Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Messe à St Germain l’Auxerrois -– 3e dimanche de carême en présence de catéchumènes - Lectures de l’année A - 1er scrutin.
Dimanche 8 mars 2015 - St Germain l’Auxerrois (Paris Ier)
L’itinéraire catéchuménal est soutenu par la Parole de Dieu. L’épisode de la Samaritaine invite à découvrir le Christ comme source d’eau vive, celui qui redonne la vie au-delà de la mort, à travers sa propre mort et sa résurrection. Nous avons besoin de la force de Dieu dans notre vie chrétienne qui rencontre des obstacles. Les onctions au cours des scrutins en sont le signe et l’instrument.
– Ex 17, 3-7 ; Ps 94, 1-2.6-9 ; Rm 5, 1-2.5-8 ; Jn 4, 5-42
Frères et Sœurs,
Les 415 catéchumènes adultes du diocèse de Paris qui cheminent pendant ces semaines vers la célébration de leur baptême, sont invités à vivre plusieurs étapes. Ces étapes - dont certaines sont célébrées le dimanche dans la communauté chrétienne - marquent la progression de la parole de Dieu dans leur cœur et dans leur vie et en même temps, elles sont une invitation pour celles et ceux qui sont baptisés depuis longtemps à un chemin de conversion pour la célébration de la Pâques.
L’évangile de saint Jean met en évidence des étapes dans la découverte de la foi et dans l’adhésion à la personne du Christ. Cette rencontre avec la femme de Samarie est une de ces étapes. C’est pourquoi la liturgie nous propose de l’entendre et de la méditer au moment où nous célébrons une nouvelle étape de ceux qui s’acheminent vers le baptême pour Pâques. Cette étape, c’est la découverte que Jésus est la source de la vie, il est l’eau vive. Il est celui par qui la vie est donnée au monde, celui par qui la vie va être rendue aux hommes par-delà la mort. Jésus, source d’eau vive, est celui auquel nous croyons, celui auquel nous sommes invités à croire de manière plus forte, plus déterminée et plus profonde.
L’épisode du cheminement à travers le désert, où le peuple a récriminé contre Dieu parce qu’il pensait mourir de soif, provoquant l’intervention de Dieu à Mériba, nous rappelle que l’un des éléments essentiel de l’existence, l’eau, lui a été donnée par Dieu lui-même pour qu’il ne périsse pas dans le désert. Plus tard, Dieu lui donnera le pain pour qu’il puisse traverser le désert, la manne, en réponse à leurs prières.
En faisant mémoire de ces interventions de Dieu dans l’histoire d’Israël, nous sommes invités à découvrir comment il accompagne chacune et chacun d’entre nous dans notre marche vers la Pâques. Nous pouvons rencontrer des obstacles, des résistances, nous pouvons être tentés de renoncer à avancer, nous pouvons être tentés de provoquer Dieu, de lui demander des comptes, mais nous sommes provoqués ultimement à reconnaître que c’est Lui qui nous fait vivre ; c’est par la mort du Christ et sa résurrection que nous sommes nous-mêmes entraînés à une vie nouvelle. Cette vie nouvelle se manifeste à travers une nouvelle manière de vivre, c’est-à-dire à travers des comportements modifiés. Le long chemin du catéchuménat qui prépare les candidats au baptême est un temps qui leur permet aussi de reconnaître ce qui doit changer dans leur vie et de le mettre en pratique, à mesure qu’ils reçoivent la lumière du Seigneur, mais aussi à mesure qu’ils reçoivent sa force, car le renouvellement de notre vie, la capacité de mener une vie nouvelle suppose un combat dans lequel nous avons besoin de la force de Dieu.
C’est pourquoi, dans le scrutin que nous allons vivre tout à l’heure, je ferai sur les catéchumènes une onction d’huile qui exprimera cette force de Dieu qui leur est donnée pour le combat qui les conduit au baptême.
Frères et sœurs, peut-être avons-nous été trop longtemps habitués à considérer que la vie chrétienne n’était pas un combat, qu’il suffisait de faire comme tout le monde et de se laisser conduire. Aujourd’hui nous expérimentons que la vie chrétienne est un choix. La vie chrétienne est un choix d’identité. Quand on choisit d’être chrétien cela signifie qu’on adopte une identité particulière. C’est un choix dans la manière de vivre. On choisit d’essayer de mettre en œuvre la parole de Dieu dans tous les domaines de notre existence. Cette résolution et ce travail de l’Esprit en nous, nous obligent à renoncer à un certain nombre de choses ou à choisir un certain nombre de comportements qui ne sont pas ceux de tout le monde.
Le pape Benoît XVI avait développé cette lecture en l’exprimant d’une façon synthétique : depuis plusieurs dizaines d’années nous passons d’un christianisme sociologique à un christianisme de liberté. Le christianisme de liberté que nous connaissons suppose que nous soyons disposés à engager notre liberté et à prendre les décisions qui correspondent.
Ainsi, frères et sœurs, en accompagnant les catéchumènes dans leur démarche nous sommes invités nous-mêmes à reprendre conscience du combat auquel nous sommes appelés et à nous appuyer non pas simplement sur ce que disent les uns ou les autres mais sur ce que Jésus nous dit lui-même. « Maintenant nous croyons parce que nous l’avons entendu, nous savons que c’est lui le Fils de Dieu » (Jn 4,42).
Amen.
+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.