« Nous évoluons car la situation change sur le terrain »
Paris Notre-Dame du 24 juin 2021
Une nouvelle saison vient de s’achever pour Hiver solidaire, lancé il y a treize ans par le diocèse de Paris pour accueillir, durant la période hivernale, des personnes de la rue dans les paroisses. Un bel élan de solidarité, qui évolue au fil des ans. Le point avec Michel de la Giraudière, en charge de l’opération.
Paris Notre-Dame – Combien de paroisses se sont impliquées cet hiver et combien de personnes ont pu être accueillies ?
Michel de la Giraudière – Cet hiver, 37 paroisses se sont impliquées contre 38 en 2019-2020, une paroisse étant empêchée par des travaux. La pandémie n’a donc pas réussi à bloquer la générosité des gens, ce qui est formidable. En terme de bénévoles, chaque paroisse tourne en moyenne avec 80 à 90 bénévoles, 80 étant un nombre minimum pour que cela ne devienne pas une contrainte pour les personnes engagées. La Covid-19 a été compliquée à gérer, mais elle a permis de fixer des règles et de mettre en place un médecin référent. Pour respecter les contraintes sanitaires, nous avons demandé aux paroisses d’ajuster le nombre de leurs accueillis. Nous avons hébergé moins de monde mais les liens créés n’en ont été que plus forts. Du côté du diocèse, nous avons également fait un gros travail sur les protocoles vis-à-vis des paroisses, en lien avec l’Agence régionale de santé, qui s’est engagée à accompagner dans les 24 heures tous les accueillis qui auraient la Covid-19. Et c’est ce qui a été fait, ce qui a rassuré les bénévoles qui craignaient qu’ils ne se retrouvent à la rue.
P. N.-D. – Cela fait treize ans qu’Hiver solidaire a été lancé. Qu’est-ce que vous souhaitez faire évoluer dans les années à venir ?
M. G. – Si nous évoluons, c’est parce que la situation change sur le terrain, notamment à cause de la présence de plus en plus nombreuse de femmes à la rue. Elles représentent 20% des personnes de la rue mais elles sont souvent mieux prises en charge par les services de l’État. Plusieurs paroisses comme St-François de Molitor (16e), cette année, ou N.-D.-de-la-Croix (20e) et la Trinité (9e), les années précédentes, ont fait le choix de n’accueillir que des femmes et d’autres paroisses se posent la question, qui n’est pas simple, car l’accueil des femmes est plus compliqué, leurs attentes étant différentes. Il nous faut réfléchir aussi à l’accueil des migrants, une population qui n’a pas le même parcours que les personnes de la rue. Celui qui est dans la rue, c’est souvent à cause d’une chute dans son équilibre affectif, familial ou d’une perte d’emploi. Parfois aussi à cause de troubles psychologiques. En revanche, le migrant est quelqu’un qui veut s’en sortir. S’il est à la rue, c’est parce qu’il a tout misé sur son passage en Europe. Ce sont des personnes souvent plus volontaires, qui ne peuvent pas comprendre que quelqu’un soit à la rue par choix. Pour eux, la rue n’est qu’une étape avant de rebondir et de retrouver un emploi. Ce qu’il nous faut aussi améliorer, c’est la formation de nos bénévoles, qui sont des gens de bonne volonté mais qui n’ont pas toujours les bons réflexes pour accueillir et parler à une personne de la rue. Il est important qu’ils suivent une formation, et celle offerte par les Captifs est remarquable. Ces formations sont proposées par le diocèse à tous les bénévoles, sur une soirée, en début de saison et chaque paroisse peut aussi demander une formation spécifique, sur l’alcoolisme, sur la violence ou sur les troubles psychiques.
Propos recueillis par Priscilia de Selve @Sarran39
Hiver solidaire en chiffres
- 37 paroisses impliquées en 2020-2021.
- 176 accueillis.
- 3100 bénévoles.
- À l’issue de l’hiver, 117 personnes ont pu trouver un toit pérenne ou provisoire.
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