Homélie du cardinal André Vingt-Trois - Messe des jeunes confirmés à Notre-Dame – Solennité du Christ Roi - Année C
Samedi 23 novembre 2013 - Notre-Dame de Paris
Jésus n’est pas le roi des Juifs comme César est l’empereur des Romains. Comme Fils de Dieu, il est maître de toute la création, non selon un mode de domination par la force, mais par la puissance de son amour. Seul le don de l’Esprit Saint nous rend capables de vivre en suivant le chemin de Jésus.
– Voir l’album-photos de la célébration.
– 2 S 5, 1-3 ; Ps 121, 1-7 ; Col 1, 12-20 ; Lc 23, 35-43
Quand les tribus d’Israël vont rencontrer David pour lui demander d’être leur roi, elles espèrent surtout que si elles ont un roi comme les autres peuples, alors ceux-ci les prendront au sérieux. Les tribus d’Israël ont besoin de reconnaissance, elles ont besoin qu’on dise : c’est un grand peuple qui a un grand roi. Et David sera roi, il sera le roi du peuple d’Israël, il règnera à Jérusalem. Mais nous savons que Dieu ne l’a pas choisi uniquement pour être un roi comme les autres. Quand la Bible chante les louanges de David, ce n’est pas parce qu’il est un roi comme les autres, c’est parce qu’il a su reconnaître la grandeur et la miséricorde de Dieu et qu’il s’est reconnu pécheur.
Quand les juifs assistent à la crucifixion du Christ et lui disent : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! » (Lc 23, 37), quand le larron, le brigand qui a été crucifié à côté de lui, lui dit : « sauve-toi toi-même et nous avec toi » (Lc 23, 39), ils comprennent que Jésus est le roi des Juifs, comme c’est écrit au-dessus de la croix INRI, Jésus de Nazareth Roi des Juifs.
Évidemment, personne n’a jamais imaginé qu’un roi pourrait être crucifié, personne n’a jamais imaginé que même le roi d’un petit peuple comme Israël pourrait être ridiculisé de cette façon. Et donc, ce que l’évangile veut nous faire comprendre, c’est que Jésus n’est pas le roi des Juifs comme César est l’empereur des Romains. Jésus est plus que le roi des Juifs, il est le Fils unique de Dieu. Et comme Fils unique de Dieu, il est le maître de toute la création, pas seulement d’Israël, pas seulement du peuple Juif, et s’il faut parler de roi, de règne, de royaume, son royaume, comme il le dit dans l’évangile, n’est pas de ce monde. Son royaume c’est l’univers entier, c’est tout ce qui existe. Et s’il est roi, il est le roi de tout ce qui existe, et s’il est le maître, il est le maître de tout ce qui existe.
Ce que nous découvrons, c’est que la royauté du Christ ne consiste pas à dominer les hommes, à manifester son pouvoir sur eux, à utiliser sa force pour se sauver lui-même. La puissance du Christ se révèle quand il est faible, sa force se manifeste au moment où tout le monde croit qu’il a perdu, qu’il est vaincu. Et il nous fait comprendre que le règne de Dieu n’est pas un royaume comme les royaumes de la terre, avec des armées, des administrations, des gouvernants, des chefs. Le Royaume de Dieu, c’est un royaume tout à fait particulier, c’est le règne de l’amour. Jésus est le roi du monde, du monde tout entier, de l’univers tout entier, pas seulement de notre Terre, mais de tout ce qui peut exister, que nous ne connaissons même pas. Il est le roi de l’univers tout entier parce que Dieu l’a envoyé pour sauver cet univers. Dieu a tant aimé le monde qu’il a envoyé son Fils, non pas pour condamner le monde mais pour le sauver. Et nous qui essayons de vivre à la suite du Christ, nous savons que pour être en communion avec Lui, il faut que nous mettions en pratique le commandement qu’il nous a donné de nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés, de nous mettre au service de nos frères, d’être non pas ceux qui s’imposent et qui manifestent leur puissance aux yeux du monde, mais ceux qui se mettent à la disposition des autres pour être à leur service.
L’amour n’écrase pas, l’amour ne méprise pas, l’amour ne force pas, l’amour excuse tout, l’amour met chacune et chacun d’entre nous au service de ses frères. Évidemment, vous pouvez vous dire que c’est beaucoup trop difficile, que jamais nous n’arrivons à vivre cela. A la rigueur on peut un peu arriver à aimer les gens que l’on connaît, ceux qui sont autour de nous, ceux qui sont « bien », mais les autres, on ne peut pas les aimer. Et c’est vrai que nous n’avons pas en nous la force d’aimer comme le Christ a aimé. Et c’est vrai que c’est seulement le don de l’Esprit Saint que vous avez reçu par votre confirmation qui vous rend capables de pratiquer l’amour des autres, de pardonner à ceux qui vous font du mal, de faire du bien à ceux qui vous haïssent, de prier pour ceux que vous n’aimez pas, bref de prendre le chemin de Jésus. En recevant l’Esprit Saint, vous êtes, comme par votre baptême, devenus comme le Christ. Et comme Lui, vous êtes appelés à rendre témoignage à l’amour de Dieu pour les hommes, chacun et chacune, dans sa vie, son cours, son école, son collège, son lycée, sa famille, avec ses amis, dans ses loisirs, et surtout dans le secret de son cœur, là où la parole de Dieu vous rejoint et vous appelle à suivre le chemin de Jésus.
Tout à l’heure je vais vous inviter à renouveler la profession de foi de votre baptême comme au moment de votre confirmation. Vous savez que le Pape Benoît XVI a invité toute l’Église à vivre une Année de la foi qui se termine ce dimanche. Pour nous ce sera aussi la manière de clore cette Année de la foi en faisant ensemble cette profession de foi dans la force de l’Esprit Saint.
Amen.
+ André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris.