Vivre le mariage : une aventure pour la vie ?

Paris Notre-Dame du 6 juin 2013

Est-il encore possible de vivre un mariage chrétien ? Demeurer fidèle, accueillir la vie, faire fructifier l’amour… Devant la libéralisation des mœurs, le stress croissant de la vie professionnelle et la perte des repères, comment durer dans cet engagement de façon authentique ? Trois ménages ont accepté de témoigner. • Par Agnès de Rivière

© Agnès de Riviève

« L’aventure du temps »

Yves et Anne-Marie, 45 ans de mariage, 4 enfants, 9 petits-enfants
N.-D. de Grâce de Passy (16e)

« En nous mariant, nous ne savions pas tout ce que nous allions vivre, et comment cela nous transformerait année après année. Au départ, nous avions surtout l’envie de construire une vie à deux, une famille. Il y avait, dans notre amour naissant, un désir d’éternité. Nous nous rendions compte combien notre amour nous dépassait. Par la foi, nous savions que Dieu en était la source et qu’il ne nous abandonnerait jamais. Pour nous, le mariage était et est toujours l’aventure du temps. Cette idée nous a souvent soutenus quand nous pouvions nous sentir découragés. Au quotidien, dans les moments de fatigue, lorsque la tension monte, nous avons appris à prendre le temps nécessaire, sans vouloir tout régler sur-le-champ. Nous nous laissons le droit de ne pas être d’accord. Quand l’autre exprime une demande, nous tenons compte de ce qu’il a dit en évitant de le juger. S’il a besoin d’être seul un moment, nous lui laissons volontiers ce temps. Choisir la fidélité nous a permis et nous permet encore de nous centrer sur l’essentiel. Cela nous apporte tranquillité et dynamisme. Et c’est une arme stimulante contre les tentations égoïstes.

Nous avons aussi réalisé qu’il était important de prendre du temps pour le couple, que c’était un de ses modes de ressourcement. Pendant les années que nous avons vécues à l’étranger pour des raisons professionnelles, nous étions très sollicités. Face aux propositions de sorties, nous nous protégions en gardant régulièrement des soirées pour nous deux. Nous le faisons toujours aujourd’hui ! Pour nous aider à vivre notre mariage de manière authentique, nous nous sommes appuyés sur l’amitié de prêtres et sur les Équipes Notre-Dame. Nous avons appris à faire régulièrement le point, à écouter l’autre, à prier ensemble. »

© Agnès de Riviève

« Se regarder avec humour »

Christian-Frédéric et Blanche, 3 ans de mariage, un enfant.
St-Dominique (14e)

« Ce qui nous a paru le plus difficile au moment de nous engager, c’était le changement de vie que cela impliquait : passer d’un mode de vie de célibataire à une vie à deux n’est pas si simple ! Et puis, comment savoir que nous ne nous trompions pas de personne ? Car il n’était pas question d’un engagement qui ne serait pas définitif. L’indissolubilité du mariage nous paraissait dès le début une évidence : se marier, c’est faire un don de soi total à l’autre, don qui ne peut pas être repris ! Grâce à des exemples de foyers que nous avions autour de nous et avec l’aide de Dieu, cela nous semblait possible. Nous avons compris finalement qu’aimer son amoureux (se) pour la vie, c’était un choix à poser. Pour faire durer l’amour, nous essayons d’être vigilants sur la qualité de notre relation, en étant présents à l’autre par nos regards et nos attitudes. À travers le dialogue et des lectures, comme Couple & Complices, de Gary Chapman, nous travaillons à mieux nous comprendre. Nous nous sommes rendu compte que l’autre pouvait être blessé différemment de nous-mêmes. Nous avons aussi réalisé qu’il était bon de passer du temps avec chaque personne de sa belle famille afin de mieux connaître encore son conjoint. Pour éviter les conflits, nous tâchons d’avoir un regard bienveillant, de nous dire que l’autre veut notre bien, et de reconnaître nos torts. Mais, bien sûr, il nous faut quelquefois un peu de temps. Et quand nous réalisons que nous retombons dans une même erreur, nous prenons cela avec humour. Enfin, nous prions ensemble tous les soirs. Si besoin est, nous attendons que nos colères s’estompent avant de nous tourner vers Dieu car il est impossible de Lui parler si nous ne sommes pas réconciliés ! »

© Agnès de Riviève

« Dans les difficultés, rester patients »

Jean-François et Catherine, 15 ans de mariage, 2 enfants
St-Pierre de Montrouge (14e)

« Nous nous sommes d’abord mariés à la mairie pour donner à notre premier enfant, arrivé par surprise, un vrai cadre familial. Nous étions amoureux depuis plusieurs années, mais l’engagement définitif nous faisait un peu peur. Cet enfant a été l’occasion de nous lancer. Deux ans plus tard, nous nous sommes mariés à l’Église. Mettre Dieu “dans le coup” nous rassurait, était gage de longévité (surtout elle, ndlr). Même si nous ne sommes pas au même niveau dans la foi, nous avons décidé de prendre chaque année une pause spirituelle pour faire le point sur notre couple. Il nous semble important de nous extirper du quotidien, d’avoir une démarche spirituelle à deux. Au bout de quelques années de mariage, nous avions pris quelques mauvaises habitudes. En parlant avec d’autres couples, nous avons découvert l’importance de donner la première place à notre conjoint. Nous avons par exemple choisi de ne plus prendre certaines décisions – comme de répondre à une invitation – sans demander à l’autre son avis. Nous avons aussi pris l’habitude de nous écrire les choses difficiles à dire. Cela nous aide à prendre conscience des besoins de l’autre. Lorsque nous traversons un moment où nous n’arrivons plus à nous parler, nous restons patients. Nous relativisons en nous disant que les difficultés extérieures qui troublent l’un ou l’autre ne remettent pas en question le couple. Souvent, nous savons que le prochain rendez-vous avec notre groupe de partage “Vivre et aimer” nous permettra de renouer avec le dialogue. »

Propos recueillis par Agnès de Rivière

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