Homélie de Mgr Georges Pontier - Messe à la Prison de la Santé
Prison de la Santé (14e) - Dimanche 27 mars 2022
Laissons-nous réconcilier avec Dieu.
– 4e Dimanche de Carême – Année C
- Jos 5, 9a.10-12 ; Ps 33 (34), 2-3, 4-5, 6-7 ; 2 Co 5, 17-21 ; Lc 15, 1-3.11-32
Chers Amis, Chers frères en Christ,
Je suis heureux d’être avec vous en ce quatrième dimanche du Carême pour accueillir et célébrer la présence du Christ dans l’eucharistie et vous redire en son nom comme l’écrivait l’apôtre Paul aux Corinthiens : « Nous sommes les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui lance un appel : nous le demandons au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. » Cet appel retentit pour nous ici dans ce lieu, comme il retentit à Saint-Pierre de Rome ou dans la plus modeste assemblée de chrétiens en ce dimanche ! « Laissons-nous réconcilier avec Dieu ». Cet appel est pour tous et pour chacun. Laissons-nous réconcilier avec Dieu. Dieu est Dieu. Il nous révèle qui il est. Ne le faisons pas à notre image. Cet appel rejoint autant celui que la parabole de l’évangile appelle le fils le plus jeune que son frère, l’ainé de la famille.
Si le père de la parabole s’était comporté comme l’imaginaient les deux fils, il n’y aurait pas eu de problème, si je puis m’exprimer ainsi ! L’un et l’autre calculaient. Ils avaient leur idée de Dieu et adaptaient leur attitude selon leur idée. Le plus jeune avait calculé qu’il valait mieux être un ouvrier chez son père, que le fils qu’il n’avait plus voulu être, désormais perdu dans sa solitude, son échec, son dénuement. Alors il allait revenir vers son Père en reconnaissant qu’il n’était plus digne d’être appelé son fils après ce qu’il avait fait. Il réclamerait seulement d’être traité comme un ouvrier. Que le Père améliore sa condition matérielle, cela lui suffisait et lui paraissait possible. Si le Père avait accepté, cela lui aurait paru normal et suffisant ! Mais le Père n’est pas homme de calcul. Il est Père et son fils est son fils, au-delà de ses erreurs, de ses bêtises, de ses décisions. Le voilà pris de compassion. Il court vers son enfant, le serre sur son cœur et lui redonne sa place de fils. « Laisse-toi réconcilier avec Dieu. » Dieu est Dieu. Il n’est pas le Dieu que tu imagines. Il est Père, Père jusqu’au bout, Père sans fin ! Tu ne le changeras pas. C’est lui qui te changeras par son amour et sa fidélité.
Et puis voilà le fils ainé, le jaloux qui ne peut comprendre l’accueil que son père fait à son frère ! Lui, il a toujours été comme un serviteur fidèle qui a fait son travail à la maison. Il ne peut supporter que son jeune frère retrouve sa place de fils. Il ne le mérite pas ! Il n l’a pas servi comme lui l’a fait. Il ne comprend plus le père qui ne marche pas au mérite. C’est de la folie ! Il refuse d’entrer. En ne voulant pas accueillir son frère, comme frère dans la maison, il révèle que son cœur n’est pas un cœur de fils. C’est un cœur d’ouvrier qui réclame ce qu’il mérite, son droit et pas plus ! Si son père avait fait ce que le jeune fils avait demandé, il n’y aurait pas eu de problème. Mais là, non. Trop, c’est trop ! « Laisse-toi réconcilier avec Dieu. » Dieu est Dieu. Il n’est pas le Dieu que tu imagines. Il est Père, Père jusqu’au bout, Père sans fin ! Tu ne le changeras pas. C’est lui qui te changeras par son amour et sa fidélité. Et le Père de venir vers l’ainé pour lui dire : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé. » Ouvre ton cœur à ton frère et tu retrouveras ton père et ton frère. On ne peut prétendre mériter une place qu’on ne veut pas vivre ! Être fils de Dieu c’est être frère des hommes.
Oui : « Laissez-vous réconcilier avec Dieu ». Il vient vers nous pour nous renouveler sans cesse dans notre condition de fils ! Mais il ne peut y parvenir que si nous ne refusons pas de reconnaître tout être humain comme un frère, comme un fils bien aimé, autant que moi !
Oui, chers Amis, laissez-vous réconcilier avec Dieu, avec Dieu tel qu’il se révèle et non tel que nous l’imaginons faussement. Il nous aime de toujours à toujours. Il agrandit nos cœurs aux dimensions du sien en nous invitant à aimer tout homme comme un frère.
Mes amis : laissez-vous réconcilier avec Dieu : Vous êtes aimés par Dieu comme un fils. Vous n’êtes pas trop bas pour lui. Il vous invite à aimer tout homme comme son fils, comme votre frère, votre sœur. Il agrandit votre cœur aux dimensions du sien. Laissez-vous réconcilier avec Dieu. Laissez-vous aimer par Dieu.
+Georges Pontier, administrateur apostolique de Paris