Thibault, apôtre de la miséricorde
Paris Notre-Dame du 14 mars 2013
Depuis neuf ans, Thibault a pris l’habitude d’assister régulièrement à l’Eucharistie en prison, en compagnie de son association « Paul et Silas », chargée de l’animation des messes dominicales. Au contact des repris de justice, il nous livre un regard plein d’espérance sur le jugement dernier.
À l’occasion de l’Année de la foi, Paris Notre-Dame vous propose, chaque mois, le portrait d’un catholique dont le témoignage de foi s’articule avec un extrait du Credo.
« Est assis à la droite de Dieu le Père tout puissant, d’où il viendra juger les vivants et les morts. »
Rencontrer Thibault , c’est d’abord faire connaissance avec Yoda, un grand golden retriever magnifique, qui aboie une seule fois par conscience professionnelle et va ensuite se recoucher, laissant la place à son maître. Ce dernier sait vous mettre à l’aise. Souriant, affable, il parle d’une voix douce et posée. Il écoute avec attention, répond avec mesure et ne coupe jamais la parole. L’homme ne s’étend guère sur lui-même. Il confesse qu’il est marié, père de six enfants et grand-père de dix petits-enfants. Il avoue son âge, 69 ans. Il brosse à très grands traits son parcours professionnel : officier de marine de réserve, président directeur général de plusieurs sociétés. Il se dévoile un peu plus en évoquant sa passion pour la mer et le bateau. En revanche, le chrétien se livre beaucoup plus dès lors qu’il s’agit de témoigner de sa foi et de ses engagements paroissiaux.
De la grâce en prison
Qu’il soit en compagnie des personnes âgées ou des détenus des prisons de Fleury-Mérogis ou de la Santé, Thibault se sent à l’aise dans les services de compassion, un axe pastoral très développé à St-Nicolas des Champs (3e), sa paroisse. C’est donc naturellement qu’il a accepté, il y a neuf ans, de devenir responsable de « Paul et Silas », association qui se charge d’animer des messes dominicales en prison. Cet ancien dirigeant d’entreprise, au caractère doux, se retrouve donc très régulièrement à côtoyer des personnes reprises de justice et à évoluer dans un monde qu’on imagine dur et agressif. Et pourtant, lorsqu’il en parle, rien de tout cela ne transparaît : « Je ne pense pas aux actes des détenus. Quand je me rends à la prison, les conditions de l’aumônerie sont telles que leurs actes, qui me choqueraient si je les lisais dans le journal, me passent par-dessus la tête. Nous sommes tous là pour la même chose, l’Eucharistie. Il n’y a plus les innocents et les coupables, il n’y a que des croyants qui prient. Et je peux vous dire qu’il y a beaucoup de grâces en prison. Comme si dans cette période d’épreuve, de solitude, de privation de liberté, Dieu était encore plus présent ! »
La justice de Dieu
Une conviction qui lui permet d’appréhender avec beaucoup d’espérance la justice de Dieu : « La justice de Dieu n’est pas la justice des hommes. Pour protéger la société, le bien commun et les plus faibles, la justice humaine doit condamner ceux qui enfreignent les lois. Mais la justice de Dieu, c’est la miséricorde. Et Dieu n’est pas l’accusateur. Jésus nomme le péché mais ne condamne personne. C’est nous-mêmes qui pensons ne pas pouvoir nous pardonner nos fautes, mais Dieu est plus miséricordieux que notre cœur. » Aussi, quand on évoque le jugement dernier, c’est sans crainte qu’il répond : « Dans jugement dernier, j’entends surtout le mot “dernier”. Pour moi, cela veut dire que jusqu’au bout, on peut être racheté. Chacun de nous peut être le bon larron. Dieu ne veut pas nous enfermer dans le cercueil de nos fautes. Il veut nous sauver. » • Charlotte Reynaud