Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe à Saint-Germain l’Auxerrois pour remercier les fidèles d’avoir accueilli pendant 5 ans la liturgie de la Cathédrale

Dimanche 24 novembre 2024 - Saint-Germain l’Auxerrois (1er)

– Christ Roi de l’Univers – Année B
Messe à pour remercier les fidèles d’avoir accueilli pendant 5 ans la liturgie de la Cathédrale
- Dn 7,13-14 ; Ps 92, 1-2.5 ; Ap 1,5-8 ; Jn 18,33b-37

La vision du prophète Daniel, dans la première lecture, vision d’un fils d’homme à qui sont donnés domination, pouvoir et gloire, se comprend avec le passage qui précède et qui n’est pas dans notre lecture d’aujourd’hui, par distinction avec les quatre bêtes qui dominent la terre. Elles sont manifestement des bêtes prêtes à dévorer avec des « dents de fer », dit le texte du prophète. Ces bêtes-là signifient les puissances terrifiantes, violentes, de la domination humaine sur les peuples et les nations. C’est l’histoire récurrente, à travers les siècles, à travers les générations, des puissances impériales, violentes, qui cherchent à conquérir et à dominer les peuples, à annihiler leur personnalité, leur histoire et leur culture. C’est de tout temps qu’il y a de ces puissances qui ne cherchent qu’à posséder, qu’à dominer, qu’à empêcher toute expression humaine de liberté, toutes sortes de droits, toutes capacités à mener sa propre vie.

Cela est de tout temps et il n’est pas dit que notre temps y échappe. Nous voyons bien, dans le monde d’aujourd’hui, les puissances qui se déchaînent et qui semblent être mues par le désir de la conquête et de la guerre. Nous ne pouvons pas penser qu’il en soit autrement aujourd’hui qu’à toutes les époques.

Et nous voyons donc ce Fils d’homme, désarmé, à qui il est donné pouvoir, domination, sur toute la terre. Mais nous comprenons bien que cette domination n’est pas du même genre que celle de ces bêtes, que celle de ces empires violents. Il nous est dit que ce Fils d’homme « vient sur les nuées du ciel », c’est-à-dire qu’il n’est pas issu des zones infernales du monde, il n’est pas issu des désirs mauvais de la puissance, il n’est pas issu des projets de violence. « Il vient sur les nuées du ciel », il est un don de Dieu, il est celui par qui Dieu veut installer son règne de justice et de paix. Le Seigneur dit lui-même, dans l’Évangile, qu’il est venu pour rendre témoignage à la vérité. Il se heurte à celui qui l’interroge, Pilate, qui est représentant d’un de ces pouvoirs impériaux. Il se heurte à lui qui lui demande s’il est roi ? S’il est donc son concurrent ? S’il est quelqu’un qu’il doit écraser ? Et il répond : « Mon royaume n’est pas d’ici, mon royaume vient d’ailleurs. Mon royaume a une autre origine qui est en Dieu. » Et l’Apocalypse disait « l’Alpha et l’Omega » pour signifier que le pouvoir même de Dieu, qui est un pouvoir bienfaisant, est un pouvoir qui commence avant les empires et qui ne finira pas, même après les empires. C’est un pouvoir définitif, un pouvoir universel, de service, de témoignage, un pouvoir de découvrir la vérité de Dieu.

Et quelle est cette vérité de Dieu ? C’est la vérité de sa fidélité au monde qu’il crée, à la création tout entière, aux humains que nous sommes, génération après génération. La fidélité même de Dieu, qui est ici proclamée, nous l’attendons et nous savons que nous sommes invités à la servir. Nous savons que ce Fils d’homme est venu pour cela : pour que sa parole puisse être entendue, pour que sa parole de bonté, de justice et d’attention aux pauvres puisse être mise en œuvre.

Déjà, dans le temps où nous sommes, nous marchons vers ce royaume et nous essayons de comprendre que l’esprit des Béatitudes, qui était énoncé au début de l’Évangile, cet esprit est là au moment où le Christ donne sa vie. Cet esprit-là il est servi tout au long de l’Évangile dans la parole et dans les actes du Christ.

Alors aujourd’hui, en cette fête du Christ-Roi, nous demandons au Seigneur qu’il nous protège nous-mêmes de tout esprit de domination sur qui que ce soit. Nous demandons au Seigneur que la vérité de son Évangile nous la comprenions, nous la fassions comprendre et en soyons des témoins jour après jour. Nous demandons au Seigneur qu’il nous protège, dans le monde d’aujourd’hui, des fausses vérités. Nous sommes, paraît-il, dans le monde de la post-vérité, des vérités alternatives. Nous ne pouvons pas accepter cela. Nous ne pouvons pas croire qu’il puisse y avoir des vérités qui soient des façons de justifier les dominations violentes et nous voulons au contraire faire place à la seule vérité à laquelle nous croyions, qui est une vraie fidélité de Dieu à tous.

Que le Seigneur nous protège par sa parole, qu’il nous donne le goût d’être toujours des témoins vivants de sa fidélité. Qu’il nous permette de désirer que justice, paix et souci de ceux qui sont sur le bord du chemin soient nos principales préoccupations puisque ce sont ses préoccupations à lui, de toujours à toujours.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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