Jacques, enfant de la Goutte d’or et fils de Dieu

Paris Notre-Dame du 15 janvier 2015

Né au Sénégal, Jacques est arrivé en France à l’âge de 12 ans où il a été chaleureusement accueilli à St-Bernard de la Chapelle. Aujourd’hui salarié d’une association de la Goutte d’or et impliqué dans la vie de sa paroisse, il porte une attention particulière à l’accueil des migrants. Rencontre.

Trente ans après son arrivée dans le quartier, Jacques est toujours paroissien de St-Bernard de la Chapelle (18e), qu’il fréquente aujourd’hui avec son épouse et ses trois enfants.
© Anne-Louise Sautreuil

L’église St-Bernard de la Chapelle (18e), sa salle paroissiale, ses ruelles adjacentes et son petit square... Jacques, 43 ans, les connaît par cœur. C’est là qu’il s’est installé, il y a un peu plus de trente ans, avec ses parents et 6 frères et sœurs, après avoir quitté le Sénégal. « À Dakar, il était impensable de manquer une messe, même si on était fan de football, s’amuse- t-il. En arrivant en France, nous étions sans ancrage, mais nous sommes allés à la rencontre de nos frères dans la maison du Seigneur. » L’accueil qui leur est réservé le marque profondément. « J’ai tissé des liens forts avec les prêtres et certains paroissiens. Il y avait des gens formidables, des croyants qui militaient pour défendre leurs valeurs. » Très vite, l’adolescent trouve ses marques, participe aux activités paroissiales et rejoint l’association sportive et culturelle « Les enfants de la Goutte d’or » dont il est devenu, il y a quelques années, le coordinateur sportif. Afin de rendre un peu de ce qu’il a reçu, mais aussi pour vivre en accord avec sa foi. C’est ainsi qu’il a décidé de s’investir auprès des habitants de son quartier, et de ceux qui, comme lui, sont venus du bout du monde.

« Recevoir et apaiser »

Au sein de son association comme à la paroisse, Jacques s’emploie à lutter contre l’exclusion dans un quartier où les difficultés sociales et les différences culturelles sont nombreuses. Quand un nouveau venu de Biélorussie, d’Algérie, du Mali ou encore du Congo fait ses premiers pas dans le club de foot des « enfants de la Goutte d’or » dont il s’occupe, il le reçoit, l’apaise et veille à ce qu’il soit accepté par les plus anciens. Et lorsqu’une nouvelle famille de migrants se présente à la messe, il tient à aller à sa rencontre. « Nous devons être attentifs à tous, explique-t-il, avec chaleur et détermination. C’est ce qui nous permet de rester proches du Christ. » À ses yeux, « en ce sens, la Journée de prière du migrant rappelle que l’étranger est un frère. Certains sont persécutés dans leur pays, d’autres aspirent à de meilleures conditions de vie, trouvons les mots et le temps de leur dire qu’ils sont les bienvenus ».

Un apport pour les communautés

Autour de lui, Jacques affirme ne pas ressentir de tensions communautaires. « Le plus important est la fraternité. À l’église, le service social vient en aide à de nombreux musulmans. Nous donnons sans distinction. » Il reconnaît, cependant, que l’arrivée de migrants peut susciter des réflexes de repli sur soi. Mais il insiste sur ce que ces voyageurs, venus avec leurs rites et leurs cultures, ont à apporter aux communautés. Lui qui a connu les messes « joyeuses » et « festives » de Dakar invite les paroissiens à faire preuve d’ouverture. « Ils apportent du dynamisme, un certain renouveau, analyse-t-il. C’est la même Église, mais ils aimeraient parfois une ambiance plus conviviale. En arrivant, ils prennent leur temps avant de s’investir ou d’oser donner leur avis. Ils restent un bon moment en position d’‘invités. » Mais après quelque temps, à l’image de Jacques, ils deviennent parfois eux aussi des paroissiens engagés. • Par Anne-Louise Sautreuil

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