Pauvreté : « La paroisse, un lieu de bienveillance, au sens de vigilance active »

Paris Notre-Dame du 10 novembre 2022

À l’occasion de la sixième Journée mondiale des pauvres, ce dimanche 13 novembre, Thibault Leblond, nouveau coordinateur de la délégation pour la solidarité du diocèse de Paris, nous invite à nous mettre à l’écoute des plus pauvres.

Thibault Leblond, coordinateur de la délégation pour la solidarité du diocèse de Paris.
© Charlotte Reynaud

Paris Notre-Dame – Dimanche 13 novembre aura lieu la Journée mondiale des pauvres. Comment vivre cette journée ?

Thibault Leblond – Cette journée a été instituée par le pape François il y a six ans ; cette année, il a choisi pour thème Jésus s’est fait pauvre pour Vous, tiré de la seconde lettre aux Corinthiens. Son intention n’est pas de célébrer ou de sublimer la misère, mais de permettre aux chrétiens de réfléchir à la place des pauvres dans nos communautés. Le dimanche d’après, nous fêtons le Christ-Roi ; ce n’est pas un hasard, et ces deux dimanches qui se suivent nous invitent à contempler le même visage du Christ serviteur qui est aussi Christ-Roi, et même roi par sa pauvreté. Cette journée est une invitation à se tourner vers les plus pauvres, à les questionner sur ce qu’ils vivent, car la pauvreté est aussi un lieu de connaissances, de transformations.

P. N.-D. – Que voulez-vous dire ?

T. L. – Questionner les plus pauvres, c’est leur permettre de dire quels sont les dysfonctionnements de notre monde. Ils ne sont pas objets de notre charité, de notre assistance ou des politiques publiques ; ils sont des personnes qui ont une expérience de vie, marquée par une force particulière car ils sont toujours debout, malgré les épreuves, la honte et l’exclusion que la misère peut générer. Leurs vécus sont d’abord des histoires de rupture : avec le monde, avec les autres, avec eux-mêmes… C’est une leçon sur les facteurs de rupture de nos sociétés. Ils ont aussi beaucoup à nous apprendre d’un point de vue philosophique et spirituel. Celui qui est sur le bord de la route dit quelque chose de cette pauvreté qui oblige à avoir besoin de l’autre ; cette dépendance interroge dans une société où l’autonomie est valeur suprême. Leur témoignage de foi est aussi édifiant. La dernière branche à laquelle ils s’accrochent, c’est Dieu. Qu’ils soient en colère, dans l’espérance ou la confiance, ils vivent une relation ancrée, incarnée, concrète à Dieu. Dans cette relation à Dieu, qui s’impose comme une évidence, ils manifestent une force qui nous invite à nous asseoir et à les écouter. C’est ce qu’ont exprimé les évêques, il y a un an, lors de l’assemblée plénière de Lourdes de novembre. C’est en se mettant à l’écoute des plus pauvres que nous favoriserons l’unité et la communion de l’Église.

P. N.-D. – Qu’est-ce que la délégation pour la solidarité propose ?

T. L. – Après plusieurs années marquées par le Covid-19 et l’impossibilité de se retrouver, l’idée est d’abord de vivre cette journée dans sa paroisse et de revenir à une attention de proximité, en vivant quelque chose de simple avec les gens de nos communautés : un repas, ou un café, fraternel sur le parvis de l’église. L’objectif n’est pas de faire à manger ou de distribuer un café mais de le partager, de faire en sorte de proposer un espace dans lequel on va se rencontrer en vérité. Cet hiver s’annonce avec beaucoup d’incertitudes et d’inquiétudes concernant l’inflation, les difficultés énergétiques ; la paroisse doit être un lieu de bienveillance, au sens de vigilance active. Dans nos assemblées, des gens vivent sur le fil et une aggravation de leurs conditions de vie pourraient les faire basculer dans la grande précarité. Je pense tout particulièrement aux étudiants et aux personnes âgées seules. La juste part de l’Église n’est pas de payer les factures des gens, mais d’exercer cette bienveillance, en rappelant que chacun est précieux aux yeux de Dieu et en tissant des liens de fraternité.

Propos recueillis par Charlotte Reynaud

Articles
Contact

Paris Notre-Dame
10 rue du Cloître Notre-Dame
75004 Paris
Tél : 01 78 91 92 04
parisnotredame.fr

Articles

© Trung-Hieu Do

« Rejoindre les situations humaines de ceux qui ne nous demandent plus rien »

Paris Notre-Dame – 5 août 2025

« L’Église doit être missionnaire ou elle ne sera plus rien en ce monde. […] Une foi qui ne se propose pas et ne se partage pas est une foi qui se dessèche et qui n’intéresse plus, même les croyants. » Ainsi s’exprimait Mgr Vingt-Trois dans sa lettre Notre mission à Paris, publiée les premiers jours de son épiscopat parisien, ajoutant, quelques lignes plus loin, cette formule que personne n’a oubliée : « Nous devons chercher, dans notre travail pastoral habituel, comment nous pouvons rejoindre les situations humaines de ceux qui ne nous demandent plus rien. » L’exhortation à cet élan missionnaire – pour lequel il avait défini quatre champs prioritaires, à savoir, la famille, la jeunesse, la solidarité et l’éthique – est le fil rouge de son ministère à Paris, en témoigne l’organisation des Assises de la mission, en 2008 et 2009, et les trois années placées sous le sigle de « Paroisses en mission », de 2009 à 2012, avec, comme point d’aboutissement, l’opération Avent 2014 qui permettra de déployer plus de 500 projets missionnaires durant le mois de décembre 2014. Son dernier programme pastoral diocésain, de 2015 à 2018, s’appuiera toujours sur la mission, autour des axes « Annoncer, partager, transmettre ». Entretien avec Mgr Bruno Lefèvre Pontalis, curé actuel de St-François- Xavier (7e), qui fut vicaire général du diocèse de Paris 2012 à 2016. Charlotte Reynaud

Lire la suite