Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe des Familles organisée par l’Association des Parents d’élèves de l’Enseignement Libre de Paris (APEL) au Sacré-Coeur de Montmartre
Samedi 18 janvier 2025 - Sacré-Coeur de Montmartre (18e)
– 1e Semaine du Temps Ordinaire – Année C
- He 4,12-16 ; Ps 18 B,8-10.15 ; Mc 2,13-17
Ce passage de l’Évangile que nous venons d’entendre - nous sommes au début du temps ordinaire de la liturgie après avoir vécu les quelques semaines du temps de l’Avent et du temps de Noël - est au début du ministère de Jésus. Il commence à aller à la rencontre des uns et des autres. Il commence à adresser des paroles qui font du bien et qui suscitent autour de lui beaucoup de mouvements favorables. Il commence à faire des gestes qui sont repérés, reconnus, regardés, observés de près, et on voit ici un petit groupe de gens qui sont soucieux, qui regardent Jésus et se disent : « Celui-là qu’est-ce qu’il fait ? Où a-t-il appris sa foi et sa religion ? Il va avec ceux qui ne sont pas dans le groupe des purs, de ceux qui observent la Loi, de ceux qui se sentent touchés par la Parole de Dieu. Il va dans le groupe des pécheurs, il va avec ceux qui ne se comportent pas bien. » On voit qu’il y a toujours, dans l’existence, des gens qui, comme cela, regardent le comportement des autres, par exemple celui des personnalités publiques. Jésus est déjà de ceux-là : il fait déjà partie de ceux que l’on regarde, parce qu’il prend la parole, parce qu’il se montre, parce qu’il fait du bien ici et là et donc on observe ses faits et gestes. C’est très difficile de tâcher d’être des fidèles autour de Jésus parce que justement on se propose d’être un peu des exemples à la suite de Jésus. Et d’être le disciple de celui qui va avec les pécheurs, cela peut être compliqué.
En tout cas, Jésus sait qu’on le regarde, il entend les paroles qui se disent de lui. Et, non pas qu’il n’en tienne pas compte, il suit son chemin. Il sait qu’on risque de le blâmer, de le critiquer. Il comprend qu’il y a autour des lui des hommes et des femmes qui ont envie de le mettre dans des contradictions, qui ont envie de le juger, de juger son action et à la mesure dont eux-mêmes jugent ce qui est bien et mal. Et Jésus veut réformer cela : il veut dire que tous sont appelés à suivre la Parole de Dieu. Tous, même si jusqu’à présent leur vie n’est pas convenable. Tout le monde peut entendre l’appel de Dieu à un moment de sa vie, n’importe quand, et ceci est très heureux, ceci nous rassure, ceci nous permet de nous dire : « Moi je ne suis pas parfait non plus. Je suis content d’être le disciple de quelqu’un qui dit : tu peux avancer sur le chemin de Dieu même si tu juges que tu n’es pas arrivé à la perfection. » Jésus poursuit son chemin et affirme haut et clair que son but n’est pas de rassembler ceux qui déjà se savent parfaits, ceux qui déjà ont le sentiment de tout bien faire, de respecter la Loi, d’aimer les autres comme il faudrait. Il sait qu’il va aller chercher ceux qui désirent changer, ceux qui désirent être transformés, ceux qui acceptent de se laisser convertir. « Je ne suis pas venu appeler les gens de biens, je ne suis pas venu appeler ceux qui se croient parfaits, je ne suis pas venu appeler les gens en bonne santé, dit-il, mais les pécheurs, mais les malades, mais ceux qui savent qu’ils ont besoin de Dieu pour avancer. »
Dans l’Enseignement catholique, d’une certaine façon, les choses se passent aussi ainsi. Il y a bien des gens qui n’auraient pas envie d’entendre trop parler de Jésus, y compris dans l’Enseignement catholique mais aussi autour et en-dehors, des gens qui disent : « Pourquoi y a-t-il un Enseignement catholique ? Pourquoi des familles veulent-elles choisir l’Enseignement catholique ? » Eh bien justement pour aller sur le chemin de Jésus et, ne se sachant pas tout à fait parfaits, acceptent de se laisser transformer par lui.
N’ayons pas peur ! Même si autour de nous, dans la société dans laquelle nous vivons, on voudrait faire taire l’Évangile, on voudrait ne pas entendre parler de Jésus, on voudrait éviter d’avoir à parler de Dieu. Dans notre société, et l’Enseignement catholique reflète l’état de la société aussi, on voudrait bien pouvoir mettre Dieu, Jésus, l’Évangile de côté. N’ayons pas peur : nous sommes les disciples de celui qui marche sur le chemin et qui fait entendre la voix de Dieu, la voix de l’Évangile, la voix du respect de tout autre, la voix de l’accueil maximal de tous pour écouter sa Parole, pour se laisser transformer. N’ayons pas peur de cela !
Nous entendons dire que, pour être dans la note d’une société bien-pensante, il faudrait oublier la religion, il faudrait oublier le bien, il faudrait oublier l’Évangile et le Seigneur Jésus. Mais non ! Nous allons continuer ensemble à marcher, à accueillir la Parole de Dieu, à la faire résonner autour de nous. Nous savons bien qu’il est possible de ne pas l’accueillir. Nous savons bien qu’il est possible de ne pas la comprendre. Nous savons bien que Dieu laisse la liberté de ne pas être des disciples de Jésus. Mais si nous choisissons de l’être n’ayons pas peur, ne craignons pas d’être de ceux qui, tout simplement, font entendre la Parole de Dieu. Et l’écouteront tous ceux que Dieu voudra mettre sur le chemin. L’écouteront tous ceux qui se sentiront disposés à changer quelque chose dans leur vie et à écouter une Parole qui sauve.
Que le Seigneur soit avec vous, tous, qu’il vous permette de garder ce courage d’être des disciples de Jésus. Qu’il vous permette d’être fiers d’être des disciples de Jésus, non pas pour porter la contradiction partout, mais pour être des disciples paisibles qui n’ont pas peur d’être ce qu’ils sont. Nous en demandons la grâce aujourd’hui à la Vierge Marie, Mère de l’Unité, et au Seigneur lui-même qui nous adresse cette Parole : « C’est pour tous que je suis venu, et notamment pour ceux qui savent qu’ils ne sont pas toujours dans le bon chemin mais qu’ils ont besoin d’être convertis ».
+Laurent Ulrich, archevêque de Paris