« L’Europe doit porter une conscience universelle »

Paris Notre-Dame du 21 mai 2015

P. N.-D. – Ce jeudi 21 mai, se tient le colloque conclusif du séminaire de recherche « Mémoires, identités et imaginaires des peuples européens », dont vous êtes l’un des organisateurs. Pourquoi avoir lancé une réflexion sur ce sujet au Collège des Bernardins ?

P. Antoine de Romanet, curé de N.-D. d’Auteuil (16e) et codirecteur du département de recherche Société, Liberté, Paix au Collège des Bernardins.
© D.R.

P. Antoine de Romanet – Nous avons souhaité, en partenariat avec l’association Anima Mundi, spécialiste des questions européennes, mener une réflexion sur la construction européenne aujourd’hui. Nous avons abordé des questions telles que : « Y a-t-il une âme de l’Europe ? », « Qu’est-ce qui fonde l’Europe ? », ou encore « Quelle est la place de l’Europe dans le monde ? » L’avenir de l’Europe ne passe pas d’abord par des normes, des techniques, du juridique ou de l’économique, mais par des hommes liés par une culture et une histoire. C’est en associant le cœur et l’esprit, la raison et la vision, que l’Europe peut féconder l’avenir, le sien et celui de tous les hommes. Le Collège des Bernardins se trouve ici à l’épicentre de sa mission.

P. N.-D. – Selon quelles méthodes et sur quels thèmes avez-vous travaillé au cours de ces deux années d’études ?

P. A. de R. – Entre 2013 et 2014, nous avons mené une réflexion pays par pays. Nous nous sommes interrogés sur ce que signifiait aujourd’hui être anglais ou allemand ou italien. Nous avons cherché à découvrir ce qui fondait les spécificités de chacun de ces peuples. Dans un second temps, nous avons abordé des thèmes plus transversaux, tels que la culture, l’énergie ou la défense. Nous avons voulu réaliser une sorte d’état des lieux de la situation actuelle avec comme postulat de base l’idée que chaque nation, composée de tous ses individus, a une âme. L’Église insiste beaucoup sur l’importance de la personne humaine, qui se construit dans la famille, avec une série de corps intermédiaires. Cet ensemble aboutit à la formation d’une nation particulière. Une des questions fondamentales est de chercher à faire de ces différences entre les peuples d’Europe une source de richesse plutôt que de blocages.

P. N.-D. – Quels sont les principaux enseignements de cette étude ?

P. A. de R. – Nous sentons bien que l’Europe a besoin d’un souffle nouveau, qu’il y a une vraie crise de confiance vis-à-vis de ses institutions. Or pour se construire, il est important pour l’Europe de connaître son passé, à commencer par sa mémoire, profondément chrétienne. Elle ne peut être la simple somme d’intérêts individuels. Elle doit porter une vision universelle qui est son apanage. Or, qui propose aujourd’hui une telle vision globale si ce n’est l’Église et le pape ? Les peuples ont besoin d’adhérer à une vision, d’être entraînés dans une même direction, et cela ne peut se faire qu’en respectant l’homme dans toutes ses dimensions, y compris spirituelles et culturelles. Nous ne sommes pas de simples outils de production économiques. Sur la scène internationale, les pays d’Europe sont confrontés aux puissances émergentes, aux États-Unis, à la Chine et à l’Afrique. Ils font face également à des multinationales, dont les budgets et les capacités d’influence sont supérieurs à ceux de bien des États. L’Europe est donc plus que jamais invitée à s’unir, à transcender les spécificités locales tout en les respectant. • Propos recueillis par Anne-Louise Sautreuil

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