De la publicité et des églises
Paris Notre-Dame du 13 janvier 2022
Des bâches publicitaires sont régulièrement accrochées sur les échafaudages extérieurs des églises, permettant le financement de travaux de restauration menés par la Ville de Paris. Comment fonctionne ce procédé en lien avec les paroisses et le diocèse ? Quelques échos du terrain.
« En ce moment, ce sont des téléphones », décrit le P. Denis Branchu, curé de St-Pierre de Montrouge (14e), au sujet des bâches publicitaires installées sur les échafaudages de son église, en travaux depuis janvier 2020. La Ville de Paris, propriétaire des murs de cet édifice datant de la fin du XIXe s., mène la réfection du clocher, à la suite d’une première campagne arrêtée temporairement faute de budget. Depuis 2020, la Ville a relancé la phase finale qui « permet de reconstruire à l’identique notre clocher, avec des pierres de très bonne qualité, s’enthousiasme le P. Branchu. Après le sommet, les experts ont constaté que la partie médiane du clocher avait également besoin de travaux. Ils ont donc enchaîné et nous aurons un joli clocher tout neuf en mai prochain. » Un budget de taille, en partie financé par les bâches publicitaires largement visibles des passants et des voitures autour de la place d’Alésia et depuis la porte d’Orléans. « Les revenus de ces publicités, reçus par la Ville de Paris, sont entièrement affectés aux travaux concernés, poursuit le curé. Comme affectataire, la paroisse en accepte le principe tout en ayant un droit de regard et de veto sur le sujet, pour éviter des images inappropriées. Ici, je n’ai jamais eu à refuser de projet, même si cela m’était arrivé à St-Augustin (8e). » Que répond-il aux critiques occasionnelles ? « J’explique toujours qu’il s’agit avant tout de rénovations déterminantes qui nécessitent des ressources importantes, explique le curé. Depuis le XXe siècle, pourquoi voit-on autant de travaux dans nos églises ? Elles s’abîment et ont été peu entretenues. Certaines sont en péril. Si ces publicités permettent d’éviter qu’elles s’écroulent, tant mieux. Quant aux sujets des publicités, temporaires, car elles changent tous les deux ou trois mois, nous exerçons notre droit de veto si le sujet est offensant ou contraire aux mœurs. »
Diminuer le coût de financement
« Une rénovation peut aller jusqu’à vingt ou vingt-cinq millions d’euros, abonde Jean Chausse, économe diocésain. Si la Ville, en tant que propriétaire, souhaite valoriser les échafaudages par des bâches publicitaires qui permettent de diminuer le coût du financement, en tant qu’affectataire, il est normal que l’Église ait un droit de regard. Une convention entre le diocèse et la Ville de Paris permet à chaque fois un circuit entre les différents acteurs pour valider les projets, en lien également avec le maire de l’arrondissement. Ces sources de revenus complémentaires, si elles ne sont pas profondément choquantes, sont un bon moyen d’entretenir nos édifices plutôt que de les voir se délabrer. Cela rejoint un peu la tradition du mécénat qui a toujours eu cours dans l’histoire de l’Église. » Outre la Ville de Paris, des fondations, comme la Fondation Avenir du Patrimoine à Paris sous l’égide de la Fondation Notre Dame, financent certaines rénovations de patrimoine chrétien à Paris. À La Madeleine (8e), une publicité d’une marque de luxe offre actuellement aux regards « un désert, calme et beau », dépeint son curé, le P. Bruno Horaist. Il s’agit de la réfection de la façade de l’édifice du XIXe siècle que l’on voit depuis la rue Royale, comprenant les escaliers monumentaux et le pronaos (vestibule), bardés d’échafaudage bâchés depuis septembre 2021 jusqu’en 2023. « La concertation avec la Ville de Paris pour les projets de publicités se fait toujours en bonne intelligence », note le curé. Et de constater que grâce à ce procédé, la corniche de la façade Est, est désormais rénovée : « Elle partait en ruine ».
Laurence Faure @LauFaur
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