Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Messe à St Pierre de Chaillot - 2e Dimanche Temps Ordinaire - Année A

Dimanche 19 janvier 2014 - St Pierre de Chaillot (Paris XVIe)

Pour croire que Jésus est le Fils de Dieu, nous nous appuyons sur le témoignage de Jean-Baptiste, lui-même témoin de la venue de l’Esprit et de la Parole lors du baptême de Jésus. Cette bonne nouvelle doit être annoncée à tous. Le projet de la mission "Avent 2014" s’inscrit dans cette dynamique.

 Is 49, 3.5-6 ; Ps 39 ; 1 Co 1, 1-3 ; Jn 1, 29-34

Frères et Sœurs, Chers amis,

Avant que nous ne commencions dimanche prochain la lecture continue de l’évangile de saint Matthieu qui nous est proposée cette année, la liturgie de l’Église nous invite à clore le cycle des manifestations qui s’est inauguré par la nativité de Jésus au cœur de la nuit de Bethléem, là où les anges ont attiré les bergers pour reconnaître le Sauveur. Ce cycle s’est poursuivi par la vénération des mages venus adorer le Roi des juifs et s’est conclu par le baptême de Jésus dans le Jourdain où la voix venue du Ciel a désigné Jésus de Nazareth comme le Fils de Dieu. Ainsi, à travers ces trois manifestations du Christ, nous avons été entraînés progressivement à reconnaître en lui celui qui est venu pour nous sauver, celui qui est venu pour être le berger d’Israël, et celui qui est venu pour annoncer aux pauvres la bonne nouvelle. Ces trois missions du Christ sont comme englobées et fondées dans la révélation que Dieu a faite : Jésus est son Fils, son unique, son bien-aimé, tel qu’il a été manifesté au cours de son baptême. Et pour terminer ce cycle des manifestations du Christ, la liturgie nous invite à nouveau à entendre proclamer que Jésus est le Fils de Dieu. Cette proclamation prend la forme du témoignage que Jean-Baptiste lui rend, puisqu’il a été lui-même témoin de la venue de l’Esprit et de la Parole qui s’est exprimée à cette occasion : « j’ai vu l’Esprit descendre du ciel comme une colombe et demeurer sur lui. … Celui-là baptisera dans l’Esprit-Saint » (Jn 1, 32-33). Évidemment, aussi bien le baptême de Jésus que le témoignage que lui rend Jean-Baptiste sont destinés à ouvrir la mission publique du Christ qui va se dérouler dans le récit des évangiles et dont nous commencerons la lecture dimanche prochain.

Qu’est-ce que cela signifie qu’il est le Sauveur, qu’il est le berger d’Israël, qu’il est le Fils de Dieu ? Cela, nous serons invités à le comprendre à travers les discours et les signes, les miracles que Jésus va opérer tout au long de sa vie publique. Mais avant d’y pénétrer, nous avons besoin de cette clef pour comprendre ce que signifient les événements dont nous allons être rendus témoins par le récit des évangiles. Il est venu pour sauver le monde, il est venu pour conduire le peuple d’Israël, il est venu pour ouvrir à chaque homme et à chaque femme qui croient en lui, le chemin vers la famille de Dieu. En lui, nous devenons nous aussi enfants de Dieu, en lui nous recevons le même Esprit qu’il a reçu, en lui nous devenons porte-parole de la bonne nouvelle. Cette bonne nouvelle nous a été rappelée par la prophétie d’Isaïe : « je vais faire de toi la lumière des nations, pour que mon salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre » (Is 49, 6).

En ce jour où notre attention est orientée vers la situation des migrants à travers le monde et parmi nous, cette dimension universelle de la lumière apportée par le Christ, cette dimension universelle du salut qui doit atteindre toutes les extrémités de la terre, nous invitent à sortir d’une vision fermée de notre foi et de notre vie ecclésiale. Le message que l’Église nous transmet de la part du Christ n’est pas simplement donné pour notre bien-être, même si nous pensons à notre bien-être spirituel. Ce message nous est donné pour être transmis, nous devons en témoigner auprès des hommes au milieu desquels nous vivons. Ce message de lumière et de salut ne peut être efficace que si nous nous en faisons les porteurs auprès de tous nos frères. C’est pourquoi depuis plusieurs années, j’ai invité les paroisses de Paris à reprendre conscience de leur mission à l’égard du monde qui les entoure. Il serait trop facile, et il serait inutile que nous développions une vitalité et une activité tournées uniquement vers le fonctionnement de nos communautés. Le Christ nous appelle pour que sa bonne nouvelle soit annoncée à tous, il nous appelle tous pour être les porteurs de sa bonne nouvelle.

Bien sûr, dans les communautés chrétiennes, comme dans chaque communauté humaine, il y a des fonctions et des missions différentes, mais celles-ci, réparties entre les membres d’une communauté, sont animées par le même objectif : annoncer le Christ à tous les hommes. C’est ce que j’ai essayé de développer parmi les paroisses parisiennes par le travail de « Paroisses en Mission ». Je veux à présent inviter les paroisses à passer à l’acte à l’occasion de l’Avent 2014, en faisant de ce temps un temps de mission, c’est-à-dire un temps favorable pour annoncer à tous ceux qui nous entourent, nos familles, notre milieu professionnel, nos amis, nos voisins, tous ceux avec qui nous sommes en contact, que la fête de Noël à laquelle ils se préparent avec tellement d’intérêt n’est pas simplement une fête des enfants ou une fête païenne, mais c’est la fête de Jésus Fils de Dieu venu parmi les hommes pour nous apporter le salut. Nous l’avons expérimenté, cette annonce explicite de Jésus-Christ à travers les relations de notre vie n’est pas quelque chose de facile. Cela suppose que nous sortions de notre réserve, que nous surmontions nos craintes et nos timidités, que nous acceptions d’être nous-mêmes ce que nous sommes vis-à-vis des autres et que nous ne reculions pas devant le risque d’être incompris ou rejetés. C’est pourquoi j’ai voulu que cette année 2013-2014 soit une année de préparation à cette mission que j’ai appelée « l’Année de l’appel ». Au long de cette année, nous devons nous efforcer de nous encourager les uns les autres, de nous stimuler, de nous éveiller pour que le moment venu, chacun selon ses moyens, chacun selon sa situation, nous devenions capables comme Jean-Baptiste de rendre témoignage à Jésus le Christ, celui qui est venu enlever le péché du monde.

Frères et sœurs, ce n’est ni par nos forces, ni par notre talent, ni notre habileté à aller au-devant des autres que nous allons accomplir cette mission, c’est par la puissance de l’Esprit que nous recevons au moment de notre baptême, au moment de notre confirmation, la force que nous donne l’Esprit pour aller au-delà de nos limites personnelles ou communautaires que nous y parviendrons. Quand le Pape François invite l’Église à sortir d’elle-même pour aller à la rencontre des hommes, il ne fait pas autre chose qu’éveiller en nous ce sens de la mission à laquelle nous sommes appelés. « Oui, j’ai vu, et je rends ce témoignage : c’est lui le Fils de Dieu » (Jn 1, 34).

Que le Seigneur vous donne la joie d’annoncer sa bonne nouvelle. Amen.

+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.

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