Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe à Saint-Merry pour les 54e anniversaire de la Communauté Sant’Egidio

Samedi 19 novembre 2022 - Saint-Merry (4e)

- Col 3,12-17 ; Ps 97 ; Jn 15, 9-17
D’après transcription

Amis, frères et sœurs,

Vous venez d’entendre ces lectures tirées de l’Écriture biblique, dans lesquelles vous avez peut-être identifié une suite de conseils, de conseils pour vivre ensemble, de conseils pour vivre dans la fraternité, dans l’accueil mutuel, dans le pardon accordé, dans la patience et la sagesse, pour que la vie soit possible. Peut-être c’est réduire beaucoup l’enseignement que nous venons d’entendre que d’imaginer qu’il soit simplement une suite de conseils pour bien vivre.

L’apôtre l’a dit d’une façon forte au cours de ce passage que nous venons d’entendre. Il ne s’agit pas simplement que ce soit fait pour bien vivre ensemble, il s’agit que ce soit effectivement au nom du Seigneur Jésus que ceux qui ont choisi de le suivre vivent cela. Il ne suffit pas d’imaginer qu’il y a des recettes pour bien vivre, il faut accueillir – et c’est ce que nous cherchons à faire dans l’Église, dans la communauté des disciples du Christ : nous cherchons à faire en sorte que ce soit le signe de Lui, qui cherche à faire de nous son visage au milieu des hommes et des femmes, qui cherche à faire grandir dans le cœur de ceux qui le suivent le désir de le faire partager. C’est-à-dire que cela va beaucoup plus loin que simplement une manière de vivre. C’est-à-dire que cela pousse à sortir des frontières dans lesquelles nous sommes.

Il est vrai que cette communauté Sant’Egidio nous invite à faire, de la paix, un signe majeur de celui qui nous appelle. Il est vrai que nous sommes invités à faire grandir la paix déjà dans le cœur des enfants. Il est vrai que nous savons que c’est dans la rencontre des croyants de toutes sortes que se vit et se construit quelque chose, et nous pensons que c’est au nom de celui qui nous rassemble. Nous entendons donc cette parole comme un appel et pas simplement comme une sagesse. Comme un appel à dépasser profondément ce qui pourrait sembler être des intérêts bien compris d’un groupe ou d’une nation, ou davantage. Cela n’est pas simplement cela, c’est une ouverture plus profonde qui nous est proposée.

L’évangile insiste aussi. C’est le Christ qui dit à ceux qui veulent le suivre : ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis pour que vous portiez du fruit, un fruit qui demeure. Adhérer à Celui qui nous a rassemblés, ce n’est pas simplement un acte de la volonté, ce n’est pas simplement un choix moral, ce n’est pas simplement le choix que l’on fait d’adhérer à une association de bienfaisance, à un groupe d’intérêts. C’est se laisser choisir, c’est se laisser transformer, et c’est se laisser mettre sur un chemin de la rencontre avec tous les autres. C’est ce que nous essayons de vivre pour que le visage du Christ apparaisse dans la vie des hommes. Nous ne sommes pas là pour être simplement entre nous, mais avec Celui qui nous a appelés. Si vous, qui marchez sur d’autres chemins de foi et de croyance, êtes là, c’est parce que vous accueillez un don qui nous est fait à tous. C’est parce que vous accueillez qu’une démarche puisse être faite en commun entre des gens qui ne partagent pas tous la même foi, mais qui savent qu’ils peuvent se laisser appeler, qu’ils peuvent se laisser grandir ensemble, que dans le respect que nous nous portons les uns aux autres, chacun dans notre démarche, il peut se transmettre quelque chose qui nous dépasse, qui ne reste pas simplement entre nous, qui nous ouvre et nous montre un chemin qui ne finira pas, un chemin où nous nous révélerons les uns aux autres les richesses qui sont dans notre cœur. Et nous laisserons le Dieu qui nous aime se montrer à chacun.

Que le Seigneur nous permette de vivre cette grâce de la rencontre. Qu’il nous aide à ne pas être fermés sur nous-mêmes, dans nos certitudes, dans nos indifférences les uns aux autres, dans les sociétés où nous vivons, dans notre société telle qu’elle est. Que le don qui nous est fait nous fasse grandir. Que le don qui nous est fait soit source d’une vraie paix, emplie de respect mutuel, de désir d’être au service les uns des autres et de tous. Que l’image du Père auquel nous attendons d’accéder un jour, que l’image du Christ qui nous l’a révélé, que la force de l’Esprit qui habite tous les hommes, comme nous le croyons, nous fassent non pas simplement converger les uns vers les autres, mais être vraiment proches de tous ceux qui désirent profondément la paix, la joie, le bonheur partagé et l’espérance la plus forte qui puisse nous rassembler.

Que le Seigneur nous mette dans la paix, que le Seigneur nous mette sur des chemins de rencontre.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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