Homélie de Mgr Michel Aupetit - Ordinations sacerdotales 2021 à Saint-Sulpice

– Voir l’album-photos et la vidéo de la célébration.

Messe d’ordinations sacerdotales de 12 séminaristes en l’église Saint-Sulpice (6e)
– Ac 12, 1-11 ; Ps 33, 2-9 ; 2 Tim 4, 6-8.17-18 ; Mt 16,13-19

En vous entendant répondre « me voici » à l’appel de Dieu, je ne puis m’empêcher de penser à cette parole de l’évangile : « Il en choisit Douze. » Oui, c’est bien Jésus qui nous choisit. Et pourquoi le fait-il ? La réponse de l’évangile est simple : « Pour être avec lui. »

Il s’agit d’abord de vivre dans l’intimité du Christ. Pour nous tous, elle se construit dans l’oraison, dans l’adoration, dans la fidélité au cœur à cœur avec lui. Mais maintenant, c’est surtout dans l’eucharistie que va s’accomplir cette intimité entre le prêtre et le Christ. Elle est tellement forte que c’est vraiment Jésus qui vient dire dans la bouche du prêtre : « Ceci est mon Corps. » Le prêtre ne pourrait pas prononcer ces paroles de manière authentique si le Christ n’était pas son meilleur ami, son ami le plus intime. Alors, vous pourrez célébrer pour le monde, sur le monde avec les baptisés qui s’offrent avec le Christ pour le salut de la multitude mais aussi pour tous ceux qui ne connaissent pas le Seigneur.

A la messe, le Christ récapitule tout ce qui se vit dans le monde, ce qui est déjà fécondé par l’Esprit Saint, l’Esprit Créateur qui agit alors même qu’on l’ignore. Jésus présente au Père ce don de lui-même et de son Église pour le salut de tous les hommes.

Vous portiez déjà la prière de l’Église que vous avez reçue comme diacres. La liturgie des heures est ce service de la prière de l’Église sur ce monde, pour ce monde créé par Dieu.

Tout à l’heure, les gens vont vous appeler « Père ». Cela doit vous étonner, doit vous surprendre. En tout cas cela nous oblige. Pourquoi cette désignation puisque par le baptême en Jésus-Christ vous êtes d’abord frères ? Tous ensemble nous sommes d’abord fils et filles de Dieu et c’est la fraternité qui nous constitue. Il faut d’abord apprendre à être fils. Etre fils, c’est se recevoir d’un autre. Devant l’illusion démiurgique de l’auto-engendrement qui se généralise aujourd’hui, il y a cette réalité fondatrice qui nous constitue. Nous sommes issus d’une union amoureuse. Nous sommes nés d’un acte d’amour qui nous renvoie nécessairement à l’acte d’amour initial et suprême : la création par Dieu. « Dieu est Amour ».

C’est ainsi que toute paternité ne peut venir que du Père du ciel. Il n’y a de paternité que divine. Tout père sur la terre reçoit sa paternité de Dieu. Un homme est d’abord un géniteur. Un géniteur n’est pas père. Il est habituellement désigné par la mère. Il le devient vraiment s’il reçoit cette paternité de Dieu pour engendrer à une vie au-delà du biologique. C’est ainsi qu’un prêtre n’est père que s’il reçoit cette paternité divine comme étant l’origine de toute vie, de la vie absolue reçue du seul auto-engendrement de la vie en Dieu. C’est pourquoi votre tâche sera essentiellement de communiquer cette vie que vous n’avez pas engendrée sur la terre mais que Dieu a engendrée de toute éternité en chacun et dont il déploie l’engendrement par vous aujourd’hui et chaque jour de votre vie de prêtre.

C’est une grâce inouïe qui vous est faite aujourd’hui. Vous serez vraiment pères en communiquant cette vie de Dieu dont vous avez reçu la charge.

C’est parce que vous pouvez dire comme saint Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16, 16), parce que vous participez à son intimité profonde, qu’avec lui comme saint Paul « vous êtes déjà offert en sacrifice », que vous vous recevez en Jésus Christ comme Fils de Dieu, que vous pouvez alors revêtir cette paternité qui donne la vie, la vie en abondance, la vie éternelle.

+Michel AUPETIT,
archevêque de Paris