Steven Labat : Pauvre et indigne
Paris Notre-Dame du 17 juin 2021
Né à Montréal dans une famille égyptienne d’origine syro-libanaise et de rite grec-melkite catholique, Steven Labat s’apprête à être ordonné prêtre au sein de la Communauté de l’Emmanuel.
« Attention, ils vont faire de toi un prêtre. » La phrase, prononcée sous forme de boutade par son père, un jour où Steven servait la messe, deviendra, le 26 juin prochain, réalité. Rien, pourtant, ne destinait ce fils de médecin égyptien, né à Montréal (Canada) dans une famille d’origine syro-libanaise, de rite grec melkite catholique, à devenir un jour prêtre du diocèse de Paris, ordonné pour la Communauté de l’Emmanuel. C’est au Caire, en Égypte, qu’il grandit avec son frère et sa sœur, après plusieurs années au Canada. Après une scolarité chez les Jésuites, Steven entame des études de droit, sans grande conviction. Si l’idée du sacerdoce l’a un temps attiré, elle n’est plus à l’ordre du jour.
À 18 ans, Steven se cherche, pense à une carrière artistique. Déprime. « Une nuit, raconte-t-il, le sentiment que ma vie n’avait aucun sens a été si fort que j’ai failli commettre un geste désespéré. C’est alors que j’ai entendu une phrase : “Steven, n’aie pas peur. Il y a une place pour toi avec moi.” » Une heure plus tard, alors que l’aube se lève à peine, un prêtre de l’Emmanuel le contacte. « Et là, je lui raconte tout. » Le prêtre lui propose alors de partir un an en Allemagne dans une école d’évangélisation de la communauté. « Nous étions une vingtaine de jeunes, de huit nationalités différentes, avec un projet de comédie musicale. » Lors d’un séjour à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire), il tombe sur la prière d’offrande à la divine miséricorde de saint Claude la Colombière. « Là je comprends que tout ce temps, j’avais manqué de confiance dans la miséricorde du Seigneur. Que j’étais pécheur, “un pauvre type” comme disait Pierre Goursat, fondateur de l’Emmanuel, pauvre et indigne, mais que Dieu m’aimait. » La question du sacerdoce se repose alors à lui, notamment au sein de son rite, qui permet l’ordination d’hommes mariés.
De retour en Égypte, Steven termine ses études de droit. Le pays bruisse du vent de révolte soufflé par le printemps arabe. Avec d’autres étudiants, Steven campe place Tahrir et rêve de prendre part à la société civile pour soutenir cette jeune démocratie à la si longue histoire. Il s’engage également au sein de la Communauté de l’Emmanuel, sans avoir tranché la question du sacerdoce. C’est en 2014, lors d’une retraite, que celle-ci se précise. « Je sens Jésus en face de moi qui me pose la question : veux tu me suivre dans le sacerdoce ? Et du fond du cœur, j’ai répondu oui. »
Tout s’enchaîne dès lors rapidement : l’annonce à ses parents, le départ en Belgique pour une année de propédeutique à Namur. Mais une question reste encore indécise, celle du célibat. « J’ai dit au Seigneur, c’est trop dur. Il faut que tu me montres la joie que cela procure. » C’est la vie d’une carmélite du XIXe siècle, d’origine égyptienne comme lui, de rite melkite comme lui, qui lui fournira une réponse inspirante. « J’ai compris que mon chemin, comme le sien, passait par une consécration totale à Dieu et donc par le célibat consacré. »
À Paris depuis 2017, Steven a servi à St-Nicolas-des-Champs (3e) et dans la paroisse grecque-melkite catholique de St-Julien-le-Pauvre (5e ), sans rien renier de ses racines. « Bi-rité » désormais, il approfondira, après son ordination, sa formation liturgique dans le rite melkite durant un an.
Priscilia de Selve
Phrase d’ordination
« JE SUIS m’a envoyé vers vous » (Ex 3, 14).
Repères
– Naissance : le 28 janvier 1990, à Montréal (Canada).
– Ordination diaconale : le 15 novembre 2020, à la chapelle de l’Archevêché de Paris (7e).
– Première messe : le dimanche 27 juin à 12h30, à St-Julien-le-Pauvre (5e)
Steven Labat a été victime d’une chute mortelle dans le Sinaï le 8 mai 2022. Ses obsèques ont été célébrées en Égypte et une messe en sa mémoire a été célébrée à Saint-Nicolas des Champs (3e) le 21 mai 2022.
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