Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe des Rameaux à Saint-Germain l’Auxerrois
Dimanche 2 avril 2023 - Saint-Germain l’Auxerrois (1er)
« Cet anonyme, c’est nous »
– Dimanche des Rameaux et de la Passion – Année A
- Is 50,4-7 ; Ps 21,8-9.17-20.22-24 ; Ph 2,6-11 ; Mt 26,14 à 27,66
D’après transcription
Laissons-nous ce soir, une fois de plus, interroger par l’Écriture que nous venons d’entendre. Laissons-nous être étonnés de ce que nous entendons. Et par exemple, retenons cette phrase que nous avons entendue tout au début de l’évangile, lorsque les disciples s’approchent de Jésus et lui demandent : « Où veux-tu que nous te fassions les préparatifs pour manger la Pâque ? » Il leur dit : « Allez à la ville, chez un tel, et dites-lui : “Le Maître te fait dire : Mon temps est proche ; c’est chez toi que je veux célébrer la Pâque avec mes disciples.” »
Voici que nous entendons parler de quelqu’un qui est probablement un disciple de Jésus, quelqu’un qui est connu de lui, quelqu’un qu’il a rencontré quelque jour, quelqu’un à qui il a dit : un jour j’aurai besoin de ta maison. Mais ce disciple n’est pas nommé. L’évangéliste prend soin de dire : un tel. Pourquoi cet anonymat ? Voilà une question que nous pouvons garder et sur laquelle nous pouvons maintenant méditer. Il y a beaucoup d’autres personnages dans l’évangile qui ont rencontré Jésus au moins une fois et dont le nom a été gardé, probablement parce qu’ils étaient des disciples connus dans la première Église. C’est probablement le cas des apôtres évidemment, c’est probablement le cas de quelqu’un que nous voyons paraître une seule fois dans un évangile : Zachée, bien connu, dont nous avons entendu parler. Ce Zachée dons la vie a été transformée, il est connu de la première Église, il doit être un membre de cette Église. Nous avons entendu parler de Bartimée, le fils de Timée, l’aveugle guéri, lui aussi, doit être un de ceux qui a continué le chemin avec Jésus, et qui après sa mort et sa résurrection est toujours un homme dont le nom est connu, et quelques autres. Mais celui-ci demeure anonyme.
Alors nous nous accrochons à une autre parole que Jésus dit : « le maître te fait dire : c’est chez toi que je veux célébrer la Pâque avec mes disciples » et nous nous souvenons de quelques occasions où dans l’Evangile Jésus parle de demeurer chez quelqu’un. A Zachée, que je viens de citer, il dit : descends vite, il faut que j’aille demeurer chez toi. Lévi, Matthieu, lorsqu’il est appelé de son bureau où il récolte l’argent des impôts, organise un grand repas dans sa maison et est tout joyeux d’y recevoir Jésus. Jésus demeure chez lui et c’est l’occasion pour Matthieu de montrer qu’il va désormais suivre cet homme à son appel, devenir son disciple, demeurer avec lui pendant que lui aura demeuré chez lui quelques instants au moins, le temps d’un repas.
Et puis nous nous souvenons de cette parole de saint Jean : celui qui m’aime, dit Jésus, il gardera ma parole, mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, et chez lui nous ferons notre demeure. Nous sommes peut-être éclairés, nous comprenons que Jésus veut demeurer chez nous. Veut demeurez non seulement chez Lévi, non seulement chez Zachée, mais réellement chez un tel, qui est anonyme et dans lequel nous pouvons nous reconnaître. Cet anonyme c’est nous.
Au cours de cette semaine sainte, nous sommes invités, les uns et les autres, à demeurer avec le Christ pour qu’il demeure chez nous, à l’inviter à être chez nous pour que nous soyons avec lui et chez lui.
Soyons fidèles à écouter sa parole tout au long de cette semaine, peut-être davantage que nous n’avons l’habitude de le faire à lire un deuxième et un troisième récit de la Passion peut-être, en attendant celui que nous entendrons Vendredi Saint. Soyons fidèles à une prière plus insistante, peut-être un peu plus fréquente.
Soyons fidèles aux célébrations de la semaine qui vient, de nous y associer le mieux que nous pouvons par une présence physique, et si cela n’est pas possible, par la pensée très forte, être avec lui, demeurer avec lui le mercredi Saint, mercredi prochain à Saint-Sulpice, spécialement, pour la messe de consécration des huiles et de rénovation des promesses des prêtres et des diacres, la messe dite « chrismale ». Jeudi, à la Sainte Cène du Seigneur, pour être avec lui quand il dit qu’il donne sa vie. Vendredi, à la célébration de la Passion du Seigneur, quand il offre vraiment sa vie pour que nous soyons sauvés. Samedi soir, pour l’annonce de la résurrection dans la nuit qui ouvre au jour de Pâques où nous célébrerons tous ensemble la résurrection du Seigneur. Demeurons avec le Christ tout au long de cette semaine, lui il choisit de demeurer parmi nous.
+Laurent ULRICH, archevêque de Paris