Homélie de Mgr Georges Pontier - Messe à Saint-Germain l’Auxerrois

Saint-Germain l’Auxerrois (1er) - Dimanche 20 février 2022

N’ayons pas peur du trop d’amour ! Il vient de Dieu, il est inépuisable.

– 7e Dimanche du Temps Ordinaire – Année C

- 1 S 26, 2.7-9.12-13.22-23 ; Ps 102 (103), 1-2, 3-4, 8.10, 12-13 ; 1 Co 15, 45-49 ; Lc 6, 27-38

Chers Frères et Sœurs,

En écoutant les mots à ses disciples que nous venons d’entendre, Jésus met la barre un peu haut : « Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. » « Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux. » « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. »

On peut entendre ces commandements de Jésus comme de bons conseils pour nos vies de relations. Le chemin de la paix ne se trouve qu’au terme d’un plus d’amour et non au terme du chemin de la vengeance ou de la méchanceté. Le familier « tu m’as eu, je t’aurai » n’apporte rien de bon, rien d’apaisant, rien porteur d’avenir. Il renforce au contraire le cycle de la violence. Il s’agit de triompher par l’amour et la maitrise de soi. L’amour dont il s’agit n’est surement pas celui qui décrit les sentiments mais celui qui caractérise les comportements : le respect et l’estime de l’autre jusqu’au bout.

On peut encore entendre ces propos dans les relations plus amples entre les groupes humains. On peut penser qu’ils ne sont pas étrangers aux choix faits par ceux et celles qui s’inscrivent dans le courant de la non-violence. Nelson Mandela, Martin Luther King, Desmond Tutu et bien d’autres ont puisé dans ces paroles de Jésus leur inspiration. On sait que Gandhi s’y est référé au-delà de sa culture indouiste. Les premiers martyrs ont imité Jésus disant sur la Croix : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. ». Au procès actuel des coupables de l’assassinat du Père Hamel les membres de sa famille et de la communauté chrétienne donnent un beau témoignage de cette lumière qui vient de Jésus. David aussi a vécu cela face au roi Saül comme le montrait déjà la première lecture de ce jour.

Mais il nous faut encore entendre ces paroles de Jésus au cœur de sa mission de révélateur du visage de Dieu, du vrai Dieu, du Dieu qui est à la source de toute vie, de celui qui est Père, Père sans cesse et toujours, Père dont l’amour est tout-puissant, dont l’amour n’est jamais vaincu, n’est jamais désarmé ni désespéré. Le même évangéliste Luc montrera plus loin dans son évangile le Père des deux fils, celui qui revient après avoir dissipé ses biens et qu’il prend dans ses bras et celui qui ne veut plus de son frère et vers lequel il va pour guérir son cœur. Il montrera le berger qui cherche la brebis perdue et la prend sur ses épaules. Et Jésus fonde ses conseils sur la ressemblance à ce Père dont il fait la volonté : « Aimez vos ennemis, faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour. Ainsi vous serez les fils du Très Haut, car lui, il est bon pour les ingrats et les méchants. »

« Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas et vous ne serez pas condamnés. Pardonnez et vous serez pardonnés. » La miséricorde est le trop-plein de l’amour qui déborde sur ceux qui l’offensent. Elle est le cri de cette mère qui répondait à sa famille qui lui reprochait de visiter un de ses fils en prison à cause de sa violence à son égard : « Et si moi je n’y vais pas, qui ira le voir ! » Et si moi je n’y vais pas ! tel est bien ce qui a poussé le Père à envoyer le Fils bien aimé pour révéler son amour infini et sauver. « En nous donnant son fils, il nous a tout donné », s’écrira Paul dans sa lettre aux Romains.

Oh mes amis, n’ayons pas peur du trop d’amour ! Il vient de Dieu, il est inépuisable, il se renouvelle chaque matin. Nous le célébrons en chaque eucharistie : « Prenez, mangez, ceci est mon corps livré pour vous. Prenez et buvez, ceci est mon sang versé pour vous et pour la multitude. « Faites cela en mémoire de moi. » Nous le célébrons dans le sacrement de la réconciliation, nous le supplions dans le notre Père : « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés. »

Oh Toi, Père, Toi, le Miséricordieux, Béni sois-tu.

Amen.

+Georges Pontier, administrateur apostolique de Paris.

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