Une nouvelle étape dans la lutte contre les abus sexuels

Paris Notre-Dame du 25 mars 2021

Le diocèse de Paris vient de mettre en ligne sur stopabus.dioceseparis.fr un site internet d’information et de formation sur les abus sexuels à destination des enfants, des adolescents et des adultes . Ce site recense les nombreux outils déjà disponibles afin de sensibiliser à ce sujet. Les explications de Mgr Thibault Verny, évêque auxiliaire de Paris et responsable diocésain de la coordination de la lutte contre les abus.

© Elisabeth Laneyrie

Paris Notre-Dame – Beaucoup de sites d’information existent déjà dans le domaine de la lutte contre les abus sexuels. Pourquoi le diocèse de Paris a-t-il souhaité lancer ce nouveau site, Protéger l’enfance ?

Mgr Thibault Verny – C’est vrai qu’il existe beau-coup de ressources, en particulier sur internet. Mais il n’est pas toujours simple de s’y retrouver, ni de dénicher l’outil adapté pour chaque public. Aussi nous avons voulu mettre en lumière et valider des vidéos qui existent et les proposer de façon synthétique et pédagogique. Pour cela, nous avons conçu trois « salles » différentes : pour les enfants, pour les adolescents et pour les adultes. Les sources sont très variées : Conseil de l’Europe, Centres ressources pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles (CRIAVS), d’autres diocèses comme celui de Lyon, etc. Nous avons également ajouté un volet formation avec des vidéos plus longues et les textes de loi.

P. N.-D. – Comment respecter les difficultés propres à chaque âge ?

T. V. – Pour les plus jeunes et les adolescents, l’enjeu de ce site est de faciliter le dialogue avec les parents. Tendre la perche, sans être intrusif, afin que l’enfant n’hésite pas à s’en ouvrir à un adulte. L’une des vidéos destinées aux adolescents montre un jeune qui s’est fait abuser lors d’une soirée trop arrosée et qui est muré dans sa honte. Pour les adultes, la problématique est autre. La première vidéo, très efficace, souligne l’importance de casser la loi du silence et de parler quand on a connaissance d’un abus sexuel. Il faut savoir aussi dire « j’ai besoin d’aide ». Si cela remue quelque chose que j’ai subi dans mon enfance, que dois-je en faire ? Ou alors mon enfant m’a confié quelque chose, que faire ? Autre situation évoquée ici, et peu ailleurs, celle de l’adulte qui a des pulsions pédophiles. C’est pour eux que nous avons mis en avant le 0 806 23 10 63, nouveau numéro d’appel national, gratuit et confidentiel, pour éviter le passage à l’acte. Si on a, aujourd’hui, à peu près conscience du drame qui se joue chez une victime, on est au début de la réflexion et de la prise en compte de ce qu’est un auteur. Comment l’accompagner, prévenir le geste ou prévenir la récidive.

P. N.-D. – Au fil des ans, le diocèse de Paris, la Conférence des évêques de France ont mis en place des outils contre les abus sexuels et le suivi des victimes. Avez-vous l’impression que ceux-ci portent des fruits ? Que la parole se libère ?

T. V. – Oui, elle se libère, comme dans des pans entiers de la société, dans le sport, la politique, dans le monde de la culture... Est-elle complètement libérée ? Je ne sais pas. Dans la très grande majorité des cas, l’auteur des abus fait partie du cercle de confiance de la victime. Ce n’est pas facile dès lors de briser le silence, en particulier dans les familles. Nous avançons avec la société. L’Église avance, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) en est un bel exemple. Mais ma grande crainte est qu’on se dise : « Ça y est, c’est fi ni. On peut tourner la page. N’en parlons plus. » C’est pourquoi, j’aimerais qu’à partir de ce site soit proposée une e-formation à tous les accompagnateurs de jeunes au sein du diocèse, afin qu’ils aient le réflexe de ne pas rester seuls avec une information préoccupante, de toujours s’en ouvrir aux personnes compétentes. Si ce site permet d’éviter ne serait-ce qu’un cas, une situation dramatique, au moins aura-t-il servi à quelque chose.

Propos recueillis par Priscilia de Selve @Sarran39

Trouver la juste distance éducative
Arielle Esnault est coordinatrice du vicariat Enfance Adolescence. À ce titre, elle fait partie du conseil de vigilance du diocèse et a participé à la création d’une formation à destination des acteurs du monde éducatif.

« C’est au cours des réunions du comité de vigilance du diocèse qu’est ressortie la demande, venue du terrain, d’être sensibilisé et formé à la question des abus. L’intuition de Mgr Verny est qu’il fallait pour cela un lieu unique, où soient rassemblées toutes les informations nécessaires pour répondre aux différentes situations, d’où ce site Protéger l’enfance. Nous avons également créé en parallèle une formation en présentielle de trois heures sur la question de la juste distance éducative, à destination de tous ceux qui sont, de près ou de loin, en face de jeunes. L’idée est de les sensibiliser à ces sujets, qui ne se limitent pas à la question des abus, mais aussi à la détection des enfants en souffrance, aux règles à appliquer devant un enfant, à la question du cléricalisme, etc. Dans quelques mois, nous souhaiterions également pouvoir proposer sur le site un onglet de e-formation : un parcours plus accessible, qui s’adresserait à tous les animateurs… L’idée étant qu’à terme, tous ceux qui travaillent avec des enfants, au sein des aumôneries, des patronages, des Frats, des camps d’été ou des camps de ski… suivent cette e-formation, afin que nous soyons sûrs qu’ils aient bien compris un certain nombre de points pour être armés en face d’enfants. »

Vous souhaitez contacter le diocèse afin de signaler un abus ? Vous pouvez envoyer un mail à signalement@diocese-paris.net
 Voir le dispositif d’accueil et d’écoute du diocèse.

Stop aux violences sexuelles faites aux enfants, publié chez Bayard en 2019, est en téléchargement gratuit sur le site bayard-jeunesse.com/infos/wp-content/uploads/2018/10/Livret-STOP_aux-Violences_Sexuelles.pdf

Notre sélection

  • On ne touche pas ici ! : une vidéo du Conseil de l’Europe destinée aux tous jeunes enfants. Sobre, sans dialogue, elle permet de montrer de façon simple aux petits que leur corps est sacré et qu’ils peuvent dire non.
  • Le secret de Tom : dans cette vidéo éditée en partenariat avec l’Union israélienne des centres d’aide aux victimes d’agressions sexuelles, Tom, un jeune garçon, a été abusé par le grand frère d’un ami. Il réussit à en parler à sa maman. Accessible aux enfants à partir de 7 ans.

Voir le site stopabus.dioceseparis.fr

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