Renforcer la lutte contre la pédophilie

Paris Notre-Dame du 22 juin 2016

Le renforcement du dispositif de lutte contre la pédophilie, mis en place par le diocèse, a été présenté aux prêtres de Paris le 3 juin dernier par Mgr André Vingt-Trois. L’idée première est de renforcer l’écoute et l’accueil des victimes. Mgr Éric de Moulins-Beaufort, évêque auxiliaire de Paris et vicaire général, revient sur ce dispositif.

Mgr Éric de Moulins-Beaufort, évêque auxiliaire de Paris et vicaire général
© Trung Hieu Do / Diocèse de Paris

Paris Notre-Dame : Le 3 juin dernier, vous annonciez la mise en place d’une adresse de messagerie dédiée (voir encadré). Combien de messages avez-vous reçu à ce jour ?

Mgr Éric de Moulins-Beaufort – Nous avons souhaité mettre en place une adresse mail simple et directement accessible sur le site du diocèse. Depuis, nous avons reçu trois messages. Un mail de soutien à un prêtre religieux, accusé, mais ne dépendant pas du diocèse, et deux autres, de personnes différentes, dénonçant des faits graves, remontant aux années 1945-1947. Ces faits auraient été commis au sein d’établissements de l’Enseignement catholique, par des religieux appartenant à une société de prêtres. À la suite de ces messages, nous avons lancé une enquête pour savoir ce qui était connu à l’époque et ce qui a été fait.

P. N.-D. – Vous procéderez de la même façon pour toutes les plaintes reçues ?

Mgr É. M.-B. – Pour des faits anciens, oui. Mais pour d’éventuels faits récents, commis par des prêtres connus de nous – en particulier concernant des mineurs –, nous ferons directement un signalement à la justice. Sur le site du diocèse, il est d’ailleurs bien précisé que nous invitons les gens à s’adresser d’abord à la police et à la justice, car l’Église n’a pas à se faire justice, même si elle doit sanctionner les prêtres qui se sont rendus coupables de tels actes.

P. N.-D. – Vous avez souhaité qu’une laïque soit chargée de superviser l’accueil fait aux victimes et les suites qui lui sont données. Pourquoi ?

Mgr É. M.-B. – Ce seront les vicaires généraux qui recevront d’abord les éventuelles victimes d’abus sexuels, car celles-ci expriment souvent le besoin de rencontrer l’autorité hiérarchique de l’Église. Mais il nous a semblé également important qu’un tiers soit présent, afin que le vicaire général ne soit pas livré à sa propre mémoire et surtout que le suivi à long terme des victimes puisse être assuré.

P. N.-D. – Ce suivi dans la durée des victimes et des prêtres incriminés est une des difficultés de ce
type d’affaire ?

Mgr É. M.-B. – C’est effectivement une des difficultés. Quand un prêtre a été accusé et éventuellement condamné, ou qu’il a fait l’objet d’un non-lieu ou d’un classement sans suite, il est essentiel de conserver l’attention et la vigilance nécessaires sur toute la durée de vie active de ce prêtre. Or les évêques changent et les vicairesgénéraux aussi.

P. N.-D. – Comment rester vigilants ?

Mgr É. M.-B. – En faisant des comptes rendus détaillés des accusations tenues et des suites qui ont été données ou pas. Si nous avons ouvert une enquête et conclu qu’il n’y avait pas matière à poursuivre, il faut également
l’enregistrer car les soupçons demeurent souvent, alors même que la personne a été blanchie. Par ailleurs, en janvier dernier, l’archevêque a mis en place une commission diocésaine de consultation chargée de nous conseiller dans le suivi à long terme des prêtres ayant fait l’objet d’une condamnation ou qui ont commis des actes qui méritent que l’on soit prudent à leur égard. Deux ou trois fois par an, cette commission reprendra tous les dossiers qui lui ont été transmis. Elle vérifiera également la nomination de ces prêtres et ce qu’on doit dire aux personnes qui
travaillent à leurs côtés.

P. N.-D. – Comment peut-on se prémunir contre ce type de faits ?

Mgr É. M.-B. – Quand les gens ont une personnalité abîmée ou immature, les formations, quelles qu’elles soient, ne suffisent pas. Un des psychologues que nous avons rencontrés a insisté sur le fait que certaines personnes ont une structure pédophile mais ne passeront jamais à l’acte. Pour ceux-là, le climat général peut aider. Pas un climat de peur ou de délation, mais un environnement avec des règles claires. Tous les responsables éducatifs savent aujourd’hui qu’il y a des situations qui ne doivent plus se présenter : un adulte seul avec un mineur par exemple, dans un bureau fermé, sans porte vitrée. Ce climat d’attention positif – y compris dans les familles – est primordial. ❏ Propos recueillis par Priscilia de Selve

Sur le site du diocèse
Retrouvez le dispositif d’accueil et d’écoute du diocèse de Paris sur le site du diocèse : Information sur le dispositif global de lutte contre la pédophilie et les agressions sexuelles Pour contacter le diocèse en toute confidentialité : signalement@diocese-paris.net

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