Homélie de Mgr Michel Aupetit - Messe des Cendres à Saint-Germain l’Auxerrois
Saint-Germain l’Auxerrois (1er) - Mercredi 17 février 2021
– Cendres
- Jl 2,12-18 ; Ps 50,3-6.12-14.17 ; 2 Co 5,20 à 6,2 ; Mt 6,1-6.16-18
Voici donc à nouveau les trois exercices que propose le Christ pour vivre heureusement ce carême. Nous pourrions poser la question de savoir lequel est le plus important. Y a-t-il une hiérarchie, un classement prioritaire entre ces différentes pénitences ? C’est une mauvaise question. Car cette question s’intéresse plus au moyen qu’à la fin. Comme si la manière de prier était plus importante que la rencontre avec Dieu, ou que la façon de communier était plus importante que de recevoir le Corps du Seigneur ou encore, aujourd’hui, de recevoir les cendres d’une manière un peu particulière comme le recommande le cardinal Sarah (préfet de la congrégation en charge de la liturgie), que de transformer son cœur pour accueillir la grâce divine. Cela veut dire que le comment faire est plus important que le pourquoi faire.
La bonne question serait pourquoi jeûner, pourquoi prier, pourquoi faire l’aumône ?
Et la meilleure question serait pour qui jeûner, prier et faire l’aumône ?
La réponse alors est simple : pour Dieu, seulement pour Dieu : « Revenez à moi de tout votre cœur » comme le dit le prophète Joël.
Jeûner ? Il ne s’agit pas de faire un régime pour perdre trois ou quatre kilos, pour se sentir mieux dans sa peau. Il ne s’agit pas non plus d’exclure des aliments que l’on désignerait comme impurs. Il s’agit d’un « jeûne sacré ». Sacré, c’est-à-dire qu’il nous fait entrer dans l’intimité de Dieu et nous rappeler que « L’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4,4).
Et ne s’agit pas non plus de manifester bruyamment son attachement à Dieu par une prière spectaculaire, mais de le rencontrer dans le secret, là où personne ne le voit, où nous ne sommes plus sous le regard des autres mais sous le seul regard de Dieu, humble, dépouillé, pauvre de mots et de pensées. C’est là que se manifeste la vérité de notre foi.
Il ne s’agit pas de faire admirer sa générosité ou de s’attirer la reconnaissance des pauvres. Saint Vincent de Paul recommandait à ses sœurs de se faire pardonner auprès des pauvres de leur venir en aide. Car nous croyons qu’en apprenant à les aimer, nous apprenons à aimer le Christ en vérité : « Ce que tu fais aux plus petits d’entre les miens c’est à moi que tu le fais ».
Car les trois formes de pénitences qui nous sont proposées, le jeûne, la prière et l’aumône sont un seul et même acte d’amour envers Dieu.
Dans ce carême nous allons entrer « dans le combat de Dieu », un combat contre le mal, la haine, la méchanceté, l’orgueil qui nous éloigne de Celui qui nous a aimés au-delà de toute mesure.
Alors, et alors seulement, le Vendredi Saint nous pourrons être au pied de la croix avec Marie, le cœur transpercé d’amour nous aussi, alors que nous recueillerons la goutte de sang que le cœur de Jésus a versé pour moi.
+Michel Aupetit, archevêque de Paris