Au Collège des Bernardins, juifs et catholiques réunis autour de la Parole
Paris Notre-Dame du 30 janvier 2025
Jusqu’au 27 mars, le Collège des Bernardins organise, une fois par semaine, des soirées d’étude « Yeshiva ». Un prêtre et un rabbin lisent un extrait de l’Ancien Testament, texte commun au judaïsme et à la chrétienté, et échangent leurs interprétations. L’objectif ? Renforcer les liens entre juifs et chrétiens.
L’ambiance est studieuse dans la petite salle située au sous-sol du Collège des Bernardins. Ils sont une vingtaine de personnes, ce jeudi 23 janvier, à 19h30, à s’être inscrites pour assister à la troisième « Yeshiva » de l’année, du nom des centres d’études de la Torah et du Talmud dans le judaïsme. Les actifs se mêlent aux retraités, juifs ou chrétiens. Tous les jeudis soirs – sauf pendant les vacances scolaires –, pendant une heure et demie, un prêtre et un rabbin – chaque fois différents – enseignent ensemble sur un même passage de l’Ancien Testament. Ce projet a été mis en place l’année dernière à l’initiative de Sylvaine Lacout, docteur en théologie au Collège des Bernardins. Le P. Thierry Vernet, délégué diocésain pour les rela¬tions avec le judaïsme, dirige les confé¬rences. « La lecture juive des textes est un enrichissement pour nous, parce qu’ils ont gardé des clefs de compréhension que nous, chrétiens, avons perdu au gré du temps et des traductions, explique-t-il. C’est encore plus intéressant de le faire en dialogue, entre rabbin et prêtre, car cela permet de confronter nos interpré¬tations, d’échanger autour et d’apporter un éclairage différent. » Ce soir-là, c’est le P. Charles-Antoine Fogielman, vicaire à St-Paul – St-Louis (4e), et Moshe Sebbag, grand rabbin de la synagogue de La Victoire (9e), qui font la lecture de la paracha Vaéra (Exode 6, 2-9, 35). Tous deux apportent leur interprétation, sans s’être consultés au préalable, tandis que les participants suivent sur le texte qu’on leur a distribué, imprimé en hébreu et en français.
Des interprétations différentes, et enrichissantes
La soirée commence par l’interprétation donnée par le P. Fogielman, qui choisit de s’attarder sur l’attitude de Pharaon face aux sept plaies d’Égypte et les raisons pour lesquelles le Seigneur a endurci le cœur du roi d’Égypte. « Le fait de pour¬suivre, chacun dans son idée a été, à la fin, fécond. » Et d’ajouter : « Il faut laisser chacun faire son expérience du bien et du mal. » Au bout d’une demi-heure, c’est le rabbin Moshe Sebbag qui s’installe derrière le bureau. Il commence par expliquer la signification du mot « shemot », signifiant « noms » en hébreu, et par lequel débute le livre de l’Exode. Porter un nom qui nous est propre est, selon le rabbin, un symbole de liberté. Une liberté dont sont privés les fils d’Israël, réduits en esclavage par les Égyptiens. À travers l’histoire de Moïse – qui pose la question au Seigneur de sa légitimité à parler au peuple hébreu –, le rabbin Moshe Sebbag développe son propos en évoquant le questionnement de sa propre identité : « Qui suis-je ? » Et d’ajouter : « Être un homme libre, c’est quelque chose qu’il faut travailler. » La soirée s’achève dans une ambiance chaleureuse, après un temps de questions-réponses. « C’est vraiment riche, ça nous donne un éclairage nouveau sur les textes, se réjouit Myriam, une participante catholique. On y prend goût, ça rend les textes plus vivants. » Pour le rabbin Moshe Sebbag, « cette conférence est un message fort, à l’image des cours de paracha et de Talmud qui ont lieu au Collège des Bernardins ». Et de conclure : « C’est un enrichissement et aussi une rencontre humaine, on rencontre l’autre, on échange et ça crée un lien. »
David Bini
Plus d’informations
collegedesbernardins.fr
Sommaire
Consulter ce numéro
Acheter ce numéro 1 € en ligne sur les applications iOs et Android