Le Lucernaire : une lumière au seuil de la nuit
Paris Notre-Dame du 27 février 2014
Une fois par mois, St-Christophe de Javel (15e) célèbre l’office du lucernaire. Une halte spirituelle et musicale animée par la maîtrise des chœurs de Saint-Christophe.
L’église est plongée dans la pénombre. Seul le chœur, au fond de la nef, est illuminé. En rang deux par deux, les vingt-cinq chanteurs remontent l’allée et s’inclinent devant l’autel. Le chant d’ouverture rompt le silence et les voix s’élèvent, pures et harmonieuses. « C’est un moment de grâce, confie Marie-Madeleine, 50 ans, qui assiste à l’office dès que son emploi du temps le lui permet. Les chants aident à libérer les tensions, la prière se fait alors plus facile. On est en présence du Christ, tout simplement. »
Le lucernaire, du latin lucerna (lanterne), est une prière du soir célébrant le Christ-lumière. Cette pratique, répandue chez les chrétiens dès les premiers siècles, a retrouvé une certaine faveur à la suite du concile Vatican II. Dans certaines communautés religieuses, elle correspond au rite de l’allumage des bougies au début des vêpres. Mais ici, c’est un office distinct de la liturgie des heures. « Il est unique car il comprend des éléments de début de vêpres mais la fin s’apparente plutôt aux complies », précise le P.Yannick André, curé de la paroisse.
Autour du chant et de la Parole de Dieu
« On voulait mettre en place une prière paroissiale à la forme assez libre, autour du chant et de la Parole de Dieu », raconte Jacques Chatelain, administrateur des chœurs. Avec le P. Yves Plassiard, curé de l’époque, il s’était rendu à un congrès international des Petits chanteurs à Rome en 1994 ; à leur retour, ils avaient décidé d’instaurer un nouvel office à St-Christophe. Cette année, le lucernaire y fête ainsi ses vingt ans d’existence.
Il est près de 20 heures. Un enfant en aube blanche s’approche de l’autel, une bougie à la main ; il la transmet au prêtre. Avec cette flamme, le cierge pascal est allumé, « en signe de la présence du Christ ressuscité », précise le P. André. Pendant ce rituel, les membres de la maîtrise entonnent l’hymne “Joyeuse Lumière”. Les voix basses contrastent avec celles des petits chanteurs, claires et cristallines. «
Presque tout l’office est chanté, explique Marc Korovitch, le jeune chef de chœur. Si la voix parlée est un médium, selon moi, la voix chantée en est un encore plus puissant parce que nous sommes vingt-cinq choristes en communion. »
Dans l’église, les fidèles se sont assis pour écouter le psaume, suivi d’un passage des Écritures. La deuxième partie du lucernaire semble plus recueillie, plus silencieuse. Marie-Pierre, la quarantaine, paroissienne engagée, se rend régulièrement à cette prière. Pour elle, c’est l’occasion de faire le point avant le week-end. « On remet sa semaine à Dieu en essayant de penser à ce qui a été lumineux pendant ces derniers jours. » Jean-Marc est le père de deux chanteurs de 18 et 22 ans, qu’il aime venir écouter : « On est dans une église habituellement bondée mais là,c’est plus restreint, on peut plus intérioriser et entrer en relation avec le Seigneur. » Au-delà de l’éclairage du chœur, il y a la lumière de Dieu, « lumière pour éclairer les nations », comme le souligne le cantique de Syméon. • Marie-Laurence de Framond