Époux et père : à la recherche de sa vocation
Paris Notre-Dame du 7 mars 2013
À l’occasion de la troisième édition de la marche des pères de famille, qui rassemble toujours plus de participants, Paris Notre-Dame s’est penché sur la vocation du père, de l’époux et sur la richesse de l’altérité sexuée dans le couple.
Ils étaient environ 1 200 pères de famille à marcher vers la basilique du Sacré-Coeur de Montmartre (18e) ce samedi 23 février. Besoin de faire une pause ? D’échanger sur ce qui les rapproche face aux tribulations de la société ? Laurent, 50 ans, père de trois enfants, chef d’entreprise et co-lanceur de la marche, perçoit surtout dans le succès de cette journée une réponse à une attente spirituelle des pères, heureux de bénéficier d’un moment propice pour entrer en eux-mêmes. Souvent éprouvés par un tiraillement entre vie familiale et vie professionnelle, deux domaines considérés comme concurrents, ils ressentent le besoin de trouver un équilibre. Or, selon le P. Jean-Philippe Fabre, enseignant à l’École Cathédrale et également organisateur de la marche, « le propre de l’homme, comme le récit de la Création le révèle [1]., est à la fois de travailler et de donner la vie. Et il existe une unité fondamentale entre ces deux aspects ».
« Primauté » paternelle
Afin de mieux comprendre cette vocation propre, le cardinal André Vingt-Trois, dans son homélie [2] de la messe des pères de famille, a rappelé que la paternité était de l’ordre du don. Pour le P. Fabre, « sans le don de l’homme, Ève n’existerait pas, et il manquerait quelque chose à Adam ». Une notion qui se comprend bien dans la vie sexuelle, où le don du père est premier. Une notion qui, appelée « primauté » paternelle, permet de structurer le couple et la vie de famille. « Les pères doivent accepter d’être l’élément structurant de leur foyer et de dépendre d’une forme d’humanité plus accomplie que la leur : la femme », reprend le prêtre. Au quotidien, l’homme est appelé à déployer cette primauté dans l’exercice de l’autorité. Mais attention, une « autorité de service qui s’assume », souligne le prêtre. Ainsi, Philippe, 56 ans et père de trois garçons, reconnaît jouer ce rôle de manière plus systématique que son épouse : « Celle-ci peut être ferme, mais elle n’est pas toujours écoutée par les enfants. Alors, quelquefois, elle me demande de reprendre la situation en main. » Même écho chez Jean, père de six enfants et grand-père, qui relie cet exercice de l’autorité paternelle à son rôle de « boussole » et d’ « accompagnateur » pour ses enfants. « Poser des limites, explique-t-il, n’est pas destiné à enfermer l’enfant, mais au contraire, à lui faire découvrir sa liberté, source de bonheur. Alors que l’autoritarisme étouffe, l’autorité délivre et révèle l’enfant à lui-même. » Cette notion de don, les pères de famille en font aussi l’expérience dans divers domaines : soutenir, conseiller, être disponibles, redonner confiance… des mots qui viennent spontanément aux lèvres de Jean, lorsqu’on lui demande de décrire son rôle de père. Autre caractéristique, le père peut être amené à jouer un rôle d’ouverture à la vie sociale. « Faire du foyer un cocon hermétique n’est pas forcément un service à rendre aux enfants, surtout aujourd’hui, reprend-il. Il m’a toujours paru important de les aider à connaître et à aimer le monde dans lequel ils vivent. »
La richesse de l’altérité
Responsable du chapitre de Levallois lors de la marche des pères, André, 48 ans, père de cinq enfants, remarque de son côté la richesse de la complémentarité des rôles avec sa femme. « Lorsque mes enfants ont un coup dur ou sont tristes, je remarque qu’ils vont d’abord s’adresser à leur mère, confie-t-il. Mais c’est plutôt moi qu’ils viennent trouver quand ils ont besoin de prendre une décision. » Un constat que partage Laurent, qui voit dans cette altérité une des clés d’équilibre du couple. « Il existe une richesse liée à l’altérité qui permet au couple de se transformer, souligne-t-il. Quand on est différent, chacun doit faire un effort pour aller vers l’autre, dans une recherche d’équilibre et d’unité. » Et, comme le précise Jean, « l’unité du couple est sans doute le bien le plus précieux d’une famille, un témoignage de vie essentiel pour la génération suivante ». • Agnès de Rivière
ENSEIGNEMENT DE MGR LUC RAVEL, ÉVÊQUE AUX ARMÉES FRANÇAISES
Dans son enseignement aux pères de famille donné à St-Augustin (8e), pendant la marche des pères, Mgr Luc Ravel a invité ces derniers à aller au-delà des représentations sociales du père et de la mère et à réfléchir sur leur vocation propre, afin de ne pas perdre le sens de la paternité humaine dont la figure est brouillée dans le contexte social actuel. « C’est la paternité de Dieu qui est source de la nôtre, a-t-il rappelé. Le mystère de la paternité est lié à ce qu’est Dieu, qui est Trinité. » Cette paternité s’incarne sur la terre en se dédoublant dans la paternité et la maternité humaines. « Chez l’homme, il n’y a pas de paternité sans maternité », a-t-il précisé avant d’inviter les pères à relire l’encyclique de Jean-Paul II Mulieris dignitatem, afin de réfléchir à ce qu’est le masculin par rapport au féminin, et notamment sa vocation à donner avant de recevoir.
DES JOURNÉES PÈRES ET FILS
Les jeunes garçons ainsi que les adolescents ont besoin de déployer ce qui fait leur spécificité d’hommes. Et pour cela, quelle meilleure aide que celle du père ? Dans la paroisse St-François-Xavier (7e), un groupe de pères de famille [3] propose notamment une journée pères-fils. Au menu : activité sportive et enseignement. « Il est bon pour le père de passer des moments privilégiés avec ses garçons, témoigne Philippe, responsable du groupe. Déjà parce qu’il est indispensable de faire grandir la confiance. Ensuite car nous, pères, avons quelque chose de spécifique à transmettre à nos fils : apprendre à maîtriser sa force, à s’en servir à bon escient par exemple. » Autre lieu de transmission pères-fils : l’éducation affective [4]. Là aussi, le père tient une place essentielle, comme témoigne André qui s’efforce d’« inculquer à ses garçons le respect de ce qu’est une femme et de l’amour entre un homme et une femme ».
[1] « Le Seigneur Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Eden pour le cultiver » (Gn 2, 15) et « Aussi l’homme laisse-t-il son père et sa mère pour s’attacher à sa femme » (Gn 2, 24)
[2] Retrouvez en intégralité l’homélie du cardinal André Vingt-Trois
[3] Groupe ouvert à tous les pères et futurs pères de la paroisse : rencontres plusieurs fois par an pour réfléchir sur la paternité. Contact : peres.famille@sfxparis.fr
[4] Au Bon Conseil (7e), à St-Augustin (8e), St-Christophe de Javel (15e), et à St-Ferdinand des Ternes (17e), la formation « École de l’amour » permet aux parents d’échanger avec leurs enfants sur les sujets d’ordre sexuel et affectif.