Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Messe et Bénédiction de l’autel et de la chapelle "Sainte Catherine" Résidence Catharine Labouré
Mercredi 29 novembre 2017 - EHPAD Résidence Catherine Labouré - Filles de la Charité (Paris 12e)
Si le temple de Jérusalem était perçu par Israël comme le lieu de la présence de Dieu, avec le Christ, la présence de Dieu est rendue visible à tous. La rencontre de Dieu devient possible à travers lui en esprit et en vérité pour ceux qui se rassemblent en son nom. Les lieux de célébration sont des signes de la présence de Dieu parmi les hommes.
– Ez 43,1-2,4-7 ; Ps 83 ; 1 Co 3,9-11.16-17 ; Mt 16,13-19
Nous avons entendu, dans la lecture du prophète Ezéchiel, comment le temple au centre de Jérusalem était perçu par le peuple d’Israël comme le lieu de la présence de la gloire de Dieu, le signe de la présence de Dieu au milieu de son peuple, le signe de sa présence au peuple de l’Alliance, et à travers lui, évidemment, de sa présence à l’humanité.
Avec la naissance et la vie de Jésus de Nazareth, la présence de Dieu parmi les hommes n’est plus simplement signifiée par un bâtiment construit. Même s’il était magnifique, du moins dans sa splendeur première puisque les réalisations suivantes étaient moins spectaculaires, c’était le bâtiment qui était le symbole de la présence de Dieu. Avec la personne de Jésus, la présence de Dieu n’est plus symbolisée par un bâtiment, elle est rendue visible aux yeux de tous. Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant. Cela signifie qu’en lui, c’est le Dieu vivant qui est présent, et que, dorénavant, la rencontre avec la gloire de Dieu ne passera plus ni par un lieu, ni par un temps, mais sera une rencontre en esprit et en vérité, comme Jésus le dit dans l’évangile de saint Jean quand il parle avec la Samaritaine. La Samaritaine disposait aussi d’un temple qui évoquait la présence de Dieu : on dit qu’il faut adorer ici, vous, vous dites qu’il faut adorer là-bas, alors où faut-il adorer ? Et Jésus lui dit : maintenant, le Père aura des adorateurs en esprit et en vérité qui ne seront pas dans tel lieu ou dans tel lieu. Il serait évidemment tentant de penser que cette parole du Christ affranchit définitivement les hommes de tout signe humain de la prière et de la présence. Ce n’est pas ce qu’il dit. Il dit que la rencontre avec Dieu n’est plus réduite à un lieu, à une ville, mais qu’elle se réalise en esprit et en vérité, c’est-à-dire dans la rencontre de ce qu’il accomplit à travers son Fils, par le don de l’Esprit, en se constituant un peuple qui est le peuple de Dieu.
La présence de Dieu à l’humanité, ce sont les disciples de Jésus, unis à lui par le baptême et vivant en lui par le don de son Esprit. C’est pour nous une grande espérance, une grande consolation. Cela veut dire que chacune et chacun d’entre nous peut rencontrer Dieu à tout moment, à toute heure, en tout lieu, parce que notre communion avec Dieu est une communion par l’intérieur et non par l’extérieur. Mais c’est en même temps une responsabilité parce qu’au long de l’histoire des hommes, nous devons donner le signe de cette présence de Dieu à travers notre effort pour vivre selon la parole du Seigneur. Ce signe visible et humain de la présence de Dieu s’exprime particulièrement par la communauté des disciples du Christ rassemblés pour écouter sa parole et pour partager son pain, c’est-à-dire par le peuple de l’Eucharistie. C’est ce peuple de l’Eucharistie qui est présence de Dieu au monde. Depuis que Jésus est retourné auprès du Père, l’histoire nous montre que les chrétiens se sont réunis et rassemblés dans toutes sortes de lieux et de bâtiments. Ils ont commencé par se rassembler dans les bâtiments publics qui n’étaient pas des églises mais des basiliques profanes. C’est peu à peu seulement qu’ils ont constitué des lieux particulièrement significatifs de la célébration eucharistique et de la présence du Christ aux hommes. Il y en a de grandioses, de spectaculaires, de magnifiques, il y en a de plus modestes, et puis il y a les petites chapelles comme celle que nous bénissons aujourd’hui et qui va exprimer la présence du Christ ressuscité au cœur de cette communauté rassemblée dans la Maison Catherine Labouré. Cette présence du Christ ressuscité, en particulier dans l’eucharistie, est un soutien pour la communion de chacune et de chacun d’entre nous avec Dieu vivant présent en nos cœurs. On peut ne pas douter de cette présence de Dieu en nos cœurs, mais nous avons besoin que cette présence soit symbolisée, soutenue et nourrie par un signe visible de cette présence. Ce sera au milieu de vous, la présence du Christ dans l’eucharistie. C’est au milieu de vous la présence du Christ par sa parole partagée. C’est en chacune et chacun d’entre vous la capacité d’accueillir le don de Dieu à tout moment de la journée et de le partager. « Tu es Pierre, sur cette pierre je bâtirai mon Église » (Mt 16,18), cela veut dire : sur cette pierre je rassemblerai le peuple de Dieu qui sera le signe de la présence de Dieu aux hommes.
Rendons grâce à Dieu qui nous associe à cette promesse de Jésus. Nous savons, parce qu’il nous l’a dit, que lorsque deux ou trois sont réunis en son nom, il est au milieu d’eux. Nous savons, parce que nous faisons confiance à sa parole, que chaque fois qu’il nous rassemble pour célébrer l’eucharistie, il est présent au milieu de nous. Nous savons que par notre participation à la communauté ecclésiale, nous prenons notre part de cette présence du Christ au milieu des hommes.
Que le Seigneur nous donne de trouver notre réconfort dans cette présence, notre joie dans la possibilité de la partager, notre espérance dans la rencontre qu’il nous propose jour après jour.
Amen.
+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris