Homélie du Cardinal André Vingt-Trois - Confirmations
Notre-Dame de Bonne Nouvelle (2e) - dimanche 3 mai 2009
– 4e dimanche de Pâques
Frères et sœurs,
Dans le récit des Actes des Apôtres que nous avons entendu, Pierre et Jean sont traduits devant le grand conseil pour rendre compte de la guérison du paralytique qui vient de s’accomplir. C’est pourquoi Pierre dit : « nous sommes interrogés aujourd’hui pour avoir fait du bien à un infirme et on nous demande comment cet homme a été sauvé » (Ac 4, 9). Mais cet interrogatoire lui est l’occasion d’une profession de foi : « celui qui donne la vie, celui qui donne le salut, celui qui donne la guérison c’est Jésus de Nazareth. C’est grâce au nom de Jésus le Nazaréen que cet homme se trouve là devant vous, guéri. Le nom de Jésus donné aux hommes est le seul qui puisse nous sauver » (Ac 4, 10 et 12). Ces propos de l’apôtre révèlent à ses auditeurs l’origine du signe de salut donné dans la guérison du paralytique et plus largement la nature de l’espérance offerte à tous : Jésus de Nazareth est le sauveur de tous les hommes
La mission reçue par les apôtres dans le don du Saint-Esprit au jour de la Pentecôte ne consiste donc pas seulement à raconter les épisodes de l’histoire de Jésus de Nazareth qu’ils ont partagés. Ce ministère est d’annoncer avant tout son procès, sa condamnation, son exécution, sa mort et sa résurrection. Car c’est dans la résurrection de Jésus que la mort a été vaincue, que la vie a été répandue sur les hommes et que tous ont été appelés au Salut. Cette prédication centrée sur la mort et la résurrection du Christ n’est donc pas l’exposé de l’opinion personnelle de Pierre ou des autres apôtres. Elle est vraiment parole de Dieu, annonce du dessein de Dieu révélé aux hommes et de la réconciliation offerte à toute chair. C’est là le cœur du ministère apostolique. Les apôtres sont chargés d’annoncer de la part de Dieu la bonne nouvelle du Salut, un temps de réconciliation, une « année de bienfaits » (Cf. Lc 4, 19 qui reprend Is 61, 2).
La légitimité du ministère apostolique vient d’abord de ce que les apôtres ont été les premiers témoins de la résurrection du Christ. Elle tient aussi au fait que ce sont eux que Jésus a envoyés pour devenir témoins de la Bonne Nouvelle. Ce ministère est donc au fondement de la mission de toute l’Église. En lui s’origine l’envoi de tous ceux qui sont baptisés et confirmés dans le Christ. En effet les douze ne vont pas demeurer les seuls témoins de la bonne nouvelle, mais par l’imposition des mains et le don de l’Esprit Saint, ils vont y associer tous ceux et toutes celles qui ont été appelés par le Christ à entrer dans le chemin de la vérité. Chacun et chacune de ceux qui sont confirmés dans l’Esprit Saint est constitué témoin de la foi et de la résurrection, héraut et ministre de la bonne nouvelle. Voici la joie de notre vie chrétienne et la charge que nous avons reçue ! Conformés au Christ par le baptême et le don de l’Esprit Saint, nous devenons avec lui les témoins de la miséricorde de Dieu dans le monde.
Mais le peuple de ceux et celles qui ont reçu cette mission a besoin d’être gardé dans la fidélité au don de l’Esprit. Il faut en effet que les gestes qu’il pose, les paroles qu’il prononce et les signes qu’il donne ne soient pas simplement le fruit de son imagination ou de sa générosité. Sa mission a besoin d’être garantie et authentifiée. Cette tâche est celle du ministère ordonné, que Dieu suscite dans l’Esprit Saint. Quand je parle, c’est bien moi qui vous parle mais c’est aussi Dieu qui parle à votre cœur. Ce ne sont pas mes idées que je vous raconte, ni mes mots et mes expressions. A travers mes mots, c’est la langue de Dieu qui s’adresse à votre esprit et à votre cœur. Tout à l’heure, quand avec les prêtres qui m’entourent nous prononcerons les paroles de la consécration, ce n’est pas nous qui opérerons la transsubstantiation du pain dans le corps du Christ et du vin dans le sang du Christ. C’est la puissance de l’Esprit Saint que nous aurons invoquée sur ces offrandes qui agira. Quand dans quelques instants je signerai sur le front celles et ceux qui sont confirmés, ils ne seront pas marqués par l’Esprit Saint directement par mes gestes et mes paroles mais à cause de l’action de Dieu lui-même. Cette garantie que les gestes sacramentels de l’Église sont des actes de Dieu nous est donnée par le ministère apostolique qui est lui-même un sacrement : les mains nous ont été imposées et l’Esprit Saint a été appelé sur nous. C’est en raison de ce sacrement que nous pouvons à notre tour devenir dans le Christ les pasteurs du troupeau qu’il nous confie.
Mais comme le Christ, nous ne devenons de bons pasteurs que si nous acceptons avec lui de livrer notre vie pour ceux dont nous recevons la charge. Le bon pasteur est celui qui donne sa vie pour ses brebis, c’est-à-dire celui qui ne réserve rien pour lui-même. Le ministère qui nous est confié nous saisit tout entier. Il reprend toutes nos capacités et toutes nos limites, toutes nos espérances, toute notre pensée. Il nous conduit à ne plus vivre pour nous-mêmes mais pour Dieu et pour vous.
Au cours de cette année j’ai demandé que le diocèse de Paris s’interroge sur la place et le rôle du ministère du prêtre. Entre-temps le Pape a décidé la célébration d’une année sacerdotale pour l’Église universelle l’an prochain. Nous bénéficions donc d’une année de surcroit ! C’est une chance supplémentaire de nous inviter les uns les autres à comprendre la nature et l’importance du ministère du prêtre, à mieux accueillir l’appel de Dieu dans nos familles et à collaborer de façon plus étroite encore au ministère apostolique, par notre manière de vivre et par le témoignage que nous rendons à l’Évangile.
Frères et sœurs, en ce jour nous rendons grâce au Seigneur qui rend féconde notre vie par l’Esprit qu’il répand dans nos cœurs. Nous le prions avec confiance pour que chacune et chacun de ceux que je vais confirmer, portent du fruit en abondance.
Amen.