Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Messe de bénédiction des huit nouvelles cloches de Notre-Dame de Paris – Jubilé des enfants du catéchisme
Samedi 2 février 2013 - Cathédrale Notre-Dame
À travers la présentation que Marie fait de Jésus au Temple, Siméon discerne le Messie, le Fils de Dieu envoyé pour apporter la lumière de Dieu à toutes les nations. Nous sommes dépositaires de cette lumière. Les cloches de nos églises sont là pour nous rappeler l’existence de cette lumière.
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– Présentation du Seigneur au Temple
– Is 40, 3-5.9-11 ; Ps 22 ; Lc 2, 22-40
Chers jeunes amis,
Vous qui êtes venus de beaucoup de paroisses de Paris, chaque semaine, vous allez au catéchisme pour apprendre à connaître qui est Jésus. Et comme nous le dit l’Évangile de Jésus, je pense qu’en apprenant à le connaître, vous aussi, vous grandissez en grâce et en sagesse. Connaître Jésus, c’est bien souvent à travers l’Évangile, apprendre ce qu’il a fait et ce qu’il a dit.
Aujourd’hui, nous découvrons comment Marie et Joseph sont venus au Temple pour présenter cet enfant à Dieu comme le faisaient tous les juifs. Et celui qui n’aurait pas eu d’autre renseignement, n’aurait rien vu d’extraordinaire en cette demande de Marie et de Joseph. D’une certaine façon, l’histoire de Jésus pourrait être l’histoire d’un enfant et d’un homme ordinaire.
Mais connaître Jésus, ce n’est pas seulement connaître cette histoire d’un être ordinaire, c’est connaître quelque chose qui ne se voit pas et n’est pas perçu par les mots. Ce qui ne se voit pas, c’est ce que voient Siméon et la prophétesse Anne. Tous dans le Temple voient un enfant ordinaire, comme vos camarades de classe voient en vous des enfants ordinaires ! Vous êtes comme tout le monde ! Mais il y a quelque chose qui habite en vous et qui ne se voit pas. Ce que le vieillard Siméon voit dans l’enfant présenté au Temple, c’est le Messie, le Fils de Dieu envoyé pour apporter la lumière de Dieu au monde à toutes les nations. Et bien sûr, cela ne se voit pas dans cet enfant de quarante jours ! Il faut un œil de prophète pour le voir ! Quand vous lisez l’histoire de Jésus, ce n’est pas simplement une histoire du temps passé qui ne dit rien pour aujourd’hui. C’est une histoire qui nous dit que la lumière de Dieu est venue pour tous les hommes. Et aller au catéchisme, ce n’est pas simplement apprendre l’histoire de Jésus, c’est apprendre à découvrir cette lumière que Dieu nous envoie à travers les actes et les paroles du Christ. Ainsi, vous devenez vraiment des chrétiens, des disciples de Jésus. Vous recevez sa parole, pas simplement comme une histoire, mais comme une lumière pour éclairer votre vie, pour vous montrer les chemins du bonheur et dans quelle direction il faut aller pour grandir en grâce et en sagesse.
Cette lumière, vous la recevez, semaine après semaine, mais plus encore, jour après jour quand vous prenez l’Évangile et que vous lisez la parole de Jésus. C’est une lumière qui vous est donnée. Cette lumière, il ne faut pas qu’elle disparaisse. Il ne faut pas que vous la perdiez. Il faut au contraire que vous la gardiez vivante et présente dans votre cœur. Mais comme vous le savez, dans l’histoire d’une vie, il y a des épisodes différents. À certains moments, la mémoire peut fléchir ou s’obscurcir. Vous voyez autour de vous des gens qui, par ailleurs très gentils, ont oublié qu’ils avaient reçu la lumière du Christ. Il y a un trou dans leur mémoire. Ils ne savent plus où est la lumière. Alors ils avancent comme des aveugles dans un tunnel, ils vivent n’importe comment et se cognent contre les murs. Il faut donc que de temps en temps, ils entendent à nouveau que cette lumière existe. C’est pourquoi Dieu envoie son prophète pour appeler Israël à être une voix qui crie, pour réveiller les mémoires.
Dans notre vie, il y a des signes pour rappeler cette lumière du Christ. Nos églises sont des signes. Votre paroisse est un signe. Cette cathédrale est un signe magnifique pour nous le rappeler. Mais comme vous le savez, quand on a des trous de mémoire, cela nous empêche de bien voir. C’est comme s’il y avait du brouillard, un rideau devant les yeux, et on ne voit plus les signes. On peut rencontrer des signes, et on ne sait plus ce qu’ils veulent dire. On passe devant une église et on ne sait plus ce qu’elle signifie.
Alors il faut que la voix de Dieu se fasse entendre, non seulement par la vue des signes, mais par le son. Et ces cloches que nous venons de bénir et qui vont être placées dans les tours de la cathédrale auront pour mission de répandre ce bruit -pas seulement le fracas du métal- mais une harmonie, une musique, un appel, un message : quand la cloche sonne, c’est le message de Dieu qui atteint notre cœur, qui vient réveiller dans nos mémoires la présence de cette lumière pour conduire notre vie. Et pour les hommes et les femmes qui n’ont jamais connu cette lumière, qui l’ont oubliée ou perdue, c’est un chemin pour leur adresser une parole d’espérance. Oui, ils pourront se laisser guider par le son de ces cloches, parce que le son les conduira vers la lumière pour orienter leur vie vers le bonheur.
Aujourd’hui nous sommes heureux de bénir ces cloches qui vont être la voix de Dieu pour les habitants de Paris, qu’ils le connaissent ou non ! Ils entendront une voix qui s’adresse à leur cœur, une voix plus pure, plus belle que le bruit de la ville, une voix qui leur donnera une espérance. Vous n’êtes pas venus sur terre pour vous perdre dans la nuit, pour errer comme des brebis perdues sans pasteur, pour tout ramener à vous, mais pour accueillir la lumière du Christ et vous laisser conduire, pour devenir des hommes et des femmes qui essayent de se mettre au service de tous, puisqu’ils sont les amis et les disciples du Serviteur. Amen.
+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.