Homélie du Cardinal André Vingt-Trois - Messe à la Maison Marie-Thérèse

Dimanche 26 février 2023 - Maison Marie-Thérèse (14e)

– 1er dimanche de carême – Année A

- Gn 2,7-9 et 3,1-7a ; Ps 50,3-6.12-14.17 ; Rm 5,12-19 ; Mt 4,1-11

Frères et Sœurs,

Nous marchons vers Pâques à la suite du Christ, les yeux fixés sur lui, pour déchiffrer dans sa marche, la marche qui doit être la nôtre, où sont les embûches du chemin, pour puiser dans sa réponse aux difficultés, la force d’affronter nos propres difficultés.

Je sais bien que souvent, nous essayons d’arranger un peu les choses en disant que : pour Jésus, ce n’est pas pareil, parce qu’il était le Fils de Dieu… mais, quant à nous, il faut que nous vivions tout cela avec nos propres moyens ! Jésus veut justement nous faire comprendre que ce raisonnement est faux. Jésus n’est pas venu simplement prendre l’apparence d’un homme pour nous donner à croire qu’il était comme nous. Il est vraiment venu prendre la nature humaine pour lui-même, il est vraiment homme, comme il est vraiment Dieu. Et il est vraiment homme jusque dans ce qui définit le mieux l’originalité de l’être humain, c’est-à-dire sa liberté.
L’homme n’est pas un animal guidé par ses instincts, l’homme n’est pas seulement un faisceau de pulsions qu’il satisfait les unes après les autres. L’homme est un être capable de jugement, capable de voir le bien et le mal, et donc appelé à choisir entre le bien et le mal.

Comme nous l’avons entendu par ce beau passage du Livre du Deutéronome que nous avons entendu cette semaine : « J’ai mis devant toi le bonheur et le malheur, la vie et la mort, pour que tu choisisses la vie et que tu vives. » Eh bien, Jésus, entraîné par l’Esprit de Dieu au désert, est confronté à ce choix de vie. Est-ce qu’il va s’appuyer sur le fait qu’il est Fils de Dieu pour échapper à la condition humaine, ou bien, est-ce qu’il va prendre le chemin des hommes pour devenir fidèle à Dieu ? « Si tu es le Fils de Dieu », bien sûr qu’il est le Fils de Dieu, mais il ne s’est pas accroché, comme nous dit l’épître aux Philippiens, au fait qu’il était le Fils de Dieu ! Il a pris la condition humaine, c’est-à-dire une condition risquée où nous sommes confrontés à des choix de vie. Ah, les choix de vie, on sait ce que c’est, on a de bonnes littératures là-dessus et on sait très bien que, à certains moments de la vie on doit faire des choix, et on est assez fier d’avoir fait le bon choix quand même et d’être engagé à la suite du Christ par un choix de vie. Mais ce choix de vie, qui a orienté notre vie, à certains moments, c’est un choix qui se représente quotidiennement, c’est un choix qui nous est demandé de refaire jour après jour, non pas simplement dans les grandes orientations de la vie mais dans la manière dont les grandes orientations de la vie se concrétisent à travers les petites choses de la vie.

Jour après jour, le tentateur nous dit : si tu as fait le bon choix, si tu es le Fils de Dieu, alors tu peux satisfaire tes désirs, tu peux dominer le monde. Le Christ nous invite à entrer dans le chemin où il n’est plus dominateur mais où il accepte d’être serviteur. Et pour nous, faire le bon choix, choisir la vie plutôt que la mort, le bien plutôt que le mal, c’est suivre le chemin du Christ en nous appuyant sur la Parole de Dieu. Vous avez remarqué que dans les trois réponses que Jésus fait à Satan, à chaque fois, c’est une citation de l’Écriture qu’il met en avant. Eh bien, nous aussi, nous pouvons nous appuyer sur la Parole de Dieu pour faire les choix de notre vie de chaque jour, et peut-être essayer de garder dans notre mémoire et dans notre cœur la phrase ou le mot que nous avons entendu et qui va être le point d’appui de notre choix de vie.

Et si nous n’avons plus la mémoire suffisamment forte pour retenir une phrase ou un mot, nous pouvons toujours retenir le mot qui exprime à lui tout seul le chemin du Salut : Jésus. A chaque moment de notre journée, à chaque occasion où nous pouvons changer quelque chose dans notre manière d’être, nous pouvons nous appuyer sur le chemin du Christ, Jésus notre lumière.

Amen.

+André cardinal Vingt-Trois, archevêque émérite de Paris

Homélies

Homélies