Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe à Saint-Antoine de Padoue à l’occasion de la fête patronale

Vendredi 13 juin 2025 - Saint-Antoine de Padoue (15e)

 Voir l’album-photos de la Fête patronale de Saint-Antoine de Padoue 2025.

 Saint Antoine de Padoue
 2 Co 4, 7-15 ; Ps 115, 10-11.15-18 ; Mt 5, 27-32

Cela fait 800 ans que saint Antoine est populaire dans l’Église, il a été canonisé très peu de temps après sa mort. Et c’est une joie de voir que son nom évoque tellement de joie dans la vie des hommes et des femmes depuis ce temps ! Vous les représentez bien, aujourd’hui, manifestant que ceux qui suivent la voie du Seigneur sont heureux de savoir avec eux tant de saints et de saintes qui les ont précédés. Et aussi des saints et des saintes qui sont ceux d’aujourd’hui, avec lesquels nous marchons, sans savoir s’ils seront un jour béatifiés ou canonisés mais dont nous pressentons, dont nous comprenons qu’ils ont la sainteté dans le cœur et qu’ils ont le désir de ressembler à Jésus et de le suivre, le désir d’accéder au Royaume de Dieu et de sa sainteté, le désir de vivre sous l’influence de l’Esprit Saint qui change nos cœurs, qui nous fait devenir meilleurs chaque jour : capables d’intercéder pour les autres, de prier pour les autres, ce que vous avez fait avec vos nombreuses intentions de prière ici déposées ; capables d’aimer le mieux possible en oubliant toutes les épreuves, et les malheurs et les malédictions parfois que l’on se fait les uns les autres dans la relation entre hommes et femmes, entre humains. Voilà, nous sommes heureux d’être avec saint Antoine et vous faites bien d’être là.

De saint Antoine, je voudrais simplement retenir ceci : quand il a commencé à vouloir donner sa vie à Dieu, quand il était chez lui sur sa terre natale de Lisbonne, du Portugal, il a d’abord voulu être un membre de la famille religieuse de saint Augustin. Et voilà qu’aujourd’hui cette famille religieuse est illustrée tout spécialement par notre nouveau pape, Léon XIV, et c’est une joie. Des augustins, il n’y en n’a pas beaucoup en France ; il y en a encore pas mal dans d’autres pays du monde, mais peut être qu’on ne connaît pas beaucoup ceux qui suivent cette règle dite de saint Augustin, que les dominicains suivent par exemple, cette règle de vie qui demande de donner au Christ, de donner aux autres, d’agir pour annoncer l’Évangile. Que notre pape soit ainsi issu de cette famille religieuse nous touche et nous nous disons que saint Antoine de Lisbonne, saint Antoine de Padoue a commencé sa vie comme cela. Et puis touché par la parole de saint François d’Assise, sensible à l’engagement religieux de quelques frères qui avaient été martyrisés, il a voulu se rapprocher de cette nouvelle famille religieuse, les franciscains, et il est allé rejoindre saint François à Assise. Comme il était grand prédicateur, il a été capable de toucher les cœurs. Il a été envoyé dans le nord de l’Italie et dans le sud de la France pour parler alors qu’il y avait, comme souvent dans la vie de l’Église, une crise, une crise importante qui éloignait un certain nombre de gens de l’Église catholique. Il s’est installé dans le sud-ouest de la France pour prêcher. Non pas pour combattre par les armes mais pour prêcher et pour montrer, par sa vie, quel bienfait le Seigneur lui faisait.

D’abord tirée du Livre d’Isaïe, cette prophétie qui dit « L’Esprit du Seigneur est sur moi et il m’a envoyé aux pauvres la Bonne Nouvelle », illustre ce qu’a fait saint Antoine, en permanence : avoir le désir au cœur et la joie si forte qu’il soit bien entendu que la seule annonce qui compte c’est d’annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres. C’est-à-dire la Bonne Nouvelle à ceux qui souffrent ; la Bonne Nouvelle à ceux qui croient qu’ils sont seuls ; la Bonne Nouvelle à ceux qui s’estiment en grande crise intérieure ; la Bonne Nouvelle à ceux qui ne savent pas où est le chemin dans la vie ; la Bonne Nouvelle à ceux qui souffrent de ne pas être aimés ; la Bonne Nouvelle à ceux qui sont divisés de leurs frères et de leurs sœurs dans leur famille, dans la société. Aujourd’hui, il y a tellement de monde qui semble errer dans la vie, qui semble ne pas bien savoir quel chemin suivre, qui semble ne pas être apaisé, qu’il est bon qu’il y ait des disciples qui annoncent cet Évangile, et qui disent : « Tu es aimé, vous êtes aimés, tu es réunifié intérieurement, tu es capable de pardonner et de recevoir le pardon des autres, tu peux te confier jour après jour au Seigneur. »

Voilà ce qu’a fait saint Antoine partout où il est passé, et il a fait du chemin. Il a écouté l’évangile que nous venons d’entendre : le Seigneur choisit encore 72 disciples. Parce qu’il en avait déjà choisi 12 pour être ses apôtres, mais il en a choisi d’autres plus nombreux pour aller sur les chemins et pour signifier cette chose toute simple : « Le règne de Dieu est tout proche de vous. » Cela veut dire : Dieu n’est pas loin, Dieu n’est pas si élevé par rapport à nous que nous ne puissions pas l’atteindre. Dieu se met lui-même à disposition de tout le monde. Bien sûr c’était le cas même de Jésus qui, venant du Ciel, venant de Dieu, est venu au milieu de nous, au milieu des hommes. À ses disciples, Jésus demande donc : « Dites simplement le règne est là tout proche de vous, il est avec vous, soyez sûr que Dieu ne vous oublie pas, soyez sûr que Dieu est là, dans le monde qui a l’air de l’ignorer. » Parce que c’est vrai que notre monde a l’air d’ignorer Dieu : on peut écouter les nouvelles tous les jours, il n’est pas souvent question de Dieu et parfois il est question de Dieu en mal. Et on fait remarquer qu’il y a des religieux qui sont animés de mauvaises pensées, qui sont violents, qui veulent imposer un Dieu dur mais, nous, nous proposons un Dieu proche, un Dieu aimant, un Dieu fraternel, un Dieu qui se manifeste à nous comme un homme : Jésus. Un Dieu qui se fait comprendre, un Dieu qui ne dit pas des choses si difficiles que cela.

Le monde est indifférent à Dieu, il est aussi un peu compliqué. Dans la vie dans laquelle nous sommes il y a bien des choses compliquées pour beaucoup ; la société dans laquelle nous sommes est bardée d’assurances de toutes sortes, bardée de techniques et de technologies qui ont l’air de faciliter la vie de certains mais de la compliquer à d’autres. Ce que nous avons à dire, ce que nous avons à montrer à travers notre vie à nous, c’est la simplicité de Dieu qui se laisse aimer.

Et enfin, de la Lettre de saint Paul, nous retenons que c’est le Christ, le Christ lui-même, le Christ seul qui nous conduit à Dieu. Le Christ venu au milieu de nous, le Christ venu souffrir pour nous, le Christ qui donne toute sa vie, jour après jour, avec un grand amour et un grand désir de se donner. Voilà ce que nous entendons, voilà ce que saint Antoine de Padoue a entendu : le Christ seul comble ma vie, le Christ la remplit tout entière, le Christ est don de soi, et le Christ m’invite à être un don pour les autres, un don de paix, un don de joie, un don d’amour, un don de fraternité, un don de simplicité.

Écoutons ces paroles qui sont celles de la vie même de saint Antoine, qui sont la vie même de tant de saints et de saintes que nous aimons. Vous avez bien fait d’être là, laissez-vous inspirer par la simplicité de saint Antoine, laissez-vous inspirer par son amour des autres, laissez-vous inspirer par son désir d’annoncer que le Christ est capable d’occuper, de remplir toute notre vie pour nous donner aux autres. Nous sommes comme les 72 disciples et nous sommes bien plus nombreux ici ce soir : quelle chance pour le Seigneur Jésus de nous avoir avec lui ; quelle chance pour nous d’être avec le Seigneur Jésus et de l’entendre nous appeler.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

Homélies

Homélies