Homélie de Mgr Michel Aupetit - Messe de la réconciliation

Sanctuaire de Lourdes - 13 août 2021

- 1 P 3, 8-12 ; Lc 15, 25-32

Pourquoi est-il en colère ce frère aîné ? Vous connaissez l’histoire : un père avait deux fils. Le plus jeune demande sa part d’héritage et dilapide son argent de manière honteuse et inconséquente. Ruiné et affamé, il revient vers son père qui l’accueille à bras ouverts en se jetant dans ses bras, en le traitant comme un roi. Le frère aîné, qui est resté fidèle est profondément choqué et en colère. Il se croit victime d’une injustice et refuse d’entrer dans le pardon que son père offre à son frère prodigue. Il devrait être mieux traité que le renégat.

Combien de fois dans les familles ai-je entendu ce genre de propos avec toujours une bonne raison à ces fâcheries destructrices ? L’injustice avancée comme argument nous permet de masquer cet épouvantable sentiment de jalousie recouvert alors des nobles atours de l’équité.

Aujourd’hui, il y a aussi cette multiplication d’une revendication victimaire. Celle-ci oblige à mettre un genou à terre, interdit une parole de vérité, même mesurée. Par cette attitude, dit le Pape François, « Ils ne renoncent pas à être possédés par cette même force destructrice dont ils ont été victimes" (FT 251).

En raisonnant comme cela, nous en restons à une vision étriquée de Dieu qui ne serait qu’un magistrat distributeur de bons points et de sanctions. Triste vision du Père ! En fait, l’histoire devrait commencer par : « Deux fils avait un père ». En effet, ce n’est pas les deux fils qu’il faut regarder, c’est ce père. Quel amour inconditionnel ! Le fils prodigue pardonné, accueilli par amour. Il ne s’agit pas de porter un jugement sur l’attitude de ce fils mais sur la magnanimité de son père. Et ce fils aîné qui a oublié la grâce extraordinaire d’être toujours avec le père. Ce n’est pas le veau gras ou le chevreau sur lesquels ils louchent tous les deux qui est important. C’est l’immense amour du Père qui va vers tous.

Parfois prodigues, parfois fidèles, arrêtons de nous regarder nous-mêmes et de juger les autres avec nos critères dérisoires. Regardons le Père. Ce Père dont le cœur aimant a été révélé par notre Seigneur Jésus-Christ et qui dépasse tout ce que nous pouvons imaginer nous sort de nos petites comptabilités étroites et dévastatrices.
Laissez-vous aimer ! Alors, vous pourrez aimer à votre tour et comprendre ce que veut dire pardonner. Ce n’est pas oublier le mal qui nous a été fait, mais c’est tirer un bien plus grand que ce mal par un surcroît d’amour qui nous vient du Père par son Fils Jésus Christ : l’Esprit saint qui transfigure tout. Alors, comme Jésus, nous pourrons dire : Père très aimant, pardonne leur, pardonne lui.

Mgr Michel Aupetit,
archevêque de Paris

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