Journée des aidants : « la maladie crée la solitude »
Paris Notre-Dame du 6 octobre 2022
Francisco Petite est diacre permanent à la paroisse St-Antoine des Quinze-Vingts depuis vingt-cinq ans. Auxiliaire de vie à domicile pendant vingt-neuf ans, il fera partie des intervenants de la Journée des aidants, organisée par le vicariat des Personnes handicapées et la pastorale de la Santé du diocèse de Paris, le 8 octobre, à 15h, à la crypte de St-Dominique.
Paris Notre-Dame – Pourquoi organiser une Journée diocésaine à destination des aidants ?
Francisco Petite – Nous avons choisi pour thème ce verset de Marc – « Venez, reposez-vous un peu ! » (Mc 6, 31) – qui répond bien à un des besoins des aidants familiaux, à savoir prendre un temps de répit, de repos, de partage et de prière. Comme ancien auxiliaire de vie, je serais surtout là pour témoigner de mon expérience et écouter les uns et les autres.
P. N.-D. – S’inquiéter du sort des aidants est assez nouveau…
F. P. – Pendant des années, on a complètement occulté les aidants familiaux, en prenant essentiellement en compte les personnes malades ou handicapées. Or, l’expérience le démontre bien, ces personnes finissent par se fatiguer, s’user dans un accompagnement qui dure le plus souvent plusieurs années. Lorsqu’on est seul pour s’occuper de son conjoint, de son épouse, de son enfant, c’est extrêmement difficile car il faut une vigilance et une disponibilité de tous les instants, qui ne s’arrête pas la nuit et ne permet pas de prendre de vacances. Il n’est pas si rare que la personne aidante décède avant la personne malade, tellement l’épuisement physique et psychologique est profond. Il est très important que toute la société réfléchisse à la manière de soulager ces personnes.
P. N.-D. – Comment expliquer cette solitude ?
F. P. – La maladie crée la solitude. Au début, l’entourage est compatissant et propose de l’aide, mais au fur et à mesure du temps, les propositions se raréfient. La personne aidante est tellement accaparée par les soins et les demandes de la personne souffrante qu’elle n’est plus disponible pour son propre cercle d’amis et perd peu à peu le contact de ses proches. Il y aussi la peur de proposer son aide, d’entrer dans l’intimité d’une famille, d’un malade ; peur, aussi, de la chute, de devoir manipuler un lit, un fauteuil, sans avoir appris à le faire… Tous ces freins sont surtout les symptômes d’une peur plus profonde, celle d’être confronté à cette réalité, et de sortir de ce temps donné triste ou abattu.
P. N.-D. – Quel rôle peut jouer l’Église ?
F. P. – C’est surtout à la société d’élargir son regard. On a un regard sur les malades, il faut maintenant inclure les aidants. Surtout qu’il y a beaucoup de droits qui existent pour les malades dans l’accompagnement à domicile – auxiliaire de vie, possibilité d’une pédicure, d’une coiffure – qui permettent aux aidants de pouvoir prendre l’air, s’oxygéner deux ou trois heures. C’est primordial ! Pour revenir sur la place de l’Église, je crois que son rôle fondamental est dans le soutien spirituel. Les communautés doivent prier pour leurs malades. L’Église porte une parole d’Espérance qu’il faut rappeler : le Christ porte nos souffrances, il est présent au coeur de la souffrance des hommes. L’Église doit être une main tendue, fraternelle, auprès des personnes en situation de maladie et de grande difficulté. C’est ce que mettent en œuvre les associations catholiques caritatives et les initiatives paroissiales de solidarité. Les visites aux malades et aux personnes isolées permettent de maintenir un lien avec le reste de la communauté et d’offrir, éventuellement, un espace de parole. Il est très important de ne pas rompre le lien, c’est la mission à laquelle nous, chrétiens baptisés, sommes tous appelés.
Propos recueillis par Charlotte Reynaud
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