La théologie du corps

Paris Notre-Dame du 12 février 2015

P.N.-D. – La préparation de la deuxième phase du Synode des évêques sur la famille, prévue en octobre 2015, est une occasion de (re)découvrir « la théologie du corps ». Dans quelle mesure, ce corpus de catéchèses dispensées par saint Jean-Paul II, de 1979 à 1984, renouvelle- t-il l’enseignement de l’Église sur le corps ?

P. Philippe Marsset, curé de N.-D. de Clignancourt (18e).
© SPM

P. Philippe Marsset – La révolution de cette pensée est de montrer pourquoi Dieu nous a créés sexués – c’est-à dire de deux sexes différents – et comment notre corps est un langage à la fois charnel et spirituel. C’est l’enseignement le plus travaillé et le plus spirituel sur ce sujet de la part d’un pape. Il complète l’encyclique Humanae vitae du pape Paul VI (1968), en développant une argumentation anthropologique et philosophique qui manquait. Il n’est pas anodin que le pape Jean-Paul II ait choisi le genre de la catéchèse, qui est moins autoritaire qu’une encyclique, en faisant appel à la réflexion des fidèles. Le génie de sa théologie est d’offrir, à partir de l’Écriture Sainte (livre de la Genèse, Cantique des cantiques, chapitre 5 de l’Épître aux Éphésiens, etc.) un regard positif et sensé sur le corps et la sexualité, à l’opposé du mépris en vogue à d’autres époques de l’Église. Sa lecture originelle et originale met en parallèle le lien qui unit l’homme et la femme avec l’alliance entre Dieu et l’humanité.

P. N.-D. – Quels sont les grands principes de cet enseignement sur le corps ?

P. P. M. – Jean-Paul II ne dit rien de la sexualité qui ne touche l’ensemble de l’homme (corps, esprit, relation, sensibilité et âme). Nos corps sexués sont des dons que Dieu nous a faits pour exprimer toute notre humanité et non seulement une capacité biologique. Ce pape montre, à l’aide de la Bible, que nous sommes des êtres créés dans une unicité – autrement dit en un seul exemplaire – pour construire à la fois la relation avec un partenaire sexué autre et celle avec Dieu. Ainsi, ce que l’homme vit dans sa sexualité est appelé à être aussi un langage spirituel. Il nous enseigne également l’égalité complémentaire des deux sexes : Ève est de la même chair qu’Adam, les deux sont attirés l’un par l’autre pour s’unir. Cette unité remonte aux bonnes origines de l’humanité. L’indissolubilité du mariage n’est donc pas un défi impossible mais une vocation à réussir. Enfin, Jean-Paul II décrit avec des mots très adaptés à notre époque, le lien entre l’époux et l’épouse sur le modèle du lien entre Jésus et son Église.

P. N.-D. – En quoi ces catéchèses de Jean-Paul II peuvent-elles inspirer les hommes d’aujourd’hui ?

P. P. M. – Ce sont des textes incontournables pour comprendre l’enseignement moral de l’Église. Ils peuvent toucher tout le monde – les adolescents, les célibataires, les personnes mariées, etc. – et transformer nos vies, car ils nous font « penser » et pas seulement « obéir ». Ils nous font réfléchir sur la manière de concevoir sa fidélité, sa fécondité, le respect de son corps et celui de l’autre, l’égalité entre l’homme et la femme, etc. Cette théologie du corps fait respirer. Elle est à l’opposé d’une morale contraignante, car elle va à la source biblique et anthropologique de notre humanité. Elle nous fait découvrir qui nous sommes profondément. C’est une pensée qui amène au seuil de la liberté pour faire des choix positifs, constructifs dans le domaine de la vie sexuelle. Elle me semble puissamment nécessaire dans notre société. • Propos recueillis par Céline Marcon

À lire :

 La théologie du corps, de Jean-Paul II (traduction d’Yves Semen), Éd. du Cerf, 2014.
 La théologie du corps pour les débutants, de Christopher West. Éd. de l’Emmanuel, 2014.

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