un psychanalyste, par exemple - est justement d’aider la famille à, de nouveau, s’ouvrir à l’extérieur dans les périodes d’épreuve, et à retrouver son génie originel de lien entre l’intime et le social.
S’ouvrir de nouveau au social
Nous avons donc à mettre, ou remettre, en valeur cette institution qu’est la famille dans sa dimension politique, ou prépolitique, dans le sens sur lequel nous pouvons tous nous mettre d’accord, dans notre société contemporaine : la famille contribue à créer, ou à recréer, ce lien nécessaire entre les deux niveaux de l’intime et du social. La famille est ce groupe vivant, dans lequel les individus que nous sommes tous sont reconnus personnellement, aimés et accompagnés tout au long de leur vie. Ce groupe détient, même dans les situations complexes ou douloureuses – chômage, épreuves ou séparation -, une intelligence concrète pour inventer, parfois avec une aide extérieure, des solutions aux problèmes qui l’occupent, ainsi que chacun de ses membres.
Dans notre époque de crise économique, mais aussi morale, où beaucoup se lamentent, à juste titre, sur la fragilité du lien collectif, et sur la solitude d’une partie de nos concitoyens, il faudrait donc se pencher sur les ressources familiales comme protectrices de la désagrégation sociale. Nous le savons pour ce qui concerne la solidarité entre générations, agissant dans les deux sens dans les familles. Mais nous devons aussi demeurer attentifs à l’effet socialement protecteur des relations conjugales, et donc à la nécessité d’accompagner les parents se retrouvant isolés, la séparation pouvant entraîner, notamment dans les populations les plus défavorisées, la première étape d’une désaffiliation économique, sociale, et affective.
De quoi procède donc ce génie de la famille à « créer du social » ? Il s’appuie sur le réalisme de ce qui passe dans les familles. La famille n’est pas un espace irénique où chacun serait accueilli tel qu’il est, sans conflit ni tension. Les conflits sont partie intégrante de la dynamique familiale. L’ambivalence du fils vis-à-vis du père – de la fille vis-à-vis de la mère – ambivalence qui mêle rivalité et désir d’être aimé, constituent des réalités irréfragables. Mais, ces réalités sont dynamisantes. La tension, voire la lutte, entre parents et enfants, est le moteur de la transmission. Elle va de pair avec une reconnaissance de l’autre, jusque dans ses incompétences et ses défauts, qui n’existe nulle par ailleurs. Le génie de la famille est justement d’articuler la dynamique de conflictualité avec le vœu de reconnaissance. « La lutte y est transformée en reconnaissance mutuelle » affirmait Jean Lacroix [10].
La famille participe à la construction du monde commun, dans la mesure où elle articule au plus juste la tension, voire la compétition liée à la vie humaine – la rivalité fraternelle n’est jamais une sinécure -, à une reconnaissance toujours à construire, mais profondément ancrée dans la dynamique familiale. Il se passe beaucoup d’événements douloureux dans les familles. Il existe parfois des relations difficiles, et des rancunes tenaces. Mais ces événements, et ces relations complexes sont entraînés dans la dynamique de la vitalité humaine, dans le cadre de la sécurité d’un lien garanti, en tout cas entre parents et enfants. C’est en cela que la famille permet l’ouverture au fait social : la reconnaissance de la singularité de chacun permet d’y résoudre les conflits, mais aussi de les assumer. D’une manière plus profonde, la conflictualité familiale ne peut être complètement « résolue » que dans la mesure où le jeune se mesure et se frotte au fait social. Cette confrontation de l’adolescent et du jeune adulte au monde social, la famille doit évidemment être en capacité de l’accompagner, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas. La montée inquiétante de la délinquance des mineurs en est un indice [11]. L’enfant a sa place dans la famille, mais il ne trouvera sa vraie place, celle de bâtisseur de son propre espace de travail et de sa sphère affective qu’en quittant sa famille d’origine. Chacun est reconnu dans la famille, mais sa place n’y est jamais figée. Le jeune se doit, ainsi qu’Abraham, d’aller ailleurs pour fonder sa propre lignée. Ce mouvement d’extériorisation de la famille est au fondement même du fait social. Prendre appui sur une reconnaissance fondamentale, sur la sécurité d’être aimé en dépit de ce qui pourrait abimer la relation, et aller « planter sa tente » ailleurs est la tâche de tout jeune entrant dans la vie d’adulte. Ce mouvement constitue le point originaire de la constitution des alliances. Il engendre la dynamique d’impulsion du devenir social. La famille n’est plus alors le refuge de toutes les angoisses, mais le foyer énergétique du social se créant et se recréant sans cesse. Dans la Grèce antique, à l’époque archaïque, chaque personne était rattachée à un oikos (du grec ancien οiκος, « maison »), un ensemble de biens et d’hommes, une maisonnée. J’aime ce mot d’Oikos, même s’il correspond à une époque révolue où les places de chacun demeuraient figées. J’aime ce mot parce qu’il serait nécessaire de retrouver cette figure d’une famille participant à une maison commune qui ne serait pas celle d’une parenté étroite, mais de tous les adultes, dans la famille élargie, mais aussi dans les institutions qui entourent une famille donnée. Plus largement encore, l’Oikos doit s’ouvrir à la cité dans son ensemble, où la forme familiale qu’est la fraternité prend alors un sens plus abstrait, mais tout autant nécessaire. La fraternité citoyenne n’est pas plus irénique que la fraternité de la famille concrète. Elle se construit sur un fond de rivalité et de haine possible. La vie sociale n’est pas une abstraction. Le lien que l’on y expérimente s’appuie sur nos liens les plus personnels. Le philosophe Axel Honneth affirme que la notion d’un « autrui généralisé », qui consiste dans le fait de percevoir l’autre, même inconnu, comme porteur de droits au même titre que soi, suppose un haut degré d’élaboration [12]. Mais, cette notion très élaborée se construit à partir du plus familier et du plus intime. C’est dans l’intersubjectivité primaire, dans la relation de chacun avec sa famille, que s’édifie ce qui permettra la reconnaissance d’un « autrui » anonyme. C’est dans la tension, déjà entre l’enfant et sa mère, entre un vœu d’indépendance et un désir de symbiose, que s’érige pour les nouveaux venus dans le monde l’assise nécessaire à tout engagement et tout lien ultérieur.
La famille ouverte, ce serait la nôtre, celle de nous tous, adultes nécessairement issus d’une famille, que nous soyons célibataires ou ayant créé une famille. Nous avons tous connus, dans nos familles d’origine, cette condition originaire de fils et de filles, condition ambivalente mais énergétique qui nous propulsa, sans nécessairement perdre le lien, en d’autres lieux. La « famille humaine », ce corps social qui est le nôtre n’est pas seulement soudé par quelque contrat théorique renouvelé au moment où le jeune entre dans sa majorité. Elle est constituée, d’une manière originaire, de nous tous, fils et filles de nos familles d’origine, et en charge des enfants, pas seulement les nôtres, présents et à venir. Nous savons que tel enfant, dans telle famille, est bien sous l’autorité et la bienveillance de ses parents. Mais nous pressentons aussi qu’il est d’emblée ouvert, par son désir et celui de ses géniteurs, aux alliances extérieures et à au corps social où il creusera son espace de désir et de vie.
M. Antoine Renard, président des Associations Familiales Catholiques
« La famille cœur battant de la société »
Cellule fondamentale de la société, comme l’affirme encore la Charte Sociale Européenne, la famille est une institution antérieure à toutes les autres formes d’organisation sociale.
Lieu d’accueil de la vie, lieu des premiers pas dans la vie, elle est avec la jeunesse au centre de l’engagement de toute société pour l’avenir.
Premier lieu d’apprentissage de l’Amour, amour que l’on ressent, que l’on reçoit puis que l’on donne, amour qui nous apprend à vouloir et faire le bien de l’autre, la vie en famille nous enseigne la responsabilité que nous avons de celui ou celle qui nous apprivoise. Parce qu’elle est cette école de l’Amour, la famille est « le cœur battant de la société ».
La famille est en crise, Benoît XVI l’a dit explicitement ; la société aussi, tout le monde le voit. Peut-on trouver des remèdes à ces maux qui créent de la souffrance et freinent nos élans personnels et collectifs ? Que peut faire la société pour qu’elles jouent leur rôle dans la poursuite de l’aventure humaine et apportent leur contribution au bien commun ? Que peuvent faire les familles pour que la société trouve des raisons nouvelles de justifier la confiance dont leur vie a besoin ?
Telles sont les questions auxquelles cette réflexion va tenter de répondre, en partant de l’observation de quelques faits.
Tous les sondages l’attestent : la réussite de sa vie de famille est le vœu le plus cher, pas seulement des Français ou des Européens, mais de tous les jeunes, y compris dans les pays où on ne mange pas à sa faim. Ceci nous dit quelque chose de ce qui est au cœur de l’homme. Dans son aspiration légitime au bonheur, chacun y voit un avenir ouvert, une qualité de vie. Tous nous souhaitons « réussir » notre vie de couple d’abord, « accomplir » parfaitement notre mission de parent ensuite. Chacun entrevoit dans la vie de famille le creuset du bonheur et un accomplissement possible ; il y consacre un investissement initial fort et en exprime des attentes tout aussi fortes.
Mais, c’est le deuxième fait, les mariages de raison ou facilités voire arrangés entre familles ont vécu. Les liens familiaux sont désormais marqués par une valorisation du sentiment, une exigence et une quête d’authenticité, éléments qui colorent toute la vie des familles. Cette dimension se trouve par ailleurs légitimée par les sources de tension pesant sur les personnes et les familles, particulièrement dans les périodes de crise désormais récurrentes, où le sentiment est tellement absent et son espoir toujours frustré puisqu’il se heurte à la froideur de la logique : chômage, avenir incertain, difficulté à éduquer les enfants…
Or, troisième fait, dans le même temps, l’Etat, progressivement contesté dans son rôle d’autorité, a été conduit à asseoir sa légitimité, certes sur la démocratie et donc l’intérêt général, mais surtout sur sa capacité à établir un Etat de droit. Et c’est là que commencent le divorce ou la contradiction entre la famille et la société, puisque l’Etat ne sait pas établir un droit autrement que sur des réalités objectives ; il ne saurait le faire sur des réalités subjectives, et donc évidemment pas sur le sentiment. Il ne se sent pas autorisé à intervenir dans les affaires de sentiment, sauf si leur excès vient à troubler l’ordre public. Il est ainsi inexorablement conduit à reléguer les sentiments personnels dans ce qu’il est convenu d’appeler la sphère privée, y compris l’union des personnes, et la famille n’est alors plus comprise comme cellule de base de la société, mais comme cellule tout court sans lien structurel avec cette dernière, dès lors qu’elle-même revendique pour sa constitution la primauté du sentiment.
Enfin, quatrième fait, en tout cas pour nos pays d’Europe occidentale, l’exceptionnel développement économique des dernières décennies a produit des écarts de revenus considérables et croissants. Les pouvoirs publics ont été conduits à concentrer leur attention sur les situations de marginalisation ou d’exclusion et à mettre en œuvre une politique d’accompagnement social et d’assistance sans précédent. Dans une vision optimiste, on pourrait penser que, devant la montée des revendications individuelles, l’Etat a d’abord fait implicitement confiance aux familles, négligeant de plus en plus de leur exprimer cette confiance. Or, faute de confiance, rien ne peut tenir.
Face à ces constats, il ne s’agit pas de restaurer un ordre ancien, mais de trouver les fondements d’une coopération renouvelée entre famille et société, coopération ou complicité dont l’une et l’autre ont besoin pour permettre l’épanouissement des personnes dans le cadre d’enjeux collectifs. Trois domaines apparaissent essentiels : le couple, l’éducation, la solidarité. Essayons de voir pour chacun d’eux ce qui pourrait être fait.
Le couple.
L’attention est aujourd’hui trop centrée sur la relation entre le parent et l’enfant. Il y a urgence à s’intéresser au couple car c’est lui qui crée la famille ; les couples sans enfant sont aussi des familles.
Qui dirait que le sentiment n’est pas fondateur et essentiel à la rencontre ? Mais la vie émousse les sentiments. C’est d’abord la mission de chacun de prendre soin de son couple, et sans rien perdre de l’émerveillement des premiers sentiments, celui d’Adam, de le transformer en amour vrai et durable. C’est l’aventure de toute une vie, la vie qui est, comme le disait l’Abbé Pierre, « un peu de temps donné à ta liberté pour apprendre à aimer ». Apprendre à aimer n’est pas toujours simple ; entendons le Christ : « Voici mon commandement – ce n’est pas un petit conseil en passant – aimez-vous les uns les autres » et il ajoute « comme je vous ai aimés » ce qui situe l’amour humain à une certaine altitude, celle du don, et du pardon, au-delà du don.
De nombreuses associations peuvent aujourd’hui aider les couples dans cet apprentissage continu de l’amour : pas plus que l’homme, il n’est bon que les couples soient seuls.
Enfin, puisqu’on nous répète qu’un couple sur deux divorce, il serait bon que l’autre s’exprime et témoigne.
Les pouvoirs publics doivent d’abord accepter d’analyser objectivement les coûts pour la société des situations d’échec et de non-mariage ; coûts économique, social, culturel, et aussi spirituel.
La double urgence de la démographie et de l’éducation doivent ensuite les conduire à conforter le mariage en le distinguant clairement des autres formes d’union. En entretenant le flou, l’Etat omet les bienfaits sociaux de la famille fondée sur le mariage et finit par réduire celui-ci à un simple contrat, voire à la meilleure garantie d’un divorce réussi. Faute de savoir articuler le subjectif à des dimensions objectives (caractère public de l’engagement, devoir d’assistance…), il laisse à d’autres – à l’Eglise en particulier – le soin de reconnaître et accompagner des aspects plus personnels forgés par la relation nouée entre l’homme et la femme.
Enfin, les pouvoirs publics devraient aider à la découverte de la dimension sociale du mariage par la généralisation, à la suite d’initiatives existantes, d’une préparation au mariage civil. La lecture des articles du Code Civil, si justes et bien rédigés soient-ils, ne suffit pas à comprendre que le mariage n’est pas l’aboutissement des sentiments rendus publics, qu’on ne se marie pas parce qu’on s’aime, mais qu’on se marie pour s’aimer.
L’éducation.
Les familles doivent réinvestir ce champ de responsabilité. Nous sommes les meilleurs parents de nos enfants, ayant pour eux un amour fondateur de relations. La famille est le lieu de la grammaire, où l’on apprend à dire « je », « tu », « nous ». Rien n’est plus éducatif, au sens de la découverte de son identité personnelle et du développement de ses qualités, que de vivre dans une fratrie entre deux parents qui s’aiment.
Mais, la famille, ne pouvant pas tout, s’est laissée déposséder et on lui en fait grief. Or les familles ne sont pas démobilisées, elles sont désemparées ; chaque famille doit se ré-emparer du sujet, dans une pleine conscience de ses capacités. Elle doit notamment choisir les autres acteurs, écoles, mouvements… qui influencent le développement des enfants et veiller à leur complémentarité, en discernant ce qui convient à chacun.
Les familles peuvent s’entraider : le succès des Chantiers-Éducation proposés par les AFC confirme le besoin d’écoute et de partage.
Deux sujets majeurs émergent à notre époque de grande confusion et de développement envahissant des médias qui véhiculent tant de conceptions erronées : la liberté, qui devient un piège quand on n’a pas les moyens d’en faire bon usage, l’éducation affective et sexuelle, sujet délicat parce qu’il touche à l’intime et qui ne saurait sans grave dommage être réduit à des exposés techniques.
Les pouvoirs publics doivent exprimer cette primauté en favorisant l’association des parents aux actes éducatifs, en distinguant les missions d’instruction et de transmission des savoirs, attribuées à l’école, de celles d’éducation personnelle et générale qui, sous la responsabilité des familles, concernent une multiplicité d’acteurs. Certes, il est bon qu’un ministère soit chargé de l’éducation en général, tant le problème est devenu crucial ; il est même très bon qu’il englobe enfin le thème de la jeunesse, mais il ne saurait être le domaine réservé du corps enseignant, quelles que soient par ailleurs ses mérites et ses compétences.
A des parents qu’on accuse volontiers d’avoir démissionné, l’Etat doit affirmer clairement qu’ils doivent se sentir re-missionnés, et que toute mission éducative confiée à quelque acteur que ce soit ne l’est qu’au nom des familles et sous leur autorité.
La solidarité.
Il s’agit là d’élargir la famille nucléaire à ses proches : solidarités verticale entre générations et horizontale des familles entre familles.
Dans Familiaris Consortio (FC), Jean-Paul II expliquait que, « la famille possède et irradie encore aujourd’hui des énergies extraordinaires capables d’arracher l’homme à l’anonymat, de l’éveiller à la conscience de sa dignité personnelle, de le revêtir d’une profonde humanité et de l’introduire activement avec son unicité et sa singularité dans le tissu de la société » (43). Le cœur de cette contribution originale se situe dans « l’expérience même de communion et de participation qui doit caractériser la vie quotidienne de la famille [qui] constitue son apport essentiel et fondamental à la société » (FC, 43).
Le rôle de l’Etat s’exerce ici au travers de ce qu’il est convenu d’appeler la politique familiale. Des débats récents montrent bien son essoufflement. Sa complexité est devenue telle que ses objectifs ne sont plus visibles, que même son utilité est mise en cause et que, dans la recherche compréhensible d’économies, elle est souvent la première menacée.
Quelques principes simples doivent être mis en avant dans un essai de rénovation.
La société a besoin de la famille et doit la concevoir non pas comme un ensemble d’individus à assister dans leurs besoins mais comme une richesse nécessaire, un sujet communautaire doué d’importantes missions sociales.
Les familles ont besoin de la société et doivent avoir les moyens de remplir leur rôle. Elles n’ont pas besoin d’être administrées, mais soutenues, confortées, encouragées. C’est à l’Etat de veiller aux conditions de leur autonomie et de leur développement, pour le bien de toute la société.
Chaque famille doit pouvoir percevoir des revenus dignes par le travail de ses membres, l’allocation ne venant qu’ensuite. Il n’est pas juste que les parents aient à subir un appauvrissement parce qu’ils élèvent leurs enfants ; des mesures fiscales appropriées doivent l’éviter.
Il convient de lever les freins qui pèsent sur les choix des familles (accueil d’un enfant, choix d’un établissement scolaire…) et de réduire la primauté du travail sur les personnes en introduisant des formes de conciliation.
La politique familiale doit enfin concourir à éviter les divorces : investir pour les familles aujourd’hui réduira les dépenses sociales de demain.
En somme, fondée sur l’amour entretenu des époux, première responsable de l’éducation de ses enfants, ouverte à la solidarité, la famille est la plus précieuse des ONG ; responsable d’organiser notre vie sociale, la société peut apporter aux familles la sécurité et le soutien que mérite leur marche quotidienne dans un monde complexe et changeant, non sans dangers.
Pour faciliter la nécessaire réduction des contradictions et le renouvellement de la confiance entre familles et société, nous pouvons encore renforcer l’articulation de leurs actions par le biais des corps intermédiaires.
De ce point de vue, notre pays est privilégié, il est utile d’y insister. A la Libération, le général de Gaulle a voulu donner un rôle institutionnel à ceux qui pouvaient représenter les Français dans les deux dimensions essentielles de leur vie quotidienne : le travail et la famille. Ainsi est née, aux côtés des syndicats dits représentatifs, l’Union Nationale des Associations Familiales (UNAF) qui, regroupant des associations existantes, s’est vue dotée par la loi d’un pouvoir institutionnel de représentation de toutes les familles. L’UNAF est ainsi en tant que telle obligatoirement consultée par le Gouvernement et le Parlement sur les initiatives qui touchent la vie des familles.
Si l’action locale d’entraide et de services aux familles a toujours été le fait de nombreux acteurs soutenus par les bénéficiaires, cette action politique nationale, peut-être moins connue, est longtemps restée le fait de spécialistes dont la loi garantissait la représentativité.
Dans un monde où le débat est plus ouvert et où il n’est plus suffisant d’être compétent ou pertinent pour être entendu, il devient nécessaire d’asseoir le pouvoir de parole des interlocuteurs non plus seulement sur la garantie de la loi, mais sur une représentativité réelle beaucoup plus vaste, attestée par les chiffres. Les associations familiales ont plus que jamais besoin du soutien effectif et réel des familles, au nom desquelles elles ont le droit et le devoir de s’exprimer.
Nous pouvons à ce sujet entendre cet appel pressent du Cardinal Antonelli, Président du Conseil Pontifical pour la Famille, à Mexico en 2009 : « il faut que les familles adhèrent en masse aux associations familiales ». Il y a là un moyen sûr pour « qu’elles assument la responsabilité de transformer la société » (FC, 44).
De nombreuses échéances nous incitent à trouver les chemins d’une coopération renouvelée entre les familles et l’Etat, d’une confiance rétablie entre les familles et la société.
De nombreux outils, existent déjà ; peut-être en faudra-t-il de nouveaux, mais déjà nous pouvons porter sur ceux-là un regard nouveau, un esprit nouveau, et laisser chacune de nos vies être envahie par l’esprit d’amour pour faire de nos familles, comme le dit Jean Vannier, ce lieu de pardon et de fête, qui a vocation à la contagion.
Alors nous pourrons contribuer à bâtir la civilisation de l’amour à laquelle nous aspirons tous.
Revêtir l’homme nouveau, c’est aussi le sens du carême.
Biographie de M. Jacques Arènes.
Après avoir suivi un double cursus en mathématiques appliquées et psychologie clinique à l’Université Paris VII - Denis Diderot, et à l’Université Paris VI - Pierre et Marie Curie, Jacques Arènes a entamé une carrière de psychologue clinicien et psychanalyste. Psychologue et psychanalyste, il est aujourd’hui également co-directeur du département « sociétés humaines et responsabilité éducative » au Collège des Bernardins, et maître de conférences à l’Institut Catholique de Lille. Ses travaux de recherche s’articulent principalement autour de la psychopathologie et psychothérapie de l’adolescent et du jeune adulte et de la psychologie et anthropologie du fait religieux. Outre sa fréquente participation à des colloques et séminaires de recherche, la rédaction d’ouvrages scientifiques, et ses nombreuses contributions à la revue « Etudes » dont il est membre du comité de rédaction, Jacques Arènes est également l’auteur d’ouvrages grand public comme Y-a-t-il un père à la maison (Fleurus ; 1997) ou encore Au secours, mes parents divorcent (Fleurus ; 2003).
Biographie de M. Antoine Renard
Marié et père de trois enfants, Antoine Renard est président de la Confédération Nationale des Associations Familiales Catholiques (CNAFC) depuis 2007. Après avoir notamment assuré la direction d’une fonderie dans le nord de la France, il travaille actuellement dans un groupe international fabriquant du matériel ferroviaire. Il a été commissaire général, puis président des Scouts Unitaires de France (SUF).
[1] En particulier l’European Values Study, enquête européenne pour laquelle la famille demeure au sommet des valeurs des français, suivie du travail, tandis que la religion et la politique sont les moins souvent citées comme très importantes. Ces résultats soulignent la « privatisation » de la famille, que nous allons analyser. Cf Pierre Bréchon, Olivier Galland, L’individualisation des valeurs, Paris Armand Collin, 2010.
[2] Sigmund Freud, Malaise dans la culture, Œuvres complètes, t. XVIII, Paris, PUF, 1994 (1930).
[3] Article 371-1 du code civil : « L’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. Elle appartient aux père et mère jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne. »
[4] Sigmund Freud, « Pour introduire le narcissisme », in La vie sexuelle, trad. fr. D. Berger, J. Laplanche et al., Paris, PUF, 1969 (1914).
[5] Jean Lacroix, Forces et faiblesses de la famille, Paris, Ed. du Seuil, 1948, p. 37.
[6] Nous utilisons, par commodité, ce terme controversé de « postmodernité » qui désigne un temps après la modernité. Au niveau historique, la postmodernité est caractérisée par un « présentisme » se méfiant de la référence à la tradition (intérêt pour le passé), ou au progrès (intérêt pour le futur). La postmodernité est fondée sur le doute, sur la référence accentuée aux sous-cultures, et à l’éthique personnelle, plus qu’aux propositions collectives de sens. (Cf. Yves Bonny, Michel Freitag, L’oubli de la société, Québec, Presse Universitaires de Laval, 2002).
[7] Zygmunt Bauman, L’amour liquide. De la fragilité du lien entre les hommes, trad. C. Rosson, Chambon, Ed. Le Rouergue, 2004.
[8] Antony Giddens, Les conséquences de la modernité, trad. O. Meyer, Paris, L’Harmattan, 1994 (1990), p. 115.
[9] Louis Dumont, « La valeur chez les modernes et chez les autres » (1980), Essais sur l’individualisme. Une perspective anthropologique sur l’idéologie moderne, Ed. du Seuil, coll. « Points/essais », 1983, p. 254-299.
[10] Op. cit., p. 58.
[11] Notamment pour ce qui concerne les actes de violence. Voir les chiffres sur le site du ministère de la justice.
[12] Axel Honneth, La lutte pour la reconnaissance, Traduit de l’allemand par Pierre Rusch, Paris, Cerf, 2007, p. 133.