La foi au service de la raison

Paris Notre-Dame du 24 janvier 2013

Le P. Frédéric Louzeau préside la Faculté Notre-Dame au Collège des Bernardins. Il est membre ordinaire de l’Académie pontificale de théologie à Rome.
© Pierre-Louis Lensel

PN.-D. - La raison peut-elle aboutir à la foi ?

P. Frédéric Louzeau – Toute seule, la raison ne peut aboutir à la foi. Pour ce faire, elle doit s’ouvrir à l’Évangile. Seulement, la raison est le chemin qui prépare l’adhésion au Christ. Lorsque Jésus pose la question « que cherchez-vous ? » à ceux qui veulent devenir ses disciples (Jn 1, 38), il leur demande de réfléchir avant de s’engager. La foi n’est pas une réponse sur un coup de tête. Elle exige une adhésion libre de l’intelligence à la Révélation. Il faut deux ans de formation pour un catéchumène avant de recevoir le baptême ! Nous avons tendance, aujourd’hui, à mettre en avant la dimension affective de la foi. L’attachement du cœur est un grand aspect de la foi, mais la raison doit le discerner et même le purifier. Il a fallu une longue pédagogie divine dans l’Ancien Testament pour préparer les hommes à la venue du Messie. La difficulté de nos contemporains à s’interroger sur le sens de leur existence ne les prépare pas à accueillir le Christ. C’est pourquoi, un des aspects majeurs de la nouvelle évangélisation est d’aider l’homme à réfléchir, notamment sur sa propre énigme.

P. N.-D. - Quelle est la place de la foi dans un débat de société ?

P. F. L. – En théorie, la raison seule peut répondre aux questions sociales que se posent les hommes. En pratique, la raison s’enferme généralement dans un domaine de validité tellement restreint, le plus souvent scientifique ou technique, que les problématiques sociales toujours complexes ne peuvent trouver leur solution. Par exemple, la question du « mariage pour tous » ne peut pas seulement être envisagée sous l’angle du droit des personnes homosexuelles. La foi pousse l’homme à appréhender les réalités de manière la plus large possible et à chercher une synthèse harmonieuse. Sans donner de solution immédiate, elle encourage l’humanité à réfléchir dans toutes les dimensions de sa raison et ainsi à ne jamais renoncer à sa dignité.

P. N.-D. - Pourquoi Benoît XVI insiste-il autant sur le dialogue entre la foi et la raison ?

P. F. L. – La foi et la raison sont étroitement liées : elles grandissent ou s’effritent ensemble. En Europe occidentale, nous assistons à leur effondrement simultané. Or, la nouvelle évangélisation ne portera de fruits durables que si les hommes ne renoncent pas à leur dignité rationnelle. L’irrationalisme conduit aux rapports de force entre les individus et les éloignent du Christ. Lorsque le pape martèle la nécessité de concilier foi et raison, il le fait à la fois pour préserver la société de sa violence et lui offrir l’Évangile du salut. Le rôle du Collège des Bernardins est d’aider ceux qui le désirent à réfléchir sur l’avenir de l’homme et à dialoguer avec la sagesse chrétienne. Dans tout ce que nous faisons ici, de la théologie aux débats de société, l’articulation de la foi et de la raison est essentielle. • Propos recueillis par Agnès de Rivière

Retrouvez le programme du Collège des Bernardins sur www.collegedesbernardins.fr

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